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Alan Wake II : Le Dormeur doit se réveiller

13 ans que nous avions laissé Alan bloqué dans l’Antre Noire, 13 ans que l’écrivain s’était sacrifié pour sauver sa femme en se condamnant lui-même à errer dans une vie de solitude et de création afin de réécrire la réalité… sa réalité. Si le cauchemar aura perduré via deux DLC (Le Signal, L’Ecrivain) et le stand-alone American Nightmare, c’est plus récemment, à travers l’extension AWE de Control, que le personnage avait à nouveau donné des signes de vie puisque faisant directement intervenir le romancier tout en teasant le second jeu qui nous intéresse aujourd’hui. Une renaissance attendue qui se devait de nous offrir un univers aussi torturé et maîtrisé que son aïeul et ses illustres références.

Commençons par le commencement en nous posant une question légitime : Faut-il avoir terminé Alan Wake, et accessoirement Control, pour pleinement profiter de cette suite ? Clairement, oui. C’est un fait, si vous n’avez pas fini ces deux jeux (et dans une certaine mesure les contenus évoqués en introduction), vous n’aurez pas toutes les cartes en mains pour appréhender et surtout comprendre cette suite. Thomas Zane, l’Ombre Noire, Monsieur Grincement… Si au fil de l’histoire, les pièces du puzzle se mettront en place, on regrettera que Remedy n’ait pas intégré un Previously d’autant que certains éléments ne sont jamais clairement expliqués à commencer par le rôle d’Ahti, omniprésent dans Control, ou bien encore Le Bureau de contrôle. A l’inverse, les fans seront aux anges tant le studio finlandais continue à étoffer son WakeVerse en imbriquant personnages et concepts alambiqués afin de donner du corps à cet univers à mi-chemin entre l’œuvre de Stephen King et celle de David Lynch.

Alors que le premier Alan Wake officiait principalement du côté du maître de l’horreur américain, autant dans la représentation de ses environnements évoquant Castle Rock que son histoire inspirée en partie de La Part des Ténèbres (The Dark Half), Alan Wake II opte davantage pour l’œuvre de David Lynch et plus particulièrement Twin Peaks tout en louvoyant du côté du In the Mouth of Madness de John Carpenter. Ses agents du FBI accros au café, l’Antre Noire évoquant en substance la Red Room, les habitants de Bright Falls semblant étrangement posés comme autant d’acteurs d’une pièce de théâtre, les références à la série de Lynch abondent. Jouant du début à la fin avec le concept de réalité et de fiction, Alan Wake II brouille les pistes tout en ne perdant jamais de vue sa ligne directrice : la libération d’Alan. Pour y parvenir, nous pouvons cette fois switcher à notre convenance entre Alan et Saga, agent du FBI fraîchement débarquée pour enquêter sur les agissements d’une mystérieuse secte. La proposition est intéressante, permet des aérations au récit tout en présentant à mon sens plusieurs défauts d’écriture.

En effet, bien qu’Alan soit désormais coutumier de cet univers après 13 ans d’emprisonnement, le plus logique aurait été de présenter Saga comme son opposé, une sorte de «contre-poids» découvrant peu à peu les règles régissant cet étrange univers. Malheureusement, ce n’est nullement le cas puisque Saga se montre incroyablement enthousiaste à l’idée d’enquêter sur sa première affaire sectaire (pourquoi pas) tout en semblant complètement déconnectée des événements voire de son équipier, Casey, avec qui elle aura de moins en moins d’interactions au fur et à mesure qu’elle progresse dans l’histoire. Etrangement, Bright Falls manque également de vie et le fait de ne pouvoir parler avec les habitants, en dehors de quelques passages imposés par le jeu, n’arrange pas les choses. Une scène du début illustre parfaitement ce ressenti. Après avoir vu un adjoint (campé par Shawn Ashmore, Jack Joyce dans Quantum Break, qui lui-même teasait déjà en 2016 le retour d’Alan Wake) disparaître sous ses yeux, Saga affronte son premier Possédé, féroce, le teint livide, un trou à la place du cœur. Les balles pleuvent, l’horreur s’installe et… rien, la vie du commissariat de Bright Falls reprend son cours alors que des corps de flics jonchent le sol de la morgue et qu’un des policiers est porté disparu.

A ce stade, deux façons de réagir : Soit l’absence de réaction de Saga Anderson (posée, détachée de l’horreur qui ferait vriller Dana Scully en moins d’une minute) pourra minimiser l’immersion, soit on embrassera cet aspect du récit faisant finalement le jeu des histoires imbriquées les unes dans les autres avec cet amalgame de réel et fiction.

C’est effectivement une manière d’accepter la chose, d’autant que la capacité de Wake à réécrire la réalité est à nouveau au centre de l’histoire. Certes, sauf qu’à mon sens, ça peut aussi vouloir dire qu’Alan est un piètre écrivain, incapable de décrire correctement les réactions d’une ville face au surnaturel.

Malgré tout, l’histoire d’Alan Wake II reste intéressante à suivre, notamment grâce à la mise en scène aussi élaborée que celle du premier volet. Perclus d’éclairs de génie synonymes de scènes éblouissantes, faisant à nouveau le jeu du transmedia via des scènes live directement intégrées dans la narration (avec toutefois un énorme bémol sur le jeu très approximatif de plusieurs acteurs à commencer par celui de Ilkka Villi dans le rôle principal), l’ensemble captive dans sa propension à prendre le meilleur du cinéma et des séries TV (le découpage en chapitres ponctués de cliffhangers, l’utilisation d’une bande-son éclectique composée de très nombreuses chansons) tout en peaufinant la forme. Sur ce point, ce deuxième épisode soigne ses ambiances à travers de somptueux jeux de lumière, aussi réussis que ceux du mètre étalon Red Dead Redemption II. Oscillant entre une New-York sordide, crasseuse issue d’un polar, et Bright Falls et ses alentours (lieu de « villégiature » de Saga), le jeu alterne entre des atmosphères crépusculaires du plus bel effet et les classiques de l’horreur (un hôpital, un parc d’attractions désaffecté, un manoir ou bien encore ces cabanes au charme finnois perdues dans les bois). Si le titre est inattaquable sur ses choix de DA, il l’est en revanche beaucoup plus sur sa stabilité et ses bugs, nombreux sur PS5, encore aujourd’hui malgré les patchs sortis.

Bien que la plupart des soucis techniques soient communs à de nombreux jeux (personnages en T-pose, ambiances lumineuses changeant promptement en passant d’une zone à l’autre, problèmes de sous-titres, synchro labiale FR…), d’autres en revanche sont déjà plus critiquables concernant un projet de cet acabit. Si la quasi intégralité des bugs bloquants est aujourd’hui du passé grâce à la série de patchs sortis rapidement, plusieurs agacent toujours, à l’image de certains objets inaccessibles à cause de contenants mal placés. Au rayon des quelques défauts de l’œuvre, on citera également la difficulté un peu étrange surtout qu’à l’image du premier volet, le rationnement des munitions et autres piles (indispensables pour affaiblir les Possédés) sera primordiale. Si vous pourrez à loisir explorer en retournant dans les zones où on vous fera de toute façon revenir pour la bonne marche de l’aventure, plusieurs ennemis vous y attendront. En somme, vous devrez utiliser vos ressources…pour aller en récupérer d’autres ! Alan Wake II proposant une difficulté bien plus élevée en début qu’en fin de partie, vous apprendrez à savoir quand fuir ou recharger une partie dans un des abris, disséminés ici et là, ceci faisant généralement disparaître vos adversaires dont la présence est très souvent aléatoire.

D’ailleurs, comme on pouvait s’y attendre, ce n’est pas tant dans son gameplay que son ambiance qu’Alan Wake II fascine et façonne son intrigue. On retrouvera donc plusieurs types d’adversaires qu’il faudra affaiblir grâce à des sources lumineuses avant de leur loger une balle en pleine caboche, ainsi que la sempiternelle collecte d’objets pour progresser. Mentionnons toutefois quelques énigmes intéressantes requérant de la jugeote ou une analyse de son environnement. L’idée de pouvoir également alterner à tout moment entre Saga et Alan apporte de la variété tout en suivant l’intrigue du point de vue des deux protagonistes qui finiront par se croiser. C’est d’autant plus vrai que chaque personnage profite de quelques subtilités de gameplay à commencer par Alan qui devra switcher entre plusieurs réalités au sein d’une scène pour avancer. Une astuce intelligente permettant d’apporter une pluralité d’ambiances au sein d’un même lieu.

