Après quatre films, il est temps pour les Warren de plier bagages. Si le Conjuringverse n’est pas prêt de se refermer pour autant (moult séquelles et une série TV sont à l’étude), le célèbre couple de chasseurs de démons tire ici sa révérence avec le cas le plus terrifiant qu’ils aient jamais connu. C’est du moins ce que suggère le carton introductif car dans les faits, ce sont plutôt quelques sursauts qui attendent les spectateurs rompus à la franchise.
Réalisé par Michael Chaves (le médiocre Conjuring : Sous L’Emprise du Mal, le peu recommandable La Nonne 2), Conjuring : L’Heure Du Jugement revient sur l’impact de ces innombrables enquêtes paranormales au sein de la cellule familiale. L’introduction est le moyen de revenir sur le tout premier cas des Warren alors que Lauren s’apprête à accoucher. Le parallèle entre le quotidien du couple et la naissance de l’enfant prend ici une autre dimension, en confrontant le malin (les forces maléfiques qu’ils affrontent pour leur travail) au divin (le fait de donner la vie). Les deux étant intimement liés, la mort du nourrisson suivie de sa «résurrection» résonne encore plus comme un signe. Outre le fait de poser les bases d’une histoire davantage centrée sur la foi (en sa famille, son travail), le scénario permet dès le départ de mettre Judy et son boyfriend au centre du récit. L’idée a du sens (d’autant plus qu’on peut voir dans cet opus une sorte de passage de flambeau) mais se retrouve malheureusement asphyxiée par un scénario hésitant souvent entre son envie d’intime et d’effroi.
En résulte dans la construction un film très similaire à Sous l’Emprise du Mal, autant dans ses qualités que ses défauts. Oui, le tout est joliment emballé par Chaves mais le film échoue la plupart du temps à créer l’effroi à cause de subterfuges usés jusqu’à la corde ou d’amples mouvements de caméra minimisant l’aspect anxiogène. Le réal s’évertue une fois encore à reproduire la formule à travers les mêmes figures horrifiques. Ici le visage blanchâtre d’une femme renvoyant à celui de La Nonne, là, l’utilisation totalement gratuite d’Annabelle dans une « version » renvoyant au Crooked Man de Conjuring 2. L’heure du Jugement paraît usé ou du moins ne semble jamais vouloir trifouiller dans sa mythologie pour en sortir une quelconque originalité. Ce ressenti est accentué par le fait qu’une fois de plus, l’ensemble tourne autour d’une prétendue histoire vraie (l’un des fameux cas Warren) mettant en scène une énième famille aux prises avec un démon cette fois prisonnier d’un miroir, celui-là même qu’avait affronté Ed et Lorraine au début de leur carrière de démonologues.
Et c’est que le bât blesse car en voulant rattacher le cas aux Warren, le film n’arrive jamais à trouver un équilibre entre son envie de rentrer dans l’intimité du couple et de leur fille et le besoin de présenter les membres de la famille Smurl qui n’ont jamais suffisamment de place pour exister par eux-mêmes. De fait, l’empathie est faible et la famille devient un simple cas de plus à résoudre dans la longue liste du couple vedette. Même son de cloches pour le démon n’ayant pas véritablement de présence bien définie si ce n’est à travers ledit miroir qui donne à cette histoire un aspect «Kingesque» n’allant pas nécessairement avec l’ADN de la franchise.
L’Heure du Jugement tâtonne alors dans le ton à employer. Traits d’humour entre le père et son futur gendre, jump scares peu efficaces puisque s’appuyant souvent sur les mêmes mécaniques (silences, obscurité, lent travelling), message sur la foi manquant de subtilité, le mélange peine à convaincre dans un sens comme dans l’autre. Le frisson est rarement au rendez-vous, l’histoire entre Judy et Tony ne fonctionne pas comme elle le devrait et le tout s’étire péniblement sur plus de 2h15 jusqu’à un final quelque peu poussif. Problématique dans le sens où ce film est censé être le dernier bien que Judy et Tony soient destinés à prendre la relève. C’est du moins ce que suggère le film, à travers la scène où Ed offre les clés de la «réserve» à Tony et par extension celle de la franchise.
On sent que les producteurs ne comptent pas en rester là, quand bien même ils rappelleraient à demi mots lors du générique de fin qu’ils ont mis pendant des années sur un piédestal deux démonologues qualifiés par beaucoup de charlatans. Mais qu’à cela ne tienne, l’annonce récente de La Malédiction de la Dame Blanche 2 témoigne du besoin de James Wan et de Warner Bors de remettre le couvert pour capitaliser sur un Conjuringverse répondant rarement aux attentes mais pourtant toujours aussi rentable. C’est peut-être ça l’ultime frisson.
Conclusion
Dans la droite lignée de Sous L’Emprise du Mal, Conjuring : L’Heure Du Jugement se perd dans son envie d’approfondir le lore de la franchise, les relations entre Ed, Lorraine et leur fille tout en présentant la famille au centre du drame. En résulte un film jamais effrayant et n’arrivant pas à caractériser les victimes et le démon. Un comble.
Marvel Zombies reste à part parmi les nombreux comics proposés par La Maison des Idées. Construite autour d’un postulat complètement barré et d’une ambiance transgressive qu’on avait rarement (jamais) vu chez l’éditeur, cette série est restée dans les mémoires pour son scénario haut perché et certaines planches particulièrement marquantes. Sans surprise, la série de Disney+ tire un trait sur tout ceci et nous propose en lieu et place un show formaté avant tout pensé pour les fans du MCU.
Si on savait déjà que Marvel avait pour habitude de ne pas adapter à la virgule près la plupart des comics porté sur grand écran, Marvel Zombies est un cas très intéressant dans le sens où elle choisit ouvertement de ne rien garder (ou presque) des comics d’origine en faisant de cette mini-série de 4 épisodes une sorte de suite au déjà très médiocre épisode 5 de la S01 de What If…. Adapter est toutefois un bien grand mot tant le tout témoigne d’une absence totale de prise de risques en faisant de ces récits empreints de déviance nécrophile une série à l’exact opposé où chaque croc de zombie, chaque membre tranché est contrebalancé par une petite touche d’humour ou une blague dans la veine de ce que le MCU nous sert de plus lourdingue depuis plusieurs années.
Il faut dire qu’on aurait pu s’en douter en voyant l’équipe de base constituée de Kate Bishop (Hawkeye), Riri Williams (Ironheart) et Kamala Khan (Miss Marvel), bientôt rejointes par Red Guardian ou bien encore Shang-Chi. Une sorte de Young Avengers avant l’heure qui vont devoir partir dans l’espace pour utiliser un transmetteur afin de contacter la Nova Corp, à même de régler la situation sur Terre, exsangue depuis que les zombies l’ont ravagé. Cette quête ambitieuse s’inscrit donc dans la continuité de ce que le MCU a de plus identifiable et sans surprises, les scénaristes se sont sentis obligés d’y intégrer toutes les figures tutélaires, de Iron Man à Wanda Maximoff en