Outlast II : Silent file !

Hommage aux found footage dont le cinéma se délecte depuis le succès du Projet Blairwitch, Outlast avait apporté un vent de fraicheur sur le genre du survival-horror grâce à la vulnérabilité de son personnage et ce besoin de fuite perpétuelle. Logiquement, sa suite en reprend le concept même si une légère évolution du concept le dessert plus qu’autre chose.

À l’image du premier volet, Outlast 2 opte pour une approche narrative «minimaliste» misant beaucoup plus sur les documents à récupérer que les cinématiques. Un élément très présent dans le genre mais qui pose ici un problème majeur. En effet, sachant que l’histoire arrive difficilement à s’émanciper desdits documents, vous passerez à côté d’une bonne partie du scénario si vous ne récupérez pas la plupart d’entre-eux. Cette façon de faire nuit à la compréhension de l’histoire, d’autant que les quelques cinématiques manquent de maîtrise et semblent principalement là pour lier le passage d’une zone à l’autre. Dommage car au-delà de cet écueil, le parti-pris de proposer une aventure tournant autour d’une mystérieuse secte (fortement inspirée par celle du Temple du Peuple et du suicide collectif de Jonestown) hypnotise, du moins au tout début. Une fois passé cette étape, on tombe trop facilement dans un excès de gore qui, sans trop desservir le propos, banalise une violence qui ne parvient même plus à choquer le joueur/spectateur passée la première heure de jeu. Néanmoins, en intégrant un fort côté mystique baignant dans le fantastique, le scénario de Outlast 2 incite à avancer (à tâtons) pour découvrir la vérité résultant également d’étranges flash-back liés au passé du personnage principal.

Distillant une ambiance found footage malsaine, misant parfois de façon outrancière (à l’image du DLC Whistleblower) sur les scènes abjectes (synonymes d’éviscérations, d’empalements ou autres crémations), Outlast 2 semble délaisser le côté claustrophobique du premier épisode pour des environnements ruraux semi-ouverts. Malheureusement, ce n’est qu’une illusion tant les zones du jeu sont finalement étriquées, les murs de l’hôpital psychiatrique de Mount Massive étant simplement remplacés par des grillages ou des portails fermés rendant toute exploration impossible hormis lors des parties de cache-cache dans les champs de maïs. Outre cette première désillusion, on trouvera également frustrant que la seule raison d’être des adeptes hagards soit de patrouiller et de nous empaler au moindre faux pas. On aurait aimé qu’ils soient un peu plus vivants et moins soumis à des routines de déplacement malgré l’endoctrinement dont ils sont victimes (ceci les rendant finalement très proches des fous du premier épisode), afin de faire contre-poids avec les rencontres plus stressantes durant lesquelles des créatures (sortes de croisement entre le Pyramid Head de Silent Hill et le Nemesis de RE 3) armées de longues pioches nous coursent pour nous ouvrir de la tête aux pieds. Reste tout de même quelques passages inspirés, magnifiés par de très beaux jeux de lumière, et une progression constamment plongée dans une nuit sans fin.

Pétri de bonnes intentions et de quelques idées intéressantes, Outlast 2 échoue malheureusement à les mettre correctement en avant. Si on pourra cette fois se cacher dans davantage d’endroits (abreuvoirs, barils, armoires, sous les lits…), ces possibilités ne masquent malheureusement pas les errances de level design. On a ainsi l’impression d’être dans une sorte d’épuisant Die & Retry nous demandant de parfaitement connaître la zone pour éviter le Game Over (plus frustrant que punitif grâce aux check points) malgré les nombreux chemins à emprunter. Idéal pour nous sortir du jeu d’autant que tout n’est ici aussi que poudre aux yeux tant les façons de faire sont finalement assez limitées et dictées par une difficulté mal gérée renforcée par le fait qu’on ne pourra pas se défendre. Mais le gros problème d’Outlast 2 vient sans doute de cette orientation nous demandant parfois d’être très rapide (et donc de savoir parfaitement par où passer pour s’échapper), ou au contraire de prendre son temps (en se cachant, en analysant les patterns des fermiers), le tout devenant rapidement compliqué à cause des piles à récupérer pour faire fonctionner notre caméra, indispensables pour user de la vision de nuit et du zoom. Notons enfin le micro de ladite cam, précis mais lié au bruit produit par les fermiers et donc souvent inutile pour les situer lorsqu’on est caché, les ennemis ayant parfois tendance à ne plus marmonner.

Bien qu’Outlast 2 peine à convaincre sur plusieurs points, son aspect toujours aussi référentiel lui permet de s’en sortir sans trop de heurts tant les emprunts sont bien utilisés. Délaissant les références directes au found footage (bien que citant à plusieurs reprises Blair Witch), ce second épisode s’intéresse davantage au cinéma de genre des années 80, 90 en piochant ou en évoquant des films comme Rosemary’s Baby, Freddy : Nightmare on Elm Street, Children of the Corn mais aussi l’excellent segment Safe Haven de V/H/S 2. Il y a plus mauvaises références et si toutes ne sont pas parfaitement digérées, cette suite s’inscrit, tout comme son aîné, dans une envie d’horreur pure et dure. Dommage qu’elle veuille également y injecter du gameplay mal calibré ici et là, ceci minimisant l’immersion malgré un vrai travail sur l’ambiance.

Réussie, l’ambiance se casse malheureusement un peu les dents face à une évolution de gameplay maladroite qui aurait sans doute gagnée à être mieux pensée afin de s’intégrer plus harmonieusement dans cet univers champêtre, berceau d’une religion pervertie jusqu’à l’os. Toutefois, Outlast II parvient à surprendre et surtout à mettre mal à l’aise via des débordements gores ou des images impies totalement hallucinées.

Yannick Le Fur

Yannick Le Fur

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