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12 Minutes : Le temps nous est conté

Traité de nombreuses fois à travers le cinéma (Un Jour sans Fin, Edge of Tomorrow, Triangle) et le jeu vidéo (The Legend of Zelda : Majora’s Mask, Lightning Returns : Final Fantasy XIII, The Sexy Brutal), la boucle temporelle peut être un argument de poids pour un scénario tout comme un élément dangereux si elle n’est pas utilisée avec intelligence. Consistant à revoir constamment la même chose il faut alors ruser pour innover à chaque boucle tout en faisant avancer l’histoire jusqu’à sa conclusion. Exercice difficile, périlleux même, qu’entreprend également 12 Minutes.

Un homme rentre chez lui et y retrouve sa petite femme. Ils échangent quelques banalités puis finissent par passer à table afin de fêter une bonne et heureuse nouvelle. Tout à coup, quelqu’un sonne à la porte. Le visiteur, qui se prétend policier, entre dans l’appartement puis tout s’enchaîne très vite. Il menotte le couple, menace la femme et lui ordonne de lui remettre une montre. L’homme arrive à se détacher, entreprend de défendre sa compagne mais prend un coup de poing qui le met à terre. C’est alors que s’opère un retour en arrière de quelques minutes, alors que l’homme vient juste de rentrer chez lui. Bienvenue dans 12 Minutes. Si les quelques lignes qui précédent vous ont intrigué, sachez qu’elles ne représentent que l’une des nombreuses boucles temporelles que vous allez devoir vivre pour tenter d’enrayer le piège temporel duquel vous êtes prisonnier.

L’homme, c’est vous, et il va vous falloir désormais découvrir la vérité que cache votre femme et l’identité du policier en voulant à sa vie afin d’espérer retrouver votre quotidien. Fortement inspiré par le Septième art (Shining, Fenêtre sur Cour, Filth…), le thriller de Luis Antonio repose également sur les prestations de ses trois acteurs, Daisy Riley, James McAvoy et Willem Dafoe. Pourtant, malgré des références de premier choix, difficile de s’impliquer émotionnellement dans 12 Minutes tant le jeu subit son concept plus qu’il ne l’embrasse avec intelligence. En effet, à mesure que les boucles se suivent, l’intérêt s’étiole à cause de mécaniques maladroites et d’une construction assez lourde ne parvenant jamais à véritablement insuffler assez de variations dans les situations pour exciter la curiosité. Ainsi, pour découvrir le véritable pourquoi du comment à travers l’une des trois «vraies» fins, vous devrez enchaîner entre 8 et 9 boucles (chacune durant 8 minutes en temps réel) pour glaner suffisamment d’informations et ainsi progresser en abordant de nouveaux sujets de discussion avec votre femme. Ce faisant, vous pourrez alors utiliser certains objets qui eux-mêmes déclencheront certaines réactions dans les boucles suivantes jusqu’à découvrir le fin mot de l’histoire.

Le problème de 12 Minutes tient donc autant à son scénario qu’à son plot twist tiré par les cheveux mais aussi à l’obligation de subir véritablement ces incessants retours nous mettant systématiquement face à la même scène. Un simple baiser de votre femme ne sera alors plus vu comme un geste d’amour (pourtant important puisque le but est de sauver votre bien aimée) mais comme un élément de game design, impossible à éviter et nous faisant perdre quelques secondes alors qu’on sera déjà dans une logique, bien plus pragmatique, de recherches d’indices. Le bruit caractéristique de l’ascenseur arrivant à notre étage, et donc synonyme de l’arrivée du policier, passera d’un gimmick anxiogène à un élément nous renseignant simplement sur le fait qu’il nous reste quelques secondes pour faire telle ou telle tâche, aborder tel ou tel sujet. Certes, il est possible d’accélérer les dialogues déjà abordés ou même le temps (en allant se coucher sur notre lit) mais malgré cela, 12 Minutes perd rapidement de son attrait.

Si on lui pardonnera son aspect technique limité, peu important dans le cadre de ce huis clos temporel, on se montrera en revanche plus critique sur l’élaboration même de l’ensemble ne parvenant jamais vraiment à nous étonner, à deux ou trois exceptions près. L’idée de prendre comme point de départ une scène du quotidien pour bifurquer dans le Fantastique est certes commune à de nombreuses œuvres mais encore faut-il savoir l’alimenter pour susciter l’envie chez le spectateur/joueur. Bien que le jeu cherche à brouiller les pistes en puisant dans le rêve et la réalité, sa structure brouillonne (au delà d’une certaine moralité assez dérangeante mais néanmoins intéressante à traiter) le fait reculer de deux pas quand il en avance d’un d’autant que les personnages eux-mêmes donnent l’impression d’avoir été posés là comme les acteurs d’une pièce attendant que le rideau tombe. Manquant d’épaisseur malgré un background dévoilé petit à petit, le couple ne génère jamais l’empathie recherchée d’autant qu’il faut avouer que les comédiens leur prêtant leurs voix ont fourni une prestation neutre voire assez quelconque. Au final, 12 Minutes se montre aussi intriguant dans ses premières boucles que décevant dans les suivantes, la faute à un concept digéré sans être pour autant maîtrisé.

Grâce à un concept excitant, 12 Minutes avait de sérieux arguments pour convaincre. Malheureusement, passé les premières boucles temporelles, il s’avère maladroit dans sa progression en semblant prisonnier de son idée motrice, et peu inspiré dans son histoire, certes intrigante mais jamais servie par une réalisation à la hauteur, un casting vocal 5 étoiles peu inspiré et une écriture à même de créer l’empathie désirée ou l’envie de découvrir l’ensemble des fins disponibles.

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James Bond : Mourir Peut Attendre : La conclusion tant espérée ?

Portant plus que jamais son titre avec la pandémie de COVID, le dernier James Bond de Daniel Craig se sera longuement fait attendre. Ultime baroud d’honneur pour le blondinet qui aura redéfini le personnage avec brio, Mourrir Peut Attendre avait la lourde tâche de faire oublier Spectre, vide et peu inspiré, tout en offrant à Craig un dernier opus à la hauteur de son charisme. Pari gagné même si le long-métrage de Cary Joji Fukunaga aurait gagné à faire quelques concessions.

Dès son premier plan, Mourir Peut Attendre affiche un côté référentiel qui ne le quittera pas durant 2h43. Renvoyant directement à la fin d’Au Service Secret de sa Majesté, James et Madeleine roulent sur une route de montagne, affichant une quiétude et un amour réciproque, sur fond du We Have All the Time in the World de Louis Armstrong. Tranchant radicalement avec l’image à laquelle nous a habitué 007, la séquence s’offre également une parenté avec le film de Peter Hunt pour mieux coller à la fin de Spectre. Profitant des somptueux panoramas de la ville italienne de Matera, l’introduction renoue également avec le passé de James lorsque ce dernier vient se recueillir sur la tombe de Vesper, en guise d’ultime adieu à sa bien aimée avant de voguer vers de nouveaux horizons sentimentaux. Bien entendu, le calme cède rapidement à la tempête déchaînée par Ernst Stavro Blofeld, pourtant emprisonné dans les murs du MI6.