Comme je le précisais, Alan Wake II brille par le traitement de son histoire, sujette à discussion mais conjuguant néanmoins les thèmes de la création, de la célébrité et de tout ce que ça peut engendrer de bon comme de mauvais. Il n’est donc pas surprenant qu’il nous fasse voyager dans les méandres tortueuses de l’esprit d’Alan qui prendront la forme d’une émission télévisée ou d’un vieux cinéma à l’image de ce que proposait déjà La Fin Absolue du Monde, autre œuvre de John Carpenter abordant également la notion de création et de destruction (d’une œuvre, d’un individu, de la Terre entière). Si Alan Wake II se restreint à l’univers de son «main character», il le fait cependant par l’entremise des autres personnages, qu’ils émanent ou non de son imaginaire. Pour autant, on aurait apprécié que la réflexion autour des thèmes énoncés plus haut soit davantage poussée, que ce soit à travers son rapport avec sa femme Alice ou la relation entre Saga et sa famille, à peine esquissée.

Plutôt que de creuser ces pistes, les développeurs ont préféré se réfugier la plupart du temps dans une sorte de délire Lynchien sans toutefois aller aussi loin que la dernière saison de Twin Peaks, et c’est assurément une bonne chose. En soit, ce n’est pas tant un défaut qu’un regret (de ne pas avoir l’un ET l’autre) même si à mesure que l’histoire puise sa force dans le fantastique ou l’étrangeté joyeusement barrée de ses situations, le plaisir de la découverte va de pair. Moins anxiogène que le premier volet, sa suite maximise tout ce qui avait été entrepris en 2010 grâce à la puissance de calcul actuelle des consoles/PC permettant de donner vie à des délires plus graphiques et davantage d’expérimentations, aussi bien visuelles, auditives que structurelles. Remedy n’a plus grand-chose à prouver sur ce point et leur savoir-faire se retrouve aussi bien dans la narration environnementale guidant intelligemment le joueur, un show musical qui fera date dans l’histoire du jeu vidéo ou bien encore ces couches de narration alimentant un récit finalement très kafkaïen.

Aussi maîtrisé soit-il, Alan Wake II ne cherche jamais à bousculer la formule établie par le premier volet. Si beaucoup d’éléments de gameplay sonnent juste, ils ne sont finalement que l’écho de choses vues dans d’autres oeuvres. Ainsi, le Palais mental de Saga et Alan n’est qu’une sorte de hub où on pourra recouper des informations sur les différents protagonistes, faire du profilage, réécouter/revoir les documents audio et vidéo ou améliorer ses armes. Rien de vraiment original mais tout ceci fonctionne grâce à la matérialisation de l’ensemble sous forme d’une pièce en renvoyant notamment à ce qu’on pouvait voir dans la série Sherlock Holmes de 2010. L’idée, simple en apparence, s’imbrique parfaitement dans l’ambiance générale et permet de littéralement plonger dans la psyché des personnages. Dans le même ordre d’idées, la capacité d’Alan à modifier son environnement à des endroits précis est une astuce ayant des airs de déjà-vu puisqu’en 1999, Soul Reaver permettait déjà de passer d’une dimension à l’autre (synonyme de morphing particulièrement impressionnant pour l’époque) afin de progresser. Néanmoins, à l’image du Palais mental, cet élément de gameplay trouve sa place dans l’histoire tout en multipliant les atmosphères plutôt que les jump scares, facilité malheureusement surexploitée durant un tronçon de jeu.

Si Alan Wake II aurait gagné à resserrer son intrigue autour d’une ou deux thématiques fortes plutôt qu’à alimenter constamment son histoire avec le jeu du «Qui est qui ?», il n’en reste pas moins un titre précieux appartenant autant à ses auteurs qu’aux joueurs qui pourront s’amuser à creuser la surface pour y trouver une deuxième lecture s’axant autour de la folie voire des violences conjugales. C’est ce qui rend intéressante cette suite qui n’est jamais aussi terrifiante qu’en nous montrant une horreur simple, à travers une succession de photos aussi triste que glaçante. Sans toujours réussir à offrir ce qu’on attendait d’elle et bien qu’étirant sa fin en usant jusqu’à l’épuisement de certains concepts de gameplay, ce second opus se montre suffisamment créatif, original et atypique pour qu’on s’y plonge à corps perdu afin d’aider Alan à trouver la lumière au bout du chemin.

Bien qu’inspiré et parsemé de moments uniques, Alan Wake II n’est sans doute pas la suite parfaite qu’on était en droit d’attendre. La faute à une écriture pas toujours au niveau, quelques effets faciles, une quantité non négligeable de bugs et une fin s’étirant inutilement jusqu’à abuser des concepts de profilage et d’enquête. Pourtant, au-delà de ses imperfections, le titre comporte tout comme son aîné, une volonté de mélanger les médias pour en sortir une œuvre singulière, référentielle et désireuse de densifier le «RemedyVerse». Perfectible mais joyeusement barrée et suffisamment profonde pour nous happer avec délectation.

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Scream VI : A hurler d’ennui

Plutôt que de se réinventer, Scream préfère tracer sa route et poursuivre dans la voie qu’il avait emprunté avec le précédent volet en se reposant une fois encore sur la mythologie de Woodsborough sous couvert d’un aspect meta. Toutefois, cet opus troque le charme des petites villes américaines contre celui de la Big Apple. Une idée forcément excitante pour un résultat d’autant plus décevant.

Après cinq films et une série annulée au bout de trois saisons, la saga Scream se doit de voir plus loin, autant dans l’inventivité de ses meurtres que dans ce qu’elle raconte, condition sine qua none pour perdurer et éviter de lasser son public. Si Wes Craven avait réussi à faire évoluer ses personnages tout en se questionnant sur la notion de suites et le cinéma de genre, Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett n’étaient pas parvenus avec Scream 5 à perpétuer cette tradition bien qu’accentuant davantage cette réflexion autour du slasher. La faute à des personnages agaçants (existants plus à travers les anciens personnages que par eux-mêmes), des dialogues pompeux et des meurtres certes plus sauvages mais manquant diablement d’inventivité. Scream VI avait donc la lourde tâche de s’inscrire dans la lignée des opus de Craven. Quoi de mieux pour ce faire qu’un tout nouvel environnement plus urbain, un nouveau cheptel de teenagers prêts à passer de vie à trépas en un claquement de doigts et une envie de repenser le slasher, ce que le premier épisode avait brillamment initié en 1996.

Le plus ironique est que l’introduction de Scream VI parvient à surprendre en se montrant terriblement originale surtout si on excepte les réactions, comme souvent, saugrenues des victimes toujours promptes à se jeter dans la gueule du loup. En effet, en choisissant sciemment de montrer dès le premier meurtre le visage du tueur, on pouvait penser que les scénaristes allaient redéfinir tout ce qui constituait la saga, quitte à marcher sur les plates-bandes de Columbo. Malheureusement, cette originalité va rapidement s’estomper au profit d’une structure des plus conventionnelles, le GhostFace démasqué se faisant prestement trucider par un autre tueur, celui-là même que vont devoir affronter notre groupe d’étudiants.

A partir de là, Scream VI ne quittera jamais ce chemin balisé par des meurtres manquant d’inventivité malgré l’environnement urbain qui aurait pourtant pu offrir cette bouffée d’air frais dont avait besoin la saga habituée à un cadre plus rural. Malheureusement, Scream VI ne semble jamais vraiment savoir comment mettre à profit New York même si le temps d’une séquence dans le métro en plein Halloween, on sent le potentiel du lieu. Cependant, au lieu de creuser la chose, Bettinelli-Olpin et Gillett préfèrent nous abreuver de dialogues meta ne parvenant même plus à alimenter de vraies réflexions tout en essayant vaguement d’expliquer l’absence de Sidney, écartée de cet opus pour cause de salaire jugé trop bas par Neve Campbell. On aura beau y retrouver Gale Weather, guère convaincante dans son traitement et peu aidé par l’interprétation de Courtney Cox semblant de moins en moins habitée par le rôle, ou le personnage de Sam plus que jamais hanté par son défunt père Billy Loomis (le Ghostface original), le scénario patine.

D’ailleurs, il y avait sans doute matière à approfondir cet aspect plutôt que de revenir une énième fois sur l’héritage de Woodsborough ici sacralisé par une sorte de musée macabre à la gloire des tueurs précédents. L’ironie de la chose est que cette volonté de vouloir raccrocher les wagons, de construire une gigantesque toile d’araignée afin de relier les motivations des tueurs joue contre ce sixième volet, finalement assez pataud en flanquant un Ghostface pas très débrouillard et toujours prompte à se prendre les pieds dans le tapis.

Manquant de tension (malgré une certaine sauvagerie) et d’enjeux, Scream VI se paye même le luxe de s’offrir une durée accrue (plus de deux heures) alors qu’il aurait été bien inspiré, au contraire, de faire l’inverse en se concentrant sur son rythme via des meurtres plus créatifs et une histoire davantage centrée sur ses personnages à commencer par Sam et Tara, campées par les convaincantes Melissa Barrera et Jenna Ortega. Au lieu de ça, cet épisode se complaît dans un flot de références tout en poursuivant le travail (médiocre) débuté dans Scream 5. Rien de nouveau ni de surprenant donc même si on aurait cette fois aimé être bousculés surtout après une entrée en matière aussi réussie.

Dans la droite lignée de Scream 5, Scream VI continue de travailler ses personnages sans pour autant le faire franchement et préfère une nouvelle fois abuser de la mythologie de Woodsborough alors qu’il n’y a définitivement plus rien à chercher de ce côté-là. Reste un épisode plus urbain, parfois sympathique (la scène du métro), souvent trop classique (la supérette, l’appartement) et n’arrivant jamais à concrétiser tout ce que son excellente introduction semblait promettre de terriblement excitant.

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Resident Evil 4 Remake : Separate Ways – Nouvelle voie pour nouveau DLC

Vous avez terminé Resident Evil 4 en long, en large et en travers mais vous en voulez encore ? Votre attente prend fin puisque Capcom a répondu à vos sollicitations (et probablement à celles de leurs actionnaires) via ce contenu supplémentaire. Sorti initialement sur PS2 pour la ressortie du jeu sur cette machine, Separate Ways (version 2023) met toujours en scène la charismatique Ada pour le plaisir de tous.

Pour bien comprendre Separate Ways, il faut revenir en 2005, date à laquelle arrive Resident Evil 4 sur PlayStation 2. Le jeu, initialement sorti en début d’année sur GameCube, débarque plusieurs mois après sur PlayStation 2. Afin de marquer le coup (et pour atténuer la différence visuelle à l’avantage de la machine de Nintendo), Capcom agrémente cette version d’un contenu inédit, Separate Ways. Une excellente idée d’autant qu’il permet de diriger Ada Wong, l’un des personnages préférés des fans aux côtés de Wesker qui, oh surprise, officie également dans ce contenu aux côtés de la dame.

Se déroulant en parallèle de l’aventure principale, Separate Ways, au-delà de son aspect recyclage, propose une aventure relativement courte (environ 3h) mais permet de profiter de Resident Evil 4 sous un nouvel angle en découvrant plusieurs passages clés d’un autre point de vue. Ainsi, on apprendra par exemple que c’est Ada elle-même qui sonne la cloche salvatrice lors de l’affrontement entre Leon et les villageois en début de jeu ou ce qui s’est passé juste avant que la belle donne le lance-missiles au beau gosse lors du combat final. Un parti pris intéressant qui permet à Capcom de réutiliser nombre d’assets.

Pour autant, le travail effectué sur ce contenu est très intéressant puisque proposant aux joueurs de survoler l’ensemble du jeu base en visitant des lieux connus mais suffisamment modifiés (via de nouveaux éclairages, un nouvel agencement des meubles, de nouvelles salles) pour ne pas se sentir lésé. D’autant plus vrai que le tout profite d’une verticalité accrue grâce au grappin d’Ada lui permettant d’emprunter des chemins inaccessibles à Leon. Une façon comme une autre de repasser par le village, le château et l’île sans avoir une impression de déjà-vu trop prononcée. Toujours dans un souci d’atténuer cette impression, les développeurs ont également bardé l’aventure d’action en mélangeant moments de panique et combats de boss prenant en compte les capacités d’Ada. Ainsi, le retour d’El Gigante intègre ladite verticalité dans l’affrontement et celui contre Saddler est abordé de manière différente. On profitera également de la présence du second Verdugo, entraperçu dans le jeu de base et qui reviendra affronter Ada à trois reprises en usant notamment de subterfuges hallucinogènes.

En soi, Separate Ways ne semble toutefois pas plus indispensable que cela, surtout si on considère son contenu ou cette façon qu’il a de nous faire repasser par des lieux connus. Pourtant, on ne peut que louer, au-delà du niveau technique aussi maîtrisé que celui du remake, la façon qu’il a d’utiliser ses éléments et ses personnages pour créer l’illusion d’une toute nouvelle aventure tout en densifiant l’histoire de l’original. Sur ce point, c’est brillant, le charme et les capacités d’Ada faisant le reste. De plus, le dernier tiers de l’aventure se montre plus généreux en enchaînant des séquences un peu plus originales, en mettant notamment en avant un dispositif digne de Batman afin de découvrir des indices pour progresser. Rien d’incroyable mais raccord avec la qualité d’espionne d’Ada et sa nature calculatrice. A ce sujet, il est d’ailleurs amusant de noter que la version 2023 de l’espionne a troquée sa robe de soirée (qu’il est toutefois possible de débloquer) contre un justaucorps moulant à souhait et qu’elle évolue toujours sur le terrain en talons aiguilles. Cocasse oui mais accentuant l’aspect sexy du personnage étant toujours aussi à l’aise quand il s’agit de balancer des coups de pieds aériens ou d’utiliser son grappin pour arracher le bouclier des ennemis.

Ce DLC sait donc y faire pour brosser le fan dans le sens du poil et ce ne sont pas les apparitions de Wesker qui me feront dire le contraire. Pour autant, Separate Ways n’est pas seulement constitué de fan service et sait même entretenir une vraie tension en nous mettant en danger, face à des pièges pervers ou deux Regenerators dans un couloir étriqué sans possibilité de fuite. Dans ce cas, une seule solution : ne pas paniquer, viser juste, et prier pour ne pas être à court de munitions. Une sorte de métaphore de toute la saga pour l’un des épisodes qui l’aura pourtant fait le plus progresser.

Légitimant à lui seul l’achat de la version PS2 en 2005, Separate Ways se veut tout aussi indispensable 18 ans plus tard. Embelli, amélioré, plus rythmé, le contenu propose une vision alternative et complémentaire de Resident Evil 4 tout en nous faisant incarner l’un des personnages les plus charismatiques de la série. Sachant que celui-ci s’accompagne d’une map supplémentaire pour le Mode Mercenaires et de la possibilité d’incarner Wesker, il serait dommage de refuser l’invitation.

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One Piece : Une adaptation des plus animées ?

106 volumes, 1074 épisodes, 15 films, One Piece est une œuvre fleuve, l’un des fleurons du genre shonen qu’Eiichirō Oda porte à bout de bras depuis 1997 afin de satisfaire une gigantesque fan base. Adapter un tel monument en live semblait une opération risquée autant d’un point de vue artistique que financier. Après la déconvenue Cowboy Bebop, Netflix s’est donc attelée à la tâche en prônant un respect absolu pour l’œuvre grâce, notamment, à la participation du mangaka. Le résultat, accumulant plusieurs défauts, n’en reste pas moins efficace, frais et au final complémentaire de l’anime en se présentant comme une vraie porte d’entrée sur ce monde foisonnant.

Alors que la série animée arrive dans sa dernière et longue ligne droite en multipliant moments épiques et révélations en cascade, l’adaptation live de Netflix reprend tout à zéro. Un vrai cours de rattrapage en accéléré pour celles et ceux ne connaissant rien à l’aventure de Luffy et ses Mugiwara. Vu le gigantisme du lore synonyme de centaines de personnages et créatures toutes plus folles/farfelues/charismatiques les unes que les autres, l’adaptation de One Piece semblait a priori très casse gueule, ne serait-ce que vis-à-vis des fans souvent très méfiants à l’égard des versions live de leurs franchises cultes. On ne peut pas nécessairement leur en tenir rigueur, surtout si on se fie aux adaptations de Dragon Ball ou bien encore Saint Seiya. Toutefois, de nombreux contre-exemples (Edge of Tomorrow, Gantz, Kenshin) sont là pour nous rappeler que tout est possible et, oh surprise, on serait tenté de ranger One Piece dans la catégorie des réussites malgré ses divers problèmes.

Histoire de pirates

Comme précisé quelques lignes plus haut, adapter One Piece relève de la véritable gageure tant l’histoire regorge d’arcs et de personnages ayant droit, pour la plupart, à de nombreux flash-back afin de leur donner de la profondeur. Si l’anime en abuse parfois, la série de Netflix prend le contre-pied de ceci afin de mieux rythmer ses 8 épisodes adaptant les 45 premiers de la série animée. Bien entendu, vu l’ampleur de la tâche, les scénaristes ont dû faire des concessions, pour le meilleur et pas nécessairement pour le pire bien qu’il y ait plusieurs choses à redire. En premier lieu, l’histoire reste la même et profite d’une trame claire et limpide : Luffy, jeune garçon avide d’aventures, rêve de devenir le Roi des Pirates. Après avoir mangé un Fruit du démon qui a transformé ses membres en caoutchouc, il prend la mer et au grès de diverses péripéties, va se constituer un équipage. Les thèmes du shonen (le dépassement de soi, l’amitié, l’esprit de groupe) sont bel et bien présents, le budget alloué à chaque épisode (18 millions de dollars) permet de donner vie à cet univers de façon étonnante et les easter eggs pullulent en réussissant pourtant à ne jamais être envahissants tout en annonçant le futur de la série dont la Saison 02 est d’ores et déjà assurée.

Cette Saison 01 a donc la lourde tâche d’introduire les membres de l’équipage tout en faisant avancer l’intrigue. Sur ce point, le pari est aux 3/4 réussi car si la présentation des Mugiwara est ici aussi extrêmement fidèle à son homologue animé, plusieurs partis-pris minimisent certaines révélations scénaristiques à commencer par la relation entre Garp et Luffy. Dans le même ordre d’idées, on a un peu de mal à comprendre le choix de montrer la violence en frontal (Zoro découpant un adversaire en deux) et parfois de façon beaucoup plus pudique en minimisant de facto l’aspect dramatique bien plus présent dans l’anime. A l’inverse, certains passages particulièrement intenses de l’anime (le discours entre Nami et Luffy avant d’aller affronter Arlong) trouvent un formidable écho en live. Le show de Netflix choisit ses combats (scénaristiques et au sens premier du terme) et si la comparaison anime/live n’est pas toujours à l’avantage de cette dernière, celle-ci se montre parfois à la hauteur de son héritage.

Le jeu des différences

Outre le besoin de presser le pas, on note certaines libertés prises pour les besoins du show. Si d’un côté, certaines sont légères et modifient habilement la structure initiale du récit (Mihawk battant Don Krieg pour affronter plus rapidement Zoro), certaines en revanche (l’affrontement Sanji/Zoro contre Kuroobi), altèrent la nature chevaleresque des combats voire la philosophie guerrière prônée par Zoro, de par l’absence d’antagonistes (Hachi en l’occurrence). Il est d’ailleurs intéressant de s’attarder sur la singularité de One Piece, point fort du manga mais accentuant en live un aspect un peu cringe. On citera par exemple les Den Den Mushi (des escargophones servant à communiquer), aussi drôles dans la série animée qu’ils sont dérangeants dans celle de Netflix. Les personnages anthropomorphes n’échappent pas non plus à ce constat, à commencer par les Hommes Poissons, dont certains (Arlong en tête) peinent à être crédibles. Pourtant, ici aussi, on sent la volonté de bien faire, de s’approcher au plus près du design de l’anime (il suffit de voir Baggy pour s’en convaincre) mais même avec la meilleure volonté, certaines choses semblent compliquées et me font dire que l’apparition de Chopper risque d’être un vrai casse-tête à moins de viser la qualité d’un Sonic ou Pikachu.

Il est également dommage que les combats ne côtoient jamais l’aspect épique de ceux de l’anime, l’affrontement contre Kuro, rapide, brutal et sanglant dans la série originale, s’avérant par exemple très quelconque en live. On ressentira aussi beaucoup moins la montée en puissance de Luffy et la maîtrise de ses pouvoirs pourtant centrale dans le manga d’Oda. Que dire également de certains choix hasardeux de casting (Shanks notamment) ou bien encore de la différence séparant les très riches plans d’ensemble en CGI et les décors beaucoup plus étriqués voire un peu fake par moments. Bref, il y a à boire et à manger dans cette première saison aussi étonnante que déroutante, aussi énergique que perfectible, et si le voyage ne fait que commencer (le producteur du show, Marty Adelstein, déclarait il y a peu qu’il espérait produire 12 saisons), on en vient déjà à se demander par quel miracle les producteurs vont bien pouvoir donner vie au reste de l’épopée, autrement plus ambitieuse et fantasmagorique.

Décalque de l’œuvre originale, One Piece remplit son contrat tout en souffrant de son besoin de brûler les étapes afin de faire avancer l’histoire pour dynamiser son récit ou bien encore de son incapacité à retranscrire la force et l’émotion inhérentes à l’anime. En résulte un entre deux intéressant, surprenant même, mais manquant d’âme et d’épique malgré la bonne humeur communicative de Iñaki Godoy (Luffy), l’énergie des comédiens et les moyens alloués au show.

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The Dark Pictures Anthology – House of Ashes : Un épisode qui prend la poussière

Avec le troisième épisode de son anthologie horrifique, Supermassive Games régurgite une nouvelle fois plusieurs classiques de l’horreur en installant son intrigue en Irak. Plus anxiogène, plus homogène également dans les lieux traversés, House of Ashes s’imprègne de The Descent, L’Exorciste et des Montagnes Hallucinées pour un récit se voulant plus rythmé grâce à son escouade de bidasses aux prises avec des entités maléfiques. Malheureusement, une fois de plus, le résultat s’avère des plus décevants en réussissant à ne satisfaire sur aucun des tableaux, jeu vidéo comme film interactif.

Grâce à des données obtenues par ses satellites, l’Armée américaine pense avoir localisé un dépôt souterrain abritant les armes du régime baasiste dans les montagnes de Zagros en Irak. Elle dépêche alors sur place une escouade de marines menée par le lieutenant-colonel Eric King, sa femme Rachel, agent de la CIA, le sergent Nick Kay, le premier lieutenant Jason Kolchek ainsi que le caporal Nathan Merwin. Après avoir investi les lieux et débuté une série d’interrogatoires, l’équipe tombe dans une embuscade dirigée par la Garde républicaine irakienne. En plein combat, le sol s’ouvre, précipitant les militaires dans des grottes souterraines aux abords d’un temple sumérien. Le cauchemar ne fait alors que commencer… Dans tous les sens du terme.

N’y allons pas par quatre chemins, House of Ashes rate peu ou prou tout ce qu’il entreprend en semblant constamment mettre à côté lorsqu’il veut faire peur, créer des connexions entre le joueur et les personnages ou en rendant hommage à plusieurs classiques de l’horreur. Pire, alors que les précédents volets pouvaient, dans une certaine mesure, tenir le joueur éveillé grâce à des histoires se déroulant dans différents lieux et/ou époques, ce volet s’enferme dans une longue, très longue escapade alternant tunnels et vastes salles en ruines jusqu’à un final se voulant Lovecraftien mais ne réussissant au final qu’à tomber dans une science-fiction jamais vraiment mise à profit pour connecter l’ancien et le contemporain. Navrant tout comme cette introduction se déroulant il y a 4000 ans en Mésopotamie et ne servant finalement à rien si ce n’est à présenter prestement (en vue subjective à la manière du Predator) les créatures qu’on affrontera par la suite ainsi qu’un esclave faussement important qu’on intégrera plus tard au récit de façon factice et inutile.

C’est d’ailleurs ce qui fait le plus défaut à cet opus : de bons personnages sur lesquels l’histoire aurait pu se reposer. Malheureusement, Supermassive Games nous montre une fois encore son incapacité à donner de la profondeur à ses acteurs virtuels. On devra à nouveau se contenter de personnages caricaturaux (l’escouade de marines clichée au possible aussi bien dans leurs looks que leurs personnalités) ou au contraire effacés à l’image d’une Rachel King au regard bovin et de Salim, membre de l’armée irakienne qui aurait sans doute pu tirer son épingle du jeu si son écriture avait été plus subtile. En effet, passé un court moment dans l’intimité de son foyer afin de mettre en avant sa relation avec son fils, les scénaristes ne développent jamais cette histoire en préférant se concentrer sur ses rapports avec les marines avec qui il devra s’allier (ou non) pour combattre une menace commune. Même son de cloches concernant le triangle amoureux Eric/Nick/Rachel, central (pour certaines versions de l’histoire) mais passablement inintéressant et ici aussi traité de manière très classique.

Bien entendu, à l’instar des précédents volets, il vous faudra plusieurs runs pour profiter des différentes fins du jeu ou débloquer l’ensemble des collectibles, cet aspect étant autant un atout (prolongeant la durée de vie) qu’un énorme défaut puisqu’accentuant l’aspect redondant de l’ensemble et le fait qu’on puisse passer à côté de certains éléments scénaristiques plus ou moins importants en ayant raté une QTE ou pris une mauvaise décision. Il conviendra également de faire l’aventure en anglais, la version française recelant quelques coquilles (doublage comme sous-titres) rendant certaines séquences involontairement drôles à l’image de celle où Rachel avoue à Rick qu’elle voit quelqu’un d’autre. De plus, entre un mixage audio rendant parfois certains dialogues inaudibles, quelques bugs (nous demandant de relancer le jeu) et un gameplay globalement pataud (avec cette impossibilité de courir ou l’obligation de montrer les escaliers à deux à l’heure), on aura bien du mal à rentrer pleinement dans l’histoire. D’autant plus vrai que cette dernière semble tout le temps griller ses cartouches en ne laissant jamais s’insinuer l’horreur ou le moindre doute sur ce qui va se dérouler quelques minutes plus tard.

La formule Supermassive Games semble donc de plus en plus prisonnière de ses errances techniques (animations rigides, effet uncanny valley toujours présent concernant plusieurs expressions, scènes de jour peu efficaces), de sa construction se reposant trop sur ses multiples fins ou bien encore d’une écriture n’arrivant jamais à réutiliser ses références pour alimenter son récit autrement qu’à travers des scènes reprises à l’identique ou des clins d’oeil un peu poussifs. Les développeurs anglais ont pourtant intégré quelques nouveautés (à l’image du récit de l’explorateur Randolph Hodgson sous forme de vidéos d’époque) pour dynamiser leur histoire, soigné quelques plans (grâce à de beaux effets de lumière) ainsi que leur creature design (sans pour autant toujours mettre dans le mille) mais ce n’est malheureusement pas suffisant pour offrir à cet House of Ashes un intérêt digne de ce nom.

Malgré un contexte plus anxiogène qui aurait pu donner quelque chose de vraiment effrayant entre de bonnes mains, House of Ashes s’avère être le plus mauvais épisode de l’anthologie. Ecrit en dépit du bon sens, affichant des personnages clichés au possible, souffrant d’un rythme arthritique synonyme d’exploration fastidieuse, cet opus enchaîne les séquences identiques d’un bout à l’autre de l’aventure, s’avère involontairement drôle à cause de dialogues tombant très souvent à plat ou d’un aspect uncanny valley et ne parvient pas à susciter de vrais moments de tension malgré ses illustres références, de The Descent aux Montagnes Hallucinées de Lovecraft. Un nouveau coup d’épée dans l’eau pour le studio anglais qui devra sérieusement se reprendre pour son Season Finale.

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Resident Evil Death Island : Bis repetita

Sept ans que Resident Evil n’avait pas profité d’un film en CGI. Non pas que nous l’attendions comte tenu de la semi déception qu’avait été Vendetta mais entre Bienvenue à Raccoon City désarmant de médiocrité et les tentatives ratées de séries (live comme animée), Death Island pouvait a minima constituer une petite friandise entre la sortie de deux jeux. Malheureusement, il n’en est rien puisque Capcom semble vouloir rester dans du Z de plus en plus marqué en ne se préoccupant même plus de la cohérence de ses scénarios ni même de ses personnages vedettes.

Optant à nouveau pour un scénario des plus convenus, Death Island opte stratégiquement pour une histoire en forme de réunion de famille regroupant l’ensemble du cast des jeux, de Leon S. Kennedy, à Chris Redfield en passant par Claire, Jill et Rebecca Chambers, déjà présente dans Vendetta bien que totalement sous-exploitée. En 2015, Leon est chargé de sauver un certain docteur Antonio Taylor fraîchement kidnappé. Le bellâtre ayant l’habitude de ce type d’opération depuis Resident Evil 4, il s’en accommode avant d’être attaqué par une mystérieuse femme. De son côté, Chris Redfield (travaillant toujours pour le BSAA) enquête sur une épidémie de zombies à San Francisco. Après enquête, il découvre que toutes les victimes ont étrangement visitées l’ancien pénitencier d’Alcatraz. Marchant dans les pas de Nicolas Cage, Chris se rend alors sur l’île avec les membres de son équipe.

A partir de cette base classique (se déroulant entre les événements de Resident Evil 6 et ceux de Vendetta), les scénaristes, en totale roue libre, versent dans le Bis le plus décomplexé, qu’il soit ou non volontaire. Si on passera sur la pauvreté des dialogues, il est en revanche navrant que le bad guy de cet opus, Dylan, soit aussi effacé tant dans son charisme que ses ambitions reposant sur des drones programmés pour infecter des populations ciblées. Rien de bien neuf sous le soleil californien. Du coup, comme on comprend rapidement que ce n’est pas du côté du scénario qu’il faut attendre quelque chose de Death Island, on se dit que le film va a minima nous offrir, comme ses prédécesseurs, une action soutenue voire un peu plus originale de par le lieu de son intrigue, Alcatraz. Malheureusement, ce n’est ni le cas dans un sens comme dans l’autre.

Dans l’absolu, le tout débute gentiment par une course-poursuite à moto, totalement surréaliste et nous rappelant à quel point Leon est un surhomme intouchable à qui tout est désormais permis. Alors que la mise en scène privilégie les chorégraphies s’affranchissant de la pesanteur pour mettre en avant des gunfights improbables sur une bretelle d’autoroute et la plastique avantageuse de Maria (personnage, soit dit en passant, totalement loupé dont les motivations s’avèrent aussi classiques que le plan de Dylan), le reste du film se montre beaucoup plus posé en donnant l’impression de ne jamais savoir comment utiliser son espace cloisonné, et a fortiori l’ensemble de ses héros n’ayant finalement pour seule légitimité que celle de nourrir un fan service essayant de boucher les trous béants laissés par le scénario. Cela se traduit par un manque total d’ambition à l’image d’une scène entre Leon et Claire face à des Lickers modifiés (une fois de plus) dans des égouts ou la sempiternelle apparition de zombies foutant un bordel parmi les touristes encore présents sur le Rocher.

Le constat est encore plus alarmant quand on le compare aux récents jeux essayant de diversifier leur bestiaire quitte à aller piocher dans le folklore fantastique. Certes, cela ne sied pas nécessairement à un film comme Death Island mais là où le bât blesse, c’est lorsqu’on nous fait miroiter le retour du requin Neptune ayant bien grandi depuis 1998, au point de faire jeu égal avec le squale de The Meg. On se prend alors à rêver à un face à face iconique, qui plus est contre la team originale réunie au grand complet (à l’exception de Barry), sauf qu’au final, il n’en sera rien, le requin servant simplement d’incubateur pour la transformation finale de Dylan synonyme d’une des créatures les plus hideuses (dans le mauvais sens du terme) jamais vues dans la saga et dont la base anatomique n’a que faire dudit Neptune. L’estocade finale serait-on tentés de dire et débouchant sur une ultime scène d’action découpée n’importe comment et abusant du slow motion pour mettre en avant les errances d’une mise en scène au rabais sabordant définitivement un film prenant l’eau de toute part.

Death Island aurait pu faire oublier les errances de Vendetta avec son casting 5 étoiles ou le lieu cloisonné de son action pour nous offrir quelque chose de plus anxiogène. Il n’en est rien, la médiocrité de l’ensemble (scénario, technique, réalisation) nous incitant presque à reconsidérer les qualités du précédent opus. Un film à vite oublier et à ranger aux côtés de l’exécrable série Infinite Darkness.

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Star Wars Jedi : Survivor – Une suite qui Cal

Deux ans après nous avoir agréablement surpris avec Fallen Order, Respawn Entertainement retourne dans une galaxie lointaine, très lointaine, pour nous narrer la suite des aventures de son Jedi qui a depuis pris de l’assurance tout en gagnant en Force. Séquelle calquée sur son modèle, Jedi Survivor n’entend pas révolutionner la formule établie, simplement l’améliorer, ce qui en soit n’est déjà pas une mince affaire.

D’apprenti Jedi, Cal Kestis est devenu un fier guerrier, plus conscient des enjeux gravitant autour de lui et toujours prêt à se battre pour aider les siens. C’est donc un héros plus affirmé qu’on retrouve dans Jedi Survivor, autant dans ses aptitudes (transparaissant dans le gameplay) que sa personnalité. Si le premier aspect reste central puisque nous accompagnant tout au long du jeu, le second l’est tout autant puisque moteur de notre progression. Malheureusement, sur ce point, il y avait sans doute mieux à faire pour casser un certain classicisme.

Bigger and better ?

La première chose qu’on remarque dans Star Wars Jedi : Survivor est sa volonté assumée de proposer davantage que son aîné et ce à tous les niveaux : plus d’options de customisation pour notre sabre (cette fois composé d’un nombre bien plus élevé de sections), BD-1, le look de Cal Kestis, plus de postures de combat, un aspect plates-formes bien plus soutenu et si on déplorera un nombre de planètes visitables en légère baisse (de sept, on passe à six avec deux dernières tenant plus de «simples décors» servant à l’épilogue), deux d’entre-elles profitent d’une construction semi-ouverte incitant à l’exploration. L’un dans l’autre, on pourrait n’y voir que du positif sauf que ce n’est pas nécessairement le cas.

Avant toute chose, les planètes de Survivor restent moins marquées (dans leurs biomes, leurs teintes) que celles de Fallen Order. Bien qu’on débute sur l’iconique Coruscant, on s’envolera par la suite vers des destinations ayant de la peine à tenir la comparaison avec Dathomir, Kashyyyk, Bogano ou Ilum. Pourtant, en parallèle de la quête principale qui nous fera voyager de l’une à l’autre, Respawn a intégré une dimension bien plus ouverte sur Koboh et Jedha. Il est important de s’attarder sur ce point puisqu’il synthétise à mon sens l’un des défauts du titre.

Ainsi, au delà de l’envie de s’accaparer un genre (l’open world) qui prend de plus en plus d’ampleur depuis plusieurs années, il faut aussi rappeler que quantité de titres se sont cassés les dents en bourrant leurs univers de pléthores d’activités, parfois jusqu’à l’écœurement, le joueur se retrouvant alors sous des monceaux d’objectifs annexes allant jusqu’à court-circuiter l’immersion ou du moins l’implication dans la quête principale. Jedi Survivor fait malheureusement partie de cette catégorie. Il est d’ailleurs intéressant de noter que lorsque le titre revient à une construction plus cloisonnée, plus proche de celle de Fallen Order, il n’en devient que meilleur. N’ayant pas réussi à rendre l’exploration gratifiante, la faute à des activités dénuées d’intérêt (trouver des graines à planter, des poissons pour l’aquarium du Pyloon Saloon, le bar de Greeze), Jedi Survivor finit par ennuyer, du moins si vous vous prenez au jeu du 100%. Il est donc dommage que les développeurs n’aient pas su rendre la visite des lieux plus excitante, le fait de devoir crapahuter en wall run pour obtenir un batch de couleurs pour BD1 n’étant pas des plus enthousiasmants.

Toutefois, je ferai preuve d’hypocrisie si je vous disais que je ne me suis pas amusé à changer les fringues de Cal, tout comme sa pilosité et sa coupe de cheveux afin d’avoir une sorte de Village People, coupe mulet, bacchantes proéminentes et pantalon de cowboy, mais ceci est une autre histoire. Malgré cela, je n’ai jamais vraiment éprouvé de réel plaisir à arpenter les deux planètes mentionnées plus avant et réclamant pas loin d’une dizaine d’heures simplement pour récolter l’ensemble des collectibles.

En un sens, Jedi Survivor n’avait nullement besoin de cela pour briller d’autant que cette envie de grandeur a sans doute fortement impacté le développement si l’on en croit les nombreux bugs et autres impairs techniques (textures s’affichant tardivement, QTE n’apparaissant pas ou fonctionnant mal, baisses de framerate…).

Cal nous fait sa Cerenade

Cette impression de flottement se retrouve également dans l’histoire qui, tout en se laissant suivre (grâce à quelques retournements de situation), ne surprend jamais vraiment, autant dans sa trame, ses thèmes ou même son fan service cochant toutes les cases. Certes, on aura droit à quelques passages virevoltants mais même du point de vue de la réalisation ou du rythme, Survivor se montre moins percutant que son aîné. Du côté du casting, le personnage de Dagan Gera (l’antagoniste principal) aurait sans doute mérité un traitement plus en profondeur tout comme les relations entre Cal et Merrin quelque peu survolées. Retrouver les anciens membres de Fallen Order (Greez, Cere) coulait de source mais encore aurait-il fallu les intégrer de manière plus efficace au récit.

Toutefois, on sent la volonté des scénaristes d’avoir voulu améliorer cet aspect, en créant une émulsion ne serait-ce qu’à travers les npc rencontrés qui viendront peupler le bar susmentionné (sorte de base d’opération sur Koboh) et avec qui on pourra obtenir de nouvelles missions annexes ou tout simplement bavarder pour en savoir un peu plus sur eux. On appréciera en sus certains personnages inédits à commencer par Bode Akuna, mercenaire roublard, dans la droite lignée de Han Solo, et formant un sympathique duo avec Cal. Peu original mais efficace. En saupoudrant également son titre de clins d’oeils au premier volet (l’apparition de la Neuvième Soeur, les mentions à Sorc Tormo, aux événements passés…) Respawn crédibilise son univers (canon, je le rappelle) en créant des ponts entre les deux œuvres tout en mettant en place les pièces d’une probable suite.

Dès lors, il est frustrant que l’histoire s’avère aussi classique, autant dans son dénouement que les sujets abordés : Cal face au côté Obscur, l’avenir des Jedi, etc. Néanmoins, on appréciera que les développeurs ne se soient pas trop pris au sérieux, en témoignent quelques passages savoureux (la charge héroïque d’un Trooper lambda sous forme de combat de boss) et plusieurs dialogues. Je vous incite d’ailleurs vivement à laisser ceux entre les droïdes de combat B1, toujours promptes à philosopher sur leur situation à travers des échanges véritablement exquis.

Un jeu Greezant

A ce stade, on pourrait penser que Jedi Survivor semble moins bon que Fallen Order. Si je lui préfère effectivement le premier volet (grâce à son effet de surprise et sa construction mieux maîtrisée), ce ressenti variera bien entendu en fonction de vos attentes car il va de soi que cette suite améliore de nombreuses choses et en ajoute de nouvelles.

Comme je le précisais plus avant, le titre regorge d’activités et si la plupart sont sans grand intérêt, on éprouvera toujours du plaisir à terminer les Failles (synonymes de défis Combat ou Parkour), résoudre les puzzles des Temples Jedi, à se détendre autour d’une partie d’Holotactique (mini jeu basé sur les scans des ennemis qu’on pourra ensuite réutiliser pour affronter plusieurs résidents du Pyloon Saloon) ou à rechercher les adversaires légendaires. Certes, il s’agira ici de simplement combattre des ennemis déjà rencontrés dans une version plus puissante mais on éprouvera un réel sentiment d’accomplissement puisque tournant autour d’un gameplay toujours aussi bien rodé et jouissif.

Avec ses multiples postures (sabre simple, double lame, pistolet/sabre…) et ses nombreux arbres de compétences associés, combattre devient encore plus délectable même si on souffrira toujours dans les séquences à 1 Vs 10 à cause d’un système de fight davantage pensé pour des duels. Pour autant, en utilisant à bon escient nos capacités (et accessoirement la Force) tout comme la possibilité de combattre par moments avec Merrin ou Bode, on s’en sortira avec panache et classe au point d’en redemander toujours plus malgré une difficulté plutôt corsée dès le mode Normal.

On aura donc beau pester contre cette carte plus lisible mais manquant encore de souplesse, on aura beau être agacés par quelques phases de Parkour (bien plus présentes et améliorées au point d’ancrer le titre dans le genre action/plates-formes), on aura beau souffler contre ces bugs, on y reviendra encore et encore avec une vraie satisfaction, celle de nous offrir la possibilité de vraiment ressentir la puissance d’un Jedi, celle d’avoir affaire à un jeu transpirant l’esprit Star Wars.

Ayant à cœur de (trop) bien faire, Respawn s’est quelque peu perdu en chemin en ayant les yeux plus gros que le ventre. Trop vaste pour ce qu’il a à raconter et même à proposer, Jedi Survivor doit composer avec une histoire et un intérêt s’étiolant à mesure que le temps passe sans pour autant remettre en question l’excellent feeling du gameplay une fois le sabre en mains. En axant cette suite autour de son Parkour, en accentuant l’aspect plates-formes du jeu tout en proposant davantage d’options de customisation ou de styles de combats, cette suite réussit malgré tout à retenir le joueur dont la passion pour la franchise gommera, ou du moins minimisera, les écueils évoqués dans ces lignes.

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Blood & Gold / Sisu : La Ruée vers l’or

L’Or des nazis semble attirer les convoitises puisque deux films ont récemment traité ce sujet, autrement dit Blood & Gold (Netflix) et Sisu sorti il y a quelques jours sur nos écrans de cinéma. Très fortement inspirés par l’oeuvre de Quentin Tarantino, les deux oeuvres se revendiquent ouvertement de l’influence Grindhouse et Inglourious Basterds en offrant un spectacle gore, primaire et résolument jouissif.

Blood & Gold : L’élève trop sage

Blood & Gold, réalisé par Peter Thorwarth (Blood Red Sky), pose son action à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, en 1945. Un déserteur de l’armée allemande à la recherche de sa fille, Heinrich, va en chemin rencontrer Elsa, une jeune femme vivant avec son frère dans une ferme non loin d’un village recelant une cargaison d’or convoitée par les SS. Se prêtant mains fortes, Henrich, Elsa et les villageois vont se dresser contre les nazis bien décidés à récupérer l’or par tous les moyens.

Bien que l’histoire de Stefan Barth (scénariste de plusieurs épisodes de Le Clown et Alerte Cobra) tente d’apporter un minimum de contexte, parfois sous couvert d’humour, en offrant un peu de profondeur aux personnages, c’est malheureusement l’inverse qui se produit. En effet, si l’idée pouvait avoir du sens sur le papier, elle ne fait que parasiter une progression qui ne lâche jamais complètement la bride d’autant qu’elle ne peut compter sur des dialogues ciselés à l’inverse des œuvres de Tarantino. En résulte un film très sage, aux antipodes d’un Overlord ou Iron Sky, et qu’on aurait aimé plus virulent.

Dans Blood & Gold, tout est carré, classique, trop sans doute. L’intrigue s’empêtre dans son besoin de raconter quelque chose et ceci minimise grandement l’aspect fun de l’ensemble. D’autant plus dommageable que les personnages ne profitent pas d’un développement suffisant pour qu’on s’attache vraiment à eux. On aurait alors pu s’attendre à une critique du régime nazi à travers une réjouissante satire mais ici aussi, cet aspect s’avère très léger puisque cantonné à quelques dialogues (notamment en rapport au frère handicapé d’Elsa) ou aux exactions des nazis pillant les villages à l’orée de la fin de la guerre. Frustrant donc même si d’un point de vue formel, Peter Thorwarth soigne ses cadrages. On retiendra cependant une photo très homogène, assez fade, et des scènes d’action filmées en grand angle, lisibles mais timorées malgré quelques idées et plans bien gores.

En résulte un film n’allant jamais vraiment au bout des choses, autant dans son action que sa galerie de personnages. Certes, l’esprit Grindhouse est bien là, le tout évite de se prendre trop au sérieux, l’idée de miser sur un duo homme/femme est intéressant (d’autant que Marie Hacke s’avère très convaincante dès lors qu’elle vire badass) mais alors qu’on aurait pu s’attendre à un coup de poing, c’est davantage une gifle à laquelle nous avons le droit.

Sisu : De L’Or et du Sang – Un film à trois francs Sisu ?

Le postulat de départ de Sisu est peu ou prou le même de celui de Blood & Gold. A l’automne 1944, le dénommé Aatami découvre de l’or au fin fond de la Laponie. Après avoir récupéré l’ensemble du gisement, il décide d’aller le mettre en sécurité dans une banque, en ville. Flanqué de son fidèle toutou, il va croiser en chemin une bande de nazis avec qui il va devoir en découdre.

A la différence de Blood & Gold, Sisu embrasse davantage son concept bas de plafond, aussi bien dans sa progression, longitudinale et fluide, que dans son aspect gore. Il est d’ailleurs amusant de constater que dans les deux cas, des membres volent mais là où le tout reste «Grand public» dans Blood & Gold, le film de Jalmari Helander (les réjouissants Père Noël Origines et Big Game) y va franco en déversant des gerbes de sang par litrons. Cet aspect offre un aspect jubilatoire au film déroulant assez rapidement des moments de pure action mus par un Aatami revenant à la charge, tel un Terminator, après avoir été brûlé, pendu, noyé.

A partir de là, les soldats explosent, se font égorger, rouler dessus, le body count grimpe en flèche et le film se limite alors à sa fonction première : divertir en expurgeant son intrigue de tout rajout inutile, de toute intrigue parasite. Dans la grande tradition des John Wick (auquel il emprunte sa simplicité, son action viscérale…et son toutou) et autres Nobody, Sisu se nourrit de cette action débridée, primaire, afin d’installer un récit dont le manichéisme légitime toute cette débauche de violence graphique. Le film n’entend pas véritablement raconter quelque chose, encore moins moins donner des leçons de morale (c’est même tout le contraire), et préfère s’engouffrer dans une vendetta contre cette escouade de SS.

Ainsi, bien que le film ne profite pas, à l’instar de Blood & Gold, de la qualité d’écriture d’un Tarantino, il s’imprègne pourtant de la même radicalité, de sa narration sous forme de chapitres tout en intégrant des personnages charismatiques dont le héros de notre histoire incarné par Jorma Tommila campant un ancien héros de guerre au lourd passé et devenu depuis une légende. Le parallèle avec John Wick est ici encore plus fort et sert donc le propos d’autant que l’acteur finlandais s’avère parfait dans le rôle en se tenant toujours à la frontière du caricatural sans jamais tomber dedans. Et c’est en ça que Sisu s’avère jubilatoire. Ne déviant jamais de son concept régressif au possible, le long-métrage de Helander fonce tête baissée durant 1h30 et nous entraîne dans un maelström d’action bourrine en assumant totalement son concept. On pourra lui reprocher son manque d’originalité mais pour qui a été biberonné aux séries B, l’invitation est difficile à refuser.

Mélange entre la série B, le western et les films de Quentin Tarantino, Blood & Gold et Sisu s’imprègnent des mêmes codes afin d’orchestrer un savoureux jeu de massacre entre nazis et héros revanchard, indestructible et prêt à tout pour récupérer son bien. Si on devait en choisir un, j’opterai plutôt pour Sisu, aussi classique que Blood & Gold mais étant bien plus généreux, autant dans son action débridée que son aspect gore et profitant par ailleurs du charisme de Jorma Tommila.

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Ted Lasso S03 – All you need is love ?

A travers ses deux premières saisons, Ted Lasso aura fait profiter ses proches de son écoute attentive et ses conseils avisés. En travaillant sur ses propres problèmes tout en motivant l’équipe fictive de l’AFC Richmond afin qu’elle atteigne les sommets de la Premier League, notre expatrié aura oeuvré sur les terrains et en dehors pour le bien de tous. Chantre du « Good Feeling », on imaginait Ted négocier cette troisième saison en suivant les mêmes préceptes mais pas nécessairement en prenant du recul pour laisser plus de place à son entourage qui aura composé son quotidien durant trois années. Une façon plutôt « originale » offrant à cette saison quelques-uns des meilleurs épisodes du show d’Apple TV +.

L’AFC Richmond parviendra à terminer premier du classement ? Ted guérira-t-il de ses crises d’angoisse ? Roy se remettra-t-il avec Keeley ? Des arcs narratifs, la Saison 03 de Ted Lasso n’en manque pas et se doit donc de les clore en l’espace de 12 épisodes un peu plus longs qu’à l’accoutumée. Alors que la Saison 02 avait amené quelques pistes intéressantes, à commencer par Nate promu entraîneur du club de Manchester tenu par Rupert Mannion, la série prônait toujours cette «positive attitude» en s’appuyant notamment sur un humour délectable construit autour de sa galerie de personnages.

Logique donc que chacun d’entre eux progresse sentimentalement afin de les amener vers une conclusion satisfaisante en fin de saison. Ceux possédant l’évolution la plus intéressante sont sans doute Jamie et Nate. Le premier passera ainsi de joueur prétentieux dans la S01 à une personne beaucoup plus à l’écoute des autres dans la S03 épaulé par le bougon Roy en qui il trouvera un coach personnel ainsi qu’un ami. Doutant de ses propres capacités, il ira même jusqu’à se réfugier dans les bras de sa mère pour trouver du réconfort lors d’un très bel épisode. Nate de son côté, malgré sa réussite fulgurante comme entraineur au sein de Manchester, ne pourra longtemps cacher un véritable manque affectif et essaiera de trouver un palliatif chez ses « collègues » puis chez Jade en qui il trouvera une oreille attentive et bien plus encore.

Si ces deux personnages ont bénéficié d’un soin particulier, Rebecca n’a pas eu droit au même traitement. Sortie d’une amourette à Amsterdam qui trouvera une conclusion expédiée en fin de saison, la sémillante propriétaire de l’AFC Richmond survolera cette saison jusqu’à un face à face réussi avec Rupert mais ici aussi traité prestement. Keely de son côté aura un peu plus de chance en s’affirmant de plus en plus comme une femme indépendante, autant dans ses choix professionnels que personnels mais malgré cette évolution intéressante, on regrettera son manque d’interactions avec le reste de l’équipe à commencer par Roy et Jamie. Tout en ne prenant pas toujours le temps de développer certains personnages principaux, les scénaristes en ont tout de même intégré un nouveau du nom de Zava (Maximilian Osinski), sorte de Zlatan Ibrahimovic oscillant entre la super star du ballon rond et le gourou spirituel. Si le personnage n’apparaît que le temps de quelques épisodes, il apportera néanmoins une sorte d’aura qui cimentera encore plus le groupe afin de le préparer aux matchs qui les attendent.

Sans véritable développement, le personnage de Zava n’en reste pas moins bien intégré dans le show, le but (dans tous les sens du terme) étant au final de créer une nouvelle alchimie entre les joueurs et de les pousser eux même à se dépasser ou à sortir de leur coquille. Le développement de Colin ira d’ailleurs dans ce sens, épaulé par Trent Crimm (passant de journaliste acerbe à biographe de l’AFC Richmond) avec qui il gagnera en complicité.

Dans sa globalité, la S03 de Ted Lasso n’oubliera quasiment personne en chemin en offrant à la plupart des membres de l’équipe son petit moment à l’image de la petite parenthèse nocturne avec Higgins et Will. Dans un sens, on pourra prétexter que la série semble tourner en rond, les histoires se faisant et se défaisant au grès des saisons, mais les conseils et l’empathie de Ted ravivant la flamme de la passion, sur le terrain et en dehors, cette bonne humeur communicative finira toujours par l’emporter même si on pourra reprocher une fin trop artificielle synonyme d’accroche de wagons un peu forcée.

A côté de ça, difficile de ne pas louer la qualité d’écriture globale du show, que ce soit dans son humour, subtile et délicieusement à propos, ou bien encore lorsqu’elle aborde certaines thématiques ou la sexualité de ses personnages. Au final, on fera fie de ses menus défauts pour principalement retenir de Ted Lasso ses immenses qualités et ce que chaque épisode nous aura apporté : de la bonne humeur, des rires et quelques larmes en laissant partir toute cette joyeuse bande qui aura égayé notre quotidien trois années durant.

Sans toujours prendre le temps de s’attarder convenablement sur l’histoire de tous ses protagonistes, la S03 de Ted Lasso n’en reste pas moins drôle, émouvante et très souvent juste dans son écriture. Si on aurait aimé que Rebecca profite d’un meilleur traitement ou que la fin n’essaie pas de rattacher tous les wagons quitte à jouer la carte de la facilité, cette ultime saison clôt l’histoire de Ted sur une touche d’humilité tout en prônant plus que jamais l’optimisme. Nous n’en attendions pas moins.

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Horizon Forbidden West : Burning Shores – Aloy se starifie

Alors que le premier Horizon s’était aventuré dans des contrées gelées avec son DLC The Frozen Wilds, Forbidden West opte de son côté pour la chaleur de la Californie en déplaçant son action de San Francisco à Los Angeles. Une fois de plus, Aloy aura fort à faire dans la Cité des Anges même si on ne se fera pas prier pour jouer les touristes.

Tout exceptionnel que soit Burning Shores, il met paradoxalement en avant l’un des principaux problèmes de la licence Horizon, autrement dit son incapacité à proposer un scénario solide, prenant et original. Étonnant, mais démontrant à quel point les scénaristes de Guerrilla Games sont parvenus à créer un univers foisonnant (existant principalement à travers des centaines de logs écrits et audio) sans pour autant réussir à le faire véritablement exister à travers ses personnages et l’aventure d’Aloy. Burning Shores n’échappe pas à la règle et s’il est passionnant de parcourir la nouvelle aire de jeu mise à disposition, son histoire est aussi clichée que magnifiquement mise en scène.

C’est l’histoire d’un mec…

Ce contenu s’articule donc autour du dénommé Walter Londra qu’Aloy va devoir retrouver. Ce dernier, ancien Zenith, va très vite révéler ses motivations qui ne sont pas aussi vertueuses que sa propagande sectaire veut bien le faire croire. Comme précisé plus haut, la progression de ce DLC est des plus plaisantes car, elle propose, à l’image de Forbidden West, une gigantesque map regorgeant de somptueux panoramas, d’endroits iconiques et de lieux à la gloire de Londra et de sa mégalomanie. On retiendra à ce sujet une visite des plus délectables dans une sorte de musée dédié à ce bon Walter où gigantesques posters et projections de talk-show interactifs avec notre star ne font que mettre en avant le melon du bonhomme. Si la découverte du culte de Londra passera donc par de savoureux moments, ils ne feront que mettre l’accent sur le peu d’originalité de son plan dont on vous laisse toutefois le plaisir de la découverte.

C’est l’histoire d’une meuf…

Cependant, comme disait Robert Louis Stevenson, «L’important, ce n’est n’est pas la destination, mais le voyage». Ce concept, Burning Shores, à l’image de Zero Dawn et Forbidden West, l’embrasse du début à la fin en permettant à Aloy de vivre ledit voyage avec l’énergique Seyka. Cette Quen est sans doute le plus bel apport de ce contenu qui pourtant n’en manque pas. Disposant d’un caractère enjoué, vive, toujours prompte à asticoter Aloy, elle forme le duo parfait avec notre rousse préférée, aussi bien durant les phases de gameplay que d’un point de vue scénaristique. Ainsi, Seyka sera notre guide durant les premières heures de jeu en nous décrivant le contexte mais aussi et surtout son histoire trouvant écho dans celle d’Aloy. Les dialogues sont intelligents, la personnalité de Seyka en fait quelqu’un de très attachant et c’est un régal de suivre ce duo dans l’exploration de la région mais aussi et surtout celle des sentiments des deux jeunes femmes. Notons malheureusement qu’après The Last of Us : Part II, c’est Burning Shores qui a fait les frais de la morale bien-pensante de certains idiots estimant qu’une histoire d’amour entre les deux héroïnes n’avait pas lieu d’être. Un constat aussi désespérant que la vision étriquée de personnes allant jusquà review bomber le contenu pour de mauvaises raisons.

Hollywood nous ouvre ses portes

D’ailleurs, au-delà de sa famélique trame scénaristique, Burning Shores a-t-il de vrais défauts ? Oui et non. Oui dans le sens où on retrouve bien entendu certains défauts de Forbidden West à l’image de ce loot omniprésent et donc très intrusif et non, car le studio néerlandais s’est évertué à peaufiner chaque aspect du contenu pour satisfaire les joueurs. Certes, on aurait pu s’attendre à davantage de nouvelles créatures (sur les 4 nouvelles, le Batracide et l’Horus étant finalement les deux seules véritables nouvelles machines intéressantes), mais ceci est contrebalancé par plusieurs ajouts de gameplay ainsi qu’une nouvelle arme énergétique qui sera d’ailleurs mise à profit dans la dernière ligne droite du DLC.

Bien sûr, vous pourrez ajouter plusieurs quêtes inédites (5 principales et 3 secondaires) dans la veine de celles de Forbidden West, 18 nouvelles compétences ainsi que divers équipements (armures, types d’arcs), mais c’est surtout la visite de Los Angeles et ses environs qui finiront de vous envoûter. Que ce soit sur terre, dans les airs ou en mer (grâce à un nouveau moyen de locomotion et la capacité de l’Aile-d’hydros à plonger), l’enchantement sera constant. Chaque lieu a bénéficié d’un soin tout particulier dans cette représentation post-apo, elle aussi assez classique (végétation luxuriante, épaves de véhicules, buildings en ruines…) mais offrant des plans magnifiques (le panneau Hollywood) et des endroits fabuleux à découvrir comme ce musée, sorte de mixe entre celui du flash-back de The Last of Us : Part II (tiens, tiens) et le Jurassic Park de Michael Crichton.

Enchaînant les idées plus belles les unes que les autres, cette visite a également le mérite de raccrocher, d’une certaine façon, les wagons entre le monde d’avant et sa représentation cybernétique au cœur de la licence. Un moment magique, suspendu dans le temps avant que celui-ci ne s’accélère à travers d’innombrables combats contre humains, machines et l’Horus mentionné quelques lignes plus haut, autrement dit une gigantesque machine de guerre, malheureusement spoilée dans le launch trailer, mais légitimant à elle seule l’achat de Burning Shores afin de profiter de l’un des combats de boss les plus impressionnants jamais vus. Autant dans son approche démesurée que dans l’usage de toutes les facettes du gameplay d’Horizon, cet affrontement est un incroyable morceau de bravoure, intelligemment mené de bout en bout en plus d’être à la hauteur de ce que nous font miroiter les développeurs dès le départ. C’est donc le sourire aux lèvres qu’on quittera Aloy en imaginant d’ores et déjà la suite de ses aventures dans le prolongement de cette extension plus inspirée visuellement que scénaristiquement, mais préfigurant sans doute l’un des futurs possibles de la saga.

Généreux au possible, Burning Shores fait montre d’une maîtrise artistique totale lorsqu’il s’agit de représenter ce Los Angeles post-apo fief de panoramas magnifiques, mais aussi de fantastiques intérieurs réussissant habilement à mélanger passé, présent et futur. Si on pourra une fois encore être déçu par le manque d’originalité du scénario et des motivations de l’antagoniste principal, la présence de Seyka (l’un des meilleurs personnages vus dans la franchise), les divers ajouts de gameplay ou bien encore un combat de boss hallucinant devraient vous convaincre de la qualité indéniable de ce DLC.