Alternant entre passé et présent, l’ouverture de ce nouveau James Bond se montre en tout point virtuose et totalement raccord avec le travail effectué depuis Casino Royale. Plus intimistes, mais aussi plus sombres, plus brutales, les premières minutes permettent au réalisateur de la Saison 01 de True Detective d’afficher de grandes ambitions, autant dans la forme que le fond. Malheureusement, passé cette longue et très efficace introduction, le film revient vers quelque chose de plus didactique en essayant coûte que coûte de conclure tout ce qui doit l’être avant que Daniel Craig ne cède définitivement la place.

Mourir Peut Attendre devient alors une sorte de créature hybride essayant de rendre hommage à son héritage, ce qu’il a lui même créé tout en se voulant actuel (à travers, notamment, ses personnages féminins) et divertissant.

En un sens, il y réussit mais au prix d’une histoire malheureusement assez décevante servie par des personnages effacés à l’image de Safin (Rami Malek), méchant dans la grande tradition Bondesque, propriétaire d’une base renvoyant avec délice à celles des premières heures de la saga et soutenu par Primo, son homme de main aussi efficace durant l’introduction que secondaire dans les deuxième et troisième actes.

On reprochera également aux scénaristes de ne pas avoir accordé suffisamment d’importance à Nomi (excellente Lashana Lynch), nouvelle détentrice du matricule 007 après le départ de James Bond. Une idée très intéressante, dans l’air du temps, pour une exécution maladroite, Nomi étant vite reléguée au rang de faire-valoir à l’intérieur du MI6 et n’ayant le droit qu’à deux scènes d’action, courtes qui plus est. Même son de cloches avec le personnage de Paloma (Ana de Armas), agent de la CIA (prétendument) sans expérience mais explosant l’écran (dans tous les sens du terme) lors d’une incroyable scène d’action, élégante, Bondesque au possible mais ne débouchant sur rien de concret. On comprend alors que les auteurs ont préféré se concentrer sur Madeline (Léa Seydoux) afin, de conclure son arc narratif. Cela a du sens mais dénote beaucoup trop de ce besoin irrépressible de tout boucler quitte à sacrifier certaines parties de l’histoire en donnant l’impression d’assister à une sorte de défilé durant lequel chaque personnage (M, Q, Miss Poney Penny, Felix Leiter, Blofeld…) y va de sa petite apparition, aussi fugace soit elle.

Reste que Mourir Peut Attendre propose un vrai spectacle, certes inégal, plutôt timoré dans son action très académique et en cela très loin de Casino Royale, mais toujours mû par l’envie d’offrir une qualité visuelle, que ce soit à travers ses magnifiques décors, la très belle photo de Linus Sandgren (First Man) ou sa réalisation maîtrisée.

Sans égaler Casino Royale ou même Skyfall, Mourir Peut Attendre constitue une très bonne conclusion pour Daniel Craig. Si on eut apprécié que les scénaristes trouvent un meilleur équilibre entre l’histoire à proprement parlé et le besoin de conclure tout ce qui était resté en suspend à la fin de Spectre, le film de Fukunaga n’en reste pas moins divertissant, émouvant et visuellement éclatant.

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What If… S01 : Quand tout est permis ?

Née en 1977, la série de comic-books What If… aura attendu l’arrivée de Disney+ pour être déclinée en série d’animation. Une évidence, serait-on tenté de dire, tant le concept de multivers, central dans la Phase IV, se prête parfaitement à l’exercice qui, rappelons-le, est canon et donc lié au MCU. Mais au-delà des possibilités offertes par un tel concept, les 9 épisodes de cette première saison sont-ils suffisamment efficaces sortis d’un fort aspect fan service ?

Globalement, cette première saison remplit parfaitement son office bien que les épisodes ne soient pas tous de qualité égale. Logique en un sens puisque chaque segment (à l’exception des deux derniers) se suffit à lui même. Optant pour des ambiances très différentes en misant sur l’humour, l’action ou un côté un peu plus intimiste, les épisodes se suivent et ne ressemblent pas même si l’ensemble repose sur un concept similaire en nous présentant des événements connus (puisque relayés à l’intérieur du MCU) qui se sont passés différemment sur des Terres parallèles.

Il est donc inutile de le nier, la série brosse le fan dans le sens du poil en lui présentant des amorces connues pour mieux les modifier afin de mettre en avant des personnages secondaires ou d’intervertir les rôles. Le résultat est, comme on pouvait s’en douter, plutôt réjouissant même si on aurait apprécié une animation mélangeant 2D et 3D plutôt que de la full 3D n’arrivant pas toujours à reproduire des mouvements de corps fluides ou des expressions faciales de qualité. Toutefois, la mise en scène de la plupart des épisodes étant d’un très bon niveau, elle compense les carences précitées. On passe donc un très bon moment en (re)découvrant des histoires déjà contées tout en appréciant de retrouver certains personnages dans des rôles différents.

  • Episode 01 : Et si… Captain Carter était devenue le premier Avenger ?
  • Durée : 31 minutes

Le premier épisode se déroule en 1943 et s’intéresse à Captain America ou plutôt à l’agent Carter qui va utiliser le serum qui a transformé Steve Rogers en l’icône qu’on connait. Une excellente introduction, très dans l’air du temps, et proposant de revivre l’affrontement entre les Alliés et l’Hydra. Un soupçon de romantisme, une pincée d’humour, des séquences d’action qui font mouche, ce premier segment donne le ton et profite d’un bon rythme, du charisme de Peggy et du duo Stark/Rogers pour ré-imaginer la naissance d’Iron Man.

  • Episode 02 : Et si… T’Challa était devenu Star-Lord ?
  • Durée : 31 minutes

Ambiance science-fiction pour ce deuxième segment puisqu’on y côtoie les Gardiens de la Galaxie ainsi que T’Challa, aka Black Panther dans notre réalité, endossant le rôle de Star Lord. Revenant sur la relation entre T’Challa et Yondu qui va devenir son mentor, l’épisode opère rapidement un bond dans le futur pour réécrire l’histoire avec Le Collectionneur. Jouant à fond la carte du concept, l’épisode s’amuse à nous présenter un Thanos à l’opposé de celui qu’on connaît ou les membres des Gardiens dans des rôles différents. Un peu facile diront certains mais l’idée s’avère amusante bien que l’épisode se conclut de manière un peu poussive.

  • Episode 03 : Et si… le monde avait perdu ses plus puissants héros ?
  • Durée : 30 minutes

Les Avengers meurent les uns après les autres et rien ne semble pouvoir arrêter le mystérieux tueur. Tranchant en terme d’ambiance avec les deux précédents épisodes, non sans oublier d’y injecter une dose d’humour, le troisième opus de What If… maîtrise son sujet et tient en haleine jusqu’à sa surprenante conclusion.

  • Episode 04 : Et si… Docteur Strange avait perdu son cœur au lieu de ses mains ?
  • Durée : 34 minutes

Ici aussi, un épisode bien diffèrent, plus sombre, plus tragique et entièrement pensé autour d’une boucle temporelle que s’inflige le Docteur Strange pour tenter de sauver sa femme. Abordant l’inéluctabilité du destin, les limites de ce qu’un héros peut accomplir et les choix d’un homme pour récupérer ce qu’il a de plus précieux au monde, l’épisode nous présente ce qu’aurait pu devenir Docteur Strange s’il avait cédé aux arcanes les plus sombres de la magie. Un excellent exercice de style.

  • Episode 05 : Et si… des Zombies envahissaient la Terre ?
  • Durée : 30 minutes

Bien que s’inspirant de la très populaire série Marvel Zombies, cet épisode n’en reste pas moins décevant, ne serait ce que par son approche bien trop humoristique qui sied mal à cet univers. Les morceaux de bravoure étant également assez maladroits et l’histoire peu inspirée, l’ensemble fonctionne moyennement d’autant que l’histoire précipitée peine à convaincre.

  • Episode 06 : Et si… Killmonger avait sauvé Tony Stark ?
  • Durée : 31 minutes

Une fois n’est pas coutume, c’est un vilain qui est au centre de cet épisode. On y retrouve en effet Killmonger (l’antagoniste de Black Panther) qui, après voir sauvé Tony Stark, va s’allier avec ce dernier. Tout l’attrait de cet épisode étant de savoir si Killmonger œuvre véritablement du côté de la justice, je ne m’appesantirai pas sur le scénario. Bien que ce segment soit loin d’être le meilleur de cette première fournée, reconnaissons lui tout de même un aspect un peu plus exotique dû au fait qu’une partie de l’intrigue se déroule au Wakanda et au développement plutôt intéressant de la personnalité de Killmonger.

  • Episode 07 : Et si… Thor avait été fils unique ?
  • Durée : 32 minutes

Malgré un affrontement parfaitement mis en scène entre Thor et Captain Marvel, l’épisode se montre malheureusement un peu lourdingue à cause d’un humour omniprésent centré autour de la nature extravagante du fils d’Odin et sa propension à toujours vouloir faire la fête. Très vite agaçants, héros comme épisode perdent de leur attrait d’autant que les personnages secondaires (à commencer par Jane Foster) se résument à leur plus simple expression en essayant d’offrir un contre-poids à la personnalité de Thor.

  • Episode 08 : Et si… Ultron avait gagné ?
  • Durée : 28 minutes

L’un des meilleurs épisodes de cette première saison. Vision, devenu Ultron, acquière les Pierres de l’Infini et devient vite conscient de la présence du Gardien (l’être cosmique relatant les faits en tant que narrateur de chaque épisode) et de fait, de la présence d’autres univers. S’en suit une course contre le temps afin d’empêcher Ultron d’investir notre propre réalité. Rythmé, proposant le meilleur affrontement de cette saison qui use au mieux du concept des multiples réalités, l’Episode 8 est aussi excitant dans ce qu’il montre que ce qu’il sous-entend pour l’avenir de la Phase IV.

  • Episode 09 : Et si… Le Gardien avait rompu son serment ?
  • Durée : 33 minutes

Formant un diptyque avec l’Episode 08, l’ultime épisode de la Saison 01 de What If… se devait de terminer l’intrigue tout en consolidant ce qu’il avait mis en place. C’est peu ou prou ce qu’il parvient à faire, en faisant intervenir notamment l’ensemble des héros vus dans les épisodes précédents. La conclusion, dans la grande veine de ce que nous propose le MCU depuis des années, n’en reste pas moins un brin timorée et finalement assez classique.

Cette première saison de What If… coche à peu près toutes les cases et si on aurait aimé davantage de prises de risques, ou une animation un peu plus fluide, son visionnage reste très agréable. Bien qu’inégaux, les épisodes conservent quasiment tous ce petit quelque chose de réjouissant, que ce soit dans l’action ou quelques surprises et idées bien amenées. Avant tout pensée pour faire plaisir aux fans, la série reste bien orchestrée, dispose d’une conclusion fortement liée aux prochains films du MCU et préfigure, on l’espère, une Saison 02 qui n’aurait pas peur d’aller encore plus loin dans son principe de réécriture des événements passés.

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Ghost of Tsushima : Director’s Cut – Attention chérie, ça va couper !

Bien que sortant un an après la version PS4, Ghost of Tsushima n’a rien perdu de sa superbe sur PS5. Au contraire, le titre de Sucker Punch (InFamous, Sly Raccoon) retrouve un nouvel souffle grâce aux capacités techniques de la machine de Sony tout en affichant un visuel toujours aussi enchanteur ainsi qu’un contenu enrichi.

Très classique dans le fond, Ghost of Tsushima avait réussi à tirer son épingle du jeu en s’appuyant sur son somptueux visuel faisant référence à moult films issus de la culture japonaise et hong-kongaise. Terriblement beau, reposant, et soutenu par une magnifique bande-son et un gameplay très efficace, le titre de Sucker Punch possédait un côté enivrant qu’on retrouve bien entendu dans cette Director’s Cut affichant des graphismes en 4K et un framerate en 60 fps. Techniquement solide sur PS4, le titre se transforme en véritable roc sur PS5 grâce à des temps de chargements quasi absents ou bien encore l’utilisation de la DualSense, timide mais efficace, notamment lors du tir à l’arc. Précisons également que les fonctions gyroscopiques de la manette seront mises à profit dans les nouveaux sanctuaires des chats où vous devrez jouer un air de flûte pour faire venir les félins en suivant une variation symphonique visible à l’écran. Ingénieux et totalement raccord avec l’esprit zen véhiculé par le jeu.

Toutefois, ce qui constitue le plus gros point d’intérêt de cette Director’s Cut reste les différents ajouts de gameplay et bien entendu l’île d’Iki, accessible dès la fin de l’Acte 2 de la trame principale. Ne changeant nullement les fondamentaux du titre, cette nouvelle zone, outre le fait de proposer un arc narratif inédit, saupoudre l’ensemble de quelques idées nouvelles. Ainsi, il sera désormais possible de charger vos ennemis en étant sur votre monture, pour peu que vous ayez débloqué au préalable cette technique, ou bien encore de verrouiller ces derniers. Une bonne chose d’autant que les rangs Mongols se voient dotés d’un nouveau type d’ennemi, les Shamans, qui à l’instar des War Crier de Mad Max, ont la capacité de booster les capacités des guerriers alentours. Inutile de préciser qu’il conviendra de les éliminer en premier lieu afin d’éclaircir plus rapidement les rangs ennemis.

On notera également le fait de pouvoir désormais stocker les munitions supplémentaires dans des sacoches de son cheval et ainsi refaire le plein une fois en selle. Pratique. Pour vous aider dans la reconquête de l’île d’Iki, il vous sera aussi possible d’obtenir de nouvelles armures en bouclant certaines quêtes annexes. Bien celles-ci tournent à nouveau, pour la plupart, autour de la prise de villages tenus par des bandits/Mongols, certaines s’avèrent plutôt bien écrites et complémentaires de celles principales. D’ailleurs, en s’attardant sur le passé de Jin, ces dernières jettent un regard nouveau sur les agissements de son père, tout ceci étant accentué par différents flash-backs associés à des totems disséminés sur l’île ou bien encore les visions de l’Aigle (aka Ankhsar Khatun, le nouvel antagoniste de ce contenu) qui mettent en avant les méthodes expéditives du samouraï, qu’elles soient ou non légitimées par son code d’honneur, afin de fragiliser notre héros. Intégrées au récit, ces visions pourront également intervenir lors de moments plus anodins (chute, le fait de se cacher…), ceci leur conférant un aspect aléatoire accentuant de fait le côté déstabilisant de la chose. A contrario, on regrettera malheureusement que Sucker Punch ait abusé de la chose en en rajoutant beaucoup trop au point que lesdites visions finissent par devenir des plus intrusives.

Pour autant, le guerrier qui sommeille en vous devra faire fi de ces hallucinations pour maîtriser l’art du combat. Comme je le disais, certaines armures pourront grandement vous simplifier la tâche. Si je vous laisse le plaisir de la découverte, je ne saurai que trop vous conseiller celle de Sarugami, particulièrement efficace car augmentant la fenêtre de parade parfaite. Un véritable atout, notamment lors des Duels, surtout dans les plus hauts modes de difficulté. Enfin, vous pourrez aussi profiter de duels au bokken pour parfaire vos techniques de contre et d’esquive ainsi que de challenges à l’arc à la difficulté plutôt élevée pour qui recherche l’Or.

En plus de cet contenu inédit (vous réclamant un peu plus d’une dizaine d’heures si vous voulez le boucler à 100%), l’excellent mode multi Légendes se voit lui aussi doter d’un nouveau mode. Après Histoire, Survie et Défis, le mode Rivaux, en 2V2, vous propose de faire équipe avec un compagnon et d’éliminer quantité d’ennemis afin de récolter le plus de magatama pour réaliser des offrandes afin de déstabiliser vos adversaires. Plus vous aurez de magatama et plus vous pourrez lancer des malédictions puissantes sur l’équipe adverse. Fun bien qu’un peu longuet pour arriver à l’ultime assaut de démons, Rivaux vient compléter les modes existants grâce à son aspect compétitif même si on lui préférera largement le mode Survie.

Si on pourra regretter une mise en scène trop statique et une construction similaire à celle du jeu de base, le nouveau contenu de cette Director’s Cut se savoure tel un met de qualité, saupoudré de plusieurs nouveautés de gameplay, et disposant d’un univers visuel et sonore aussi enivrant que celui de l’aventure principale. Reposant, aventureux, épique, Ghost of Tsushima Director’s Cut éblouie malgré son classicisme, enchante malgré son impression de déjà-vu et finit par nous emporter des heures durant dans une spirale contemplative et guerrière, sans même qu’on s’en aperçoive.

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American Horror Stories S01 : Peurs sur la ville ?

Rien ne semble arrêter Ryan Murphy et Brad Falchuk. Alors que la Saison 10 d’American Horror Story est actuellement diffusée, sort en parallèle la première saison de son spin-off sobrement intitulée American Horror Stories. Sept épisodes, sept histoires se suffisant à elles-mêmes, sept raisons de jeter un coup d’oeil à cette anthologie hésitant pour l’instant entre l’envie de voler de ses propres ailes et son héritage auquel elle est sans doute trop attachée.

Marchant dans les pas de sa grande sœur, American Horror Stories affiche dès le départ la couleur en proposant un double épisode se déroulant dans la Murder House qui servait de lieu principal à la première saison d’American Horror Story. Une entrée en matière assez maladroite puisqu’au delà du lien de parenté (qu’on retrouve déjà dans le titre de la série), l’intrigue s’avère finalement assez classique et un peu forcée en allant jusqu’à faire apparaître certains personnages de la Saison 01 d’AHS.

Par la suite, cette première saison affiche la couleur en abordant des thèmes assez récurrents de l’horreur à travers des intrigues mettant en scène serial killers, monstres et autres démons. Bien que la série ait l’intelligence de varier la durée de ses segments en fonction de ce qu’ils ont à raconter, ils ne sont malheureusement pas tous égaux et s’ils profitent chacun d’un superbe générique d’ouverture dédié (l’une des marques de fabrique d’American Horror Story), le reste s’avère finalement sans surprise même si certains opus disposent de quelques twists sympathiques, sombres ou fortement teintés d’ironie.

Une première saison qui se laisse voir malgré tout même si on attendra beaucoup plus d’originalité de Murphy et Falchuck pour la d’ores et déjà annoncée Saison 02.

  • Episode 01 : Rubber(wo)Man – Partie 1
  • Durée : 48 minutes

Se déroulant dans la Murder House de la Saison 01 d’American Horror Story, l’intrigue tourne autour de Scarlett emménageant avec ses deux pères. Bien entendu, elle na va pas tarder à être confrontée à ses phénomènes paranormaux liés au lieu, réputé pour être le plus hanté de Los Angeles. Bien que le couple de parents soit sympathique, que la relation entre Scarlett et Maya soit correctement traitée et que le tout ne manque pas d’humour, cette histoire de vengeance souffre d’un gros sentiment de déjà-vu, surtout pour celles et ceux connaissant AHS, et s’avère très timide en frayeurs et meurtres gratinés.

  • Episode 02 : Rubber(wo)Man – Partie 2
  • Durée : 46 minutes

La seconde partie de l’histoire développe un peu les personnages de Scarlett et Maya et s’articule autour de la fête d’Halloween durant laquelle les fantômes piégés dans la Murder House peuvent sortir. L’occasion d’offrir quelques aérations bienvenues au récit et de varier un peu les lieux et meurtres avant de conclure de manière plutôt poétique ce double épisode oscillant entre vengeance et histoire d’amour tragique. Une mise en bouche non dénuée d’intérêt mais bien trop classique au point de réutiliser personnages et fantômes de Murder House, sous couvert d’un fan service un peu trop marqué.

  • Episode 03 : Drive In
  • Durée : 41 minutes

Evoquant fortement l’épisode 8 de la première saison de Masters of Horrors, La Fin Absolue du Monde, Drive In s’intéresse à un film censé rendre fou ceux qui ont le malheur de le regarder. Ici aussi, l’histoire reste assez convenue mais la mise en scène ménage ses effets jusqu’à la tuerie annoncée avant de bifurquer vers la traque de son réalisateur pour une conclusion qu’on sent arriver mais qui n’en reste pas moins réjouissante en se permettant même une petite once d’ironie.

  • Episode 04 : The Naughty List
  • Durée : 37 minutes

A force de vouloir repousser les limites du bon goût pour engranger toujours plus de followers, quatre influenceurs vont aller trop loin et perdre petit à petit leur communauté. Décidant alors de revenir à un humour plus basique, ils vont s’en prendre à un serial killer déguisé en Père Noël. Outre la critique de certains YouTubers (comme Logan Paul) et des dérives de certains pour atteindre coûte que coûte la notoriété, l’épisode profite du visage buriné de Danny Trejo, toujours à l’aise quand il s’agit de camper des personnages déviants. Si le tout s’offre un joyeux jeu de massacre, l’ensemble manque de piquant pour vraiment marquer les esprits.

  • Episode 05 : BA’AL
  • Durée : 49 minutes

Comme son titre l’indique, le cinquième épisode troque meurtriers et autres fantômes pour un démon. Liv Whitley, qui n’arrive pas à avoir un bébé avec son mari, obtient un jour une statuette censée améliorée la fertilité. Le résultat est plus que probant puisque neuf mois plus tard, Liv accouche d’un petit garçon. Malheureusement, alors qu’elle est en pleine dépression post-partum, elle ne va pas tarder à être confrontée à des phénomènes étranges qui vont la faire douter de son état mental. Evoquant dans ses grandes lignes La Malédiction, cet épisode distille une atmosphère bien moins anxiogène mais propose de bonnes idées de réalisation, ainsi que quelques frayeurs et un twist plutôt réussi.

  • Episode 06 : Feral
  • Durée : 39 minutes

Dix ans après avoir perdu leur fils lors d’une promenade, Jay et Addy retournent sur le lieu de la disparition après qu’un chasseur leur ait rapporté des preuves de la survie de leur enfant. Outre le fait de troquer les environnements urbains pour un lieu plus ouvert, Feral lorgne du côté de The Descent en évoquant des prétendues créatures qui vivraient recluses dans ces grands espaces américains. Si l’idée avait de quoi exciter, l’exécution se montre un peu timorée malgré un dernier acte plus percutant. Dommage que la conclusion soit un peu facile et manque clairement de substance.

  • Episode 07 : Game Over
  • Durée : 48 minutes

Retour pour la troisième fois dans la Murder House en compagnie d’une mère de famille qui y séjourne pour s’imprégner des lieux dans l’optique de concevoir un jeu vidéo usant de la notoriété de la fameuse battisse. Si on ne peut s’empêcher de penser que les scénaristes ont beaucoup trop tiré sur la corde en intégrant ici un aspect «meta», l’épisode s’avère également beaucoup trop redondant en ressassant une énième fois les mêmes histoires de fantômes prisonniers et de malédiction. Une conclusion plutôt décevante à l’image de cette première saison bien trop occupée à aligner les clins d’oeil aux fans d’American Horror Story au détriment du sentiment de peur.

Ne parvenant jamais à acquérir une véritable personnalité, cette première saison d’American Horror Stories provoque peu de frissons et se montre plus occupée à citer sa grande soeur qu’à proposer des scripts originaux. Sans être désagréable, elle se montre simplement trop classique pour susciter un véritable intérêt et ce malgré quelques bonnes idées et une esthétique léchée.

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Them S01 : L’horreur en Noir & Blanc

Première saison de l’anthologie Them, Covenant traite du racisme exacerbé anti Noirs sévissant dans les années 50. Marchant dans les pas du cinéma de Jordan Peele (Get Out, Us), elle s’avère aussi fabuleuse dans le fond que dans la forme et parvient à travers ses dix épisodes à mélanger satire sociale et Fantastique avec une véritable maestria.

Installant son intrigue en 1953, Them nous invite à suivre Henry et Lucky Emory, ainsi que leurs deux filles, qui décident de quitter le Sud des Etats-Unis afin d’échapper aux lois Jim Crow, synonymes de ségrégation et de limitations sociales entre Blancs et Noirs. Espérant trouver une plus grande tolérance en Californie, la famille ne va malheureusement pas tarder à vivre un véritable enfer sur une dizaine de jours, au sein de leur nouveau quartier de Compton, entièrement composé de Blancs voyant d’un très mauvais œil l’arrivée de ces «intrus».

S’articulant autour de ses dix épisodes retraçant chacun une journée, cette première saison dépeint un contexte social tendu tout en mélangeant les traumas de la guerre à la perte d’un être cher en passant par le rejet de l’autre. La première grande force de cette saison (se suffisant à elle-même) tient sans doute au fait que son créateur, Little Marvin, a brillamment réussi ce que Jordan Peele n’avait su faire avec sa version de The Twilight Zone, en trouvant le point névralgique entre entertainement, horreur pure et dénonciation, ces éléments se nourrissant constamment l’un de l’autre pour illustrer la folie ambiante, qu’elle émane de chacun des membres de la famille ou de leurs voisins, aussi pervers, effrayants et dangereux que les forces maléfiques se tapissant dans le sous-sol de la maison des Emory.

Parfaitement pensée et construite, usant au mieux de son intrigue bâtie sur une unité de temps réduite amenant un enchaînement rapide des situations, cette Saison 01 s’évertue à dresser le bilan d’une Amérique raciste dont les fondements mêmes semblent avoir puisé dans la religion la force de haïr son prochain dès lors qu’il ne lui ressemble pas en tout point. Ne laissant jamais aux spectateurs un moment de répit, Them subjugue autant qu’elle dégoûte, excite autant qu’elle interroge. Profitant d’une réalisation éblouissante évoquant par moments les cadrages de M. Night Shyamalan, chaque épisode participe à la déconstruction d’une nation, ou du moins d’une partie de sa population, en confrontant chaque membre de la famille à ses démons qu’ils soient ou non issus de leur imagination. De fait, la cellule familiale d’où émane l’espoir et la force de lutter au tout début, finira elle-même par s’écrouler sous le poids des tragédies du passé ou des hallucinations dont seront victimes les deux jeunes filles Ruby et Gracie. Impeccables dans leurs interprétations, à l’image du reste du casting, les deux demoiselles impressionnent, que ce soit Gracie persécutée par Miss Vera, terrifiante vision d’une ancienne maîtresse d’école, lors d’un cours de classe qui tourne au cauchemar ou Ruby, désarmante de tristesse lorsqu’elle annonce à sa seule camarade blanche qu’elle ne veut plus être cette personne laide et qu’elle souhaite plus que tout être comme elle.

Se situant le plus souvent sur la ligne médiane séparant le Fantastique du réel, Covenant, tel un funambule au-dessus du vide, ménage ses effets en ne cédant que très rarement à l’exercice facile du jump scare. La vraie terreur vient ainsi de ce quotidien aseptisé et de ce qui se cache de plus pervers derrière la façade de cette « American Way of Life » prônant l’ouverture d’esprit. Dès lors, au rythme des épisodes, la tension se fait de plus en plus forte, jusqu’à cette éprouvante scène d’Home Invasion de l’Episode 5 ou du somptueux Episode 9 remontant jusqu’aux prémices de l’histoire américaine, dans un magnifique exercice de style en noir et blanc, comme avait si bien su le faire la série Watchmen, tout en revenant sur les origines du mystérieux Black Hat Man.

Naviguant entre les névroses de Lucky et de son mari en proie à leurs propres visions d’épouvante, la série s’ancre dans une réalité malheureusement bien tangible en invitant l’Horreur à travers un sitting de mères au foyer devant la maison des Emory, de Forces de l’ordre pourries jusqu’à l’os ou d’un patron se délectant du pouvoir dont il dispose sur la personne d’Henry.

Ouvertement politisée, Them n’en reste pas moins subtile dans ses propos et parvient au final à conjuguer purs moments de terreur et discours engagé grâce à ses figures horrifiques, à l’image du Tap Dance Man, critique contre la pratique du blackface, très répandue à cette époque, sortes de reflets sinistres et cauchemardesques d’une Américaine blanche prête à tout pour défendre «ses» terres.

Violente, dérangeante, sans concession, Covenant nous met face à l’horreur subie par les Afro-Américains dans les années 50. Usant au mieux de ses métaphores horrifiques pour plonger dans les origines de la société américaine afin d’y dénoncer un racisme latent ne demandant qu’à exploser, cette première saison de l’anthologie d’Amazon Prime indispose autant qu’elle fascine. Visuellement somptueuse, terrifiante, engagée, Them prend le meilleur du cinéma d’épouvante pour en utiliser les codes afin de dépeindre une horreur bien réelle. Le résultat s’avère en tout point captivant.

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Shangri-La Frontier (T01) : New challenger is coming

S’inscrivant dans une longue liste de mangas s’étant intéressés au jeu vidéo, à leurs univers ainsi qu’à leurs joueurs, Shangri-La Frontier leur embraye le pas en ne souhaitant pas nécessairement réinventer la roue. Pour autant, ce premier tome montre déjà une excellente maîtrise du sujet et une exécution graphique des plus plaisantes.

Débutant de façon somme toute classique, ce premier volume nous présente le bien nommé Sunraku, passionné de jeux vidéo mal finis, au gameplay maladroit et au game design inexistant, en somme : des belles bouses. Accro à ces titres buggés, l’adolescent passe son temps à acheter les pires jeux qu’il puisse trouver avec comme objectif de les terminer en contournant tous leurs soucis de conception. Un jour, alors qu’il vient de terminer un énième titre sans intérêt, sa route croise celle du MMORPG Shangri-La  Frontier, titre plébiscité par plus de 30 millions de membres. Va alors commencer une nouvelle aventure virtuelle pour le jeune homme qui devra mettre à profit les talents acquis après avoir déjoué les pièges de centaines de jeux finis à la va-vite.

Ce premier tome de Shangri-La Frontier ne perd pas une seule seconde et, à peine a-t-on le temps de faire la connaissance de Sunraku, qu’il est déjà à pied d’oeuvre dans le MMORPG en découvrant petit à petit les rouages du gameplay. Une très bonne chose permettant au titre de nous immerger dès les premières pages dans ce monde rempli de gobelins, gigantesques serpents ou de PNJ à l’IA des plus développées. En parallèle, le scénariste Katarina a eu la bonne idée d’expliquer les termes techniques pour les néophytes et d’intégrer, à l’image du manga Versus Fighting Story, un guide pour expliquer les rouages du jeu et ce qui le constitue. D’ailleurs, au rayon des bonus, on citera également en fin de volume une nouvelle se déroulant avant les événements du manga ainsi qu’un aperçu du prochain tome. Fort appréciable.

Concernant l’histoire en elle-même, comme je le disais, l’ensemble s’avère très convenu mais son rythme associé au dessin très dynamique de Ryosuke Fuji (L’Attaque des Titans : Lost Girl) procurent un plaisir de lecture bien réel. Notons que si vous êtes joueurs, nombre de passages devraient grandement vous parler, de la création d’avatar au dispatch des points de compétence sans oublier les premiers combats contre des ennemis faiblards pour engranger facilement de l’EXP ou bien encore la rencontre avec le premier boss. Qu’on aime ou non les genres du MMO ou du RPG, Shangri-La Frontier sait parler à notre fibre de gamer et c’est donc tout naturellement qu’on suit Sunraku dans ses pérégrinations qui le mèneront rapidement à rencontrer l’une des Sept suprêmes, autrement dit des monstres uniques surpuissants, cibles des guildes de Top players. D’ailleurs, cette première rencontre débouchera sur un élément ici aussi assez commun pour un shonen mais conférant au héros une aura plus impressionnante qui devrait bien entendu déboucher sur une évolution rapide de ses capacités.

De fait, on se retrouve vite en terrain connu et si les personnages secondaires sont assez limités dans ce volume (qui privilégie encore une fois les phases de levelling de Sunraku, la découverte du MMO ainsi que les rudiments régissant le genre), certains d’entre-eux, intégrés fugacement mais bien entendu des plus classes, devraient également prendre de l’ampleur dans les volumes suivants. Amis ou ennemis ? Seul l’avenir nous le dira.

Pour l’heure, la place laissée à l’action l’emporte et ces premières planches regorgent d’affrontements très bien mis en scène, dynamiques, lisibles et mettant en avant les connaissances du héros, dont l’équipement rudimentaire (un simple short et un masque d’oiseau) s’avère inversement proportionnel à ses capacités en combat et sa connaissance des jeux vidéo.

A ce titre, signalons que l’ambiance reste légère, même si on aurait apprécié un peu plus d’humour, et que les dernières planches nous convient à une rapide excursion dans une partie cachée du jeu plutôt savoureuse d’où Sunraku devrait ressortir encore plus puissant.

Sans atteindre la qualité d’un Outlaw Players, Shangri-La Frontier a donc de sacrés arguments en sa faveur et on attend désormais avec grande impatience le prochain volume afin de vérifier si les auteurs auront suffisamment d’idées pour varier leur récit (notamment en alternant un peu plus entre le monde réel et virtuel) tout en conservant l’excellent dynamisme de ce Tome 01.

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OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire – L’espion qui ramait

Douze ans qu’Hubert Bonisseur de Labath n’avait pas donné de nouvelles. Douze ans à espérer le retour de ce pastiche de James Bond aussi à l’aise pour balancer une manchette qu’une vanne toujours à la limite du bon goût. Son retour était attendu mais au final, force est de constater que l’espion a perdu de sa superbe, autant dans son assurance que dans sa capacité à faire rire.

Le constat est sans appel, OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire ne tient jamais vraiment la comparaison avec les deux films de Michel Hazanavicius. On pourra en premier lieu arguer du fait que le changement de réalisateur explique cet état de faits. D’un certain côté, ce serait la solution de facilité sauf que la réalisation de Nicolas Bedos s’avère classique mais suffisante pour cette comédie d’action davantage mue par ses punchlines et ses traits d’humour que sa mise en scène. Pour autant, le vrai problème vient de son scénario derrière lequel on retrouve pourtant Jean-François Halin, déjà à l’oeuvre sur les deux précédentes aventures d’OSS 117.

Troquant les années 60/70 pour les années 80, le film met en scène un OSS semblant avoir perdu son «mojo». Bien que le scénario s’en amuse en le confrontant notamment au sémillant personnage campé par Pierre Niney représentant la nouvelle génération d’agents, plus actuelle et tout aussi létale, l’ensemble s’avère moins percutant et surtout moins inspiré, au point de répéter plusieurs fois la même blague sur l’impuissance d’OSS en l’espace d’une heure. Certes, on y trouve de bonnes idées (la blague de Tintin au Congo, l’intégration d’OSS au service informatique, certains gags de situation fortement aidés par l’interprétation de Jean Dujardin, toujours aussi à l’aise dans le rôle) mais la longueur excessive du long-métrage (plus de 2h) ne l’aide pas et produit un sentiment de lassitude au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue. Paradoxal d’autant que cet opus s’inscrit davantage dans une relecture humoristique de James Bond, de son générique singeant ceux que de Maurice Binder, à certaines de ses scènes d’action.

On pourra également être décontenancé par le politiquement incorrect de cet opus, non pas dans sa propension à aligner blagues sexistes et racistes à une époque où le moindre débordement est mis au pilori, mais dans sa façon de l’amener. En effet, là où les précédents films se moquaient ouvertement de OSS à travers ses nombreux abus, la nature raciste, macho et ostentatoire de l’agent, Alerte Rouge en Afrique Noire offre à son personnage principal davantage de conscience de ce qu’il doit dire et faire. De facto, ses réactions, réflexions et autres écarts prennent une tournure différente, du moins pour le spectateur, en ne réussissant jamais à provoquer de véritables rires francs.

Saupoudrant l’ensemble de quelques clins d’oeil aux films précédents, qui ne parviennent qu’à nous rappeler à quel point ils étaient plus drôles et mieux construits, Alerte Rouge en Afrique Noire s’enlise dans son intrigue en ne parvenant que rarement à se renouveler. Ironiquement, le personnage de OSS 1001, censé dynamiser le tout, empêche le film de pleinement s’émanciper comme il aurait pu, la faute à une écriture banale et sans surprise. Reste donc un opus distillant quelques moments savoureux et un certain exotisme mais ne cherchant jamais vraiment à creuser sa matière première en préférant faire de ses personnages des sortes de fac-similés de ce qu’ils étaient précédemment.

Guère aidé par une écriture jamais à la hauteur de celles des épisodes précédents et certains personnages peu utiles, OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire s’empêtre dans une succession de gags redondants et une caractérisation maladroite d’OSS. Se présentant davantage comme un personnage plus soucieux de son image que l’insupportable mais irrésistible agent imbus de lui-même qu’il était autrefois, il est ici plus difficile de pleinement l’accompagner dans ses excès. Moins drôle, percutant et inspiré que ses prédécesseurs, ce nouvel OSS peine à retrouver la magie des deux précédents films et devra se contenter d’une intrigue s’étirant en longueur et n’arrivant que difficilement à provoquer quelques sourires, parfois gênés, à défaut de véritables éclats de rire.

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Resident Evil : Infinite Darkness S01 – Une série à croquer ?

Bien que Resident Evil ait depuis très longtemps cédé aux sirènes du cross media à travers quantité d’adaptations, la saga horrifique de Capcom n’avait jamais eu le droit aux honneurs d’une série d’animation. C’est désormais chose faite grâce à Netflix même si dans le cas présent, on aurait pu s’en passer.

Disons le tout de go, alors que Resident Evil : Infinite Darkness tente de s’adresser aussi bien aux fans qu’aux profanes, aucun des publics visés ne s’y retrouvera vraiment. La série de TMS Entertainment et Quebico accumule tellement de poncifs qu’elle réussit l’exploit de n’être qu’une sorte de parodie ringarde de l’univers du jeu de Capcom en se basant sur l’un de ses points faibles, son scénario. Ce dernier fait état d’une cyber-attaque à la Maison Blanche à la suite de quoi, le Président des Etats-Unis fait à nouveau appel à Leon S. Kennedy pour enquêter et savoir d’où provient le problème. L’ensemble n’étant composé que de quatre épisodes de 25 minutes, Leon ne tarde pas à faire la rencontre de Claire Redfield (comme le monde est bien fait), membre de l’ONG TerraSave. Très rapidement, ils vont se mettre en quête de vérité qui fera état, oh surprise, d’un complot et d’expérimentations diverses.

Le principal problème du scénario d’Infinite Darkness ne vient pas tant du fait qu’il tente de se situer à la croisée des chemins du film de guerre et du thriller mais bel et bien de son envie de traiter son sujet le plus sérieusement possible en n’assumant jamais le côté «nanaresque» de son intrigue à l’inverse des précédents films en CGI. Guère aidé par une écriture désarmante de médiocrité, le tout en devient involontairement drôle et kitsch. Certains dialogues (notamment entre Leon et Jason, ancien militaire traumatisé par son passé et depuis mandaté par la Maison Blanche) accumulent les lourdeurs, qui plus est renforcées par une musique symphonique, les flash-backs de Shen May (elle aussi agent fédéral) sont mal amenés et ne permettent jamais d’offrir une quelconque épaisseur au personnage voué à n’être que le pâle reflet d’Ada Wong, et Claire Redfield est si effacée que la série aurait aisément pu se passer d’elle. D’ailleurs, son traitement devrait agacer plus d’un fan puisque qu’après nous l’avoir présenté comme le pendant féminin de Leon dans Resident Evil 2, la femme forte devient ici une sorte de fantôme survolant le show jusqu’à moment où, piégée et incapable de faire un saut de plus d’un mètre pour s’en sortir, elle devra patiemment attendre que le beau mister Kennedy vienne la sauver.

Inintéressant, prévisible et manquant de dramaturgie, le scénario n’en oublie pas pour autant d’incorporer quelques clins d’oeils aux fans ainsi que diverses scènes d’action pour maintenir un certain rythme. Malheureusement, ces dernières doivent composer avec une animation très inégale (ou, au choix, totalement dépassée) ainsi qu’une réalisation n’étant jamais au niveau de celle d’un Degeneration/Damnation/Vendetta. Eiichirō Hasumi ayant la manie de toujours laisser sa caméra en mouvement, le tout devient difficile, voire extrêmement désagréable à suivre, le gunfight de l’épisode 3 (de nuit et simplement éclairé par les tirs d’armes à feu) étant un véritable cas d’école à déconseiller aux épileptiques. Tout le temps rattrapé par sa durée limitée, la série accélère grandement les choses dans le dernier épisode et finit par complètement s’emmêler les pinceaux à travers un retournement de situation tellement mal utilisé que les scénaristes se sont par la suite sentis obligés d’inclure une séquence supplémentaire pour amener une éventuelle Saison 02 qui aura la lourde tâche de nous faire oublier ces quatre épisodes aussi décevants qu’inutiles.

Que vous connaissiez ou non la saga vidéoludique, difficile de conseiller Resident Evil : Infinite Darkness. Cherchant à développer une intrigue complète à travers quatre épisodes, la série ne fait que mettre en avant son écriture abominable, une intrigue datée et un niveau technique inégal. Accumulant les clichés, minimisant le rôle de Claire Redfield au profit de Leon, Infinite Darkness ne parvient à convaincre ni dans son histoire, ni dans son action et encore moins dans sa réalisation.

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Sans Un Bruit 2 – Le retour du cinéma muet

Pétri de bonnes intentions, Sans Un Bruit réussissait en 2018 à proposer un concept intéressant et à broder autour de celui-ci afin de nous offrir un survival aussi original qu’efficace. Tout en usant au mieux de ses effets, le film de John Krasinski suivait la fuite en avant de la famille Abbott, en pleine invasion extraterrestre. Délaissant le sensationnel au profit d’une sorte de minimalisme autant sonore que structurel, le long-métrage s’appuyait sur une tension savamment entretenue jusqu’à son final, certes bancal mais ouvrant la voie à une franchise en devenir. Trois ans plus tard, on retrouve Evelyn et ses enfants là où nous les avions laissé.

S’ouvrant sur une introduction en flash-back aussi impressionnante qu’immersive (malheureusement partiellement spoilée à travers les trailers), Sans Un Bruit 2 passe la seconde en reprenant dans la continuité du premier volet. Evelyn, Regan et Marcus s’échappent de leur ferme et reprennent leur voyage afin de trouver un lieu plus sûr pour y (sur)vivre. A l’image du premier épisode, cette Part II ne va pas tarder à les confronter à des aliens toujours aussi sensibles au bruit et capables de fondre sur les protagonistes au moindre bruissement de feuilles. Krasinski choisit une fois de plus d’aller à l’essentiel en ne cédant pas à l’appel d’une durée excessive. Tout est ici condensé en 1h37 (générique compris), ce qui influe bien entendu sur le rythme, plus soutenu que dans l’original.

Ne pouvant guère plus profiter de l’effet de surprise, le réalisateur s’évertue alors à tracer la route de notre petite famille qui va rencontrer en chemin une ancienne connaissance, Emmett, impeccablement interprété par Cillian Murphy. Va alors s’opérer un switch entre Evelyn/Marcus et Emmett/Regan, formant deux duos qui par la force des choses vont être amenés à se séparer. Une façon de s’émanciper de l’aspect huis-clos du précédent film et de multiplier les situations tout en approfondissant l’aspect humain des personnages. Le réalisateur prend ainsi le temps de s’intéresser à d’autres survivants en cassant la dimension familiale du premier volet et en permettant à Regan de gagner en épaisseur à travers son besoin de s’impliquer davantage dans la destinée de ses proches et cela au péril de sa vie.

John Kransinski soigne son montage (profitant d’un excellent mixage sonore) et utilise tout ce qu’il a sous la main pour apporter davantage de rythme à sa narration qui en devient dès lors plus prenante. Porté par ses comédien(ne)s, Sans Un Bruit 2 ne cesse de les malmener en les confrontant à des aliens toujours aussi dangereux mais aussi à des rescapés épars. Distillant quelles idées intéressantes, le film tisse au fil de sa progression un récit ténu mais néanmoins plus impactant que celui du premier volet en s’ouvrant à davantage d’environnements et donc de possibilités. On regrettera cependant que certaines pistes (le groupe de pillards, les survivants de l’île) ne servent qu’à faire monter la pression sans jamais bénéficier d’un vrai développement qui aurait pourtant permis à cette suite d’aborder la survie à plus grande échelle et donc de lui offrir un peu plus de matière. Dommage d’autant qu’en parallèle, Emmett profite d’une écriture intéressante (bien qu’assez conventionnelle pour le genre post-apo), aidée, il est vrai, par le besoin d’apporter à cette suite une nouvelle figure paternelle amenée à ne plus vivre dans son tragique passé afin de pouvoir épauler comme il se doit la famille Abbott.

Soignant son atmosphère en délaissant les jump-scares (à une ou deux exceptions près) pour au contraire privilégier les plans larges avec ces créatures bondissant sur leurs victimes, Sans un Bruit 2 reproduit la formule du premier épisode en n’intégrant jamais de véritables morceaux de bravoure afin d’appuyer la fragilité de l’ensemble des protagonistes.

Le film en profite alors pour mettre en avant Regan et Marcus jusqu’à en faire les «héros» de cette suite, de façon parfois un peu trop explicite à l’image d’une conclusion sous forme de jeu de miroirs, néanmoins esthétique et logique en vue du développement des adolescents dans une d’ores et déjà annoncée Part III.

Soutenu par une réalisation intelligente, Sans Un Bruit 2 pousse un peu plus loin le concept initial en développant, certes timidement, son univers, tout en parvenant à suffisamment varier ses situations bien qu’héritées pour la plupart de celles du précédent long-métrage. Emmené par un casting de qualité, cette Part II troque l’effet de surprise initial pour un rythme plus soutenu tout en ne délaissant jamais ses personnages au profit de ses créatures plus mortelles que jamais. En résulte une suite très efficace, allant à l’essentiel qui aurait malgré tout gagnée à creuser certaines pistes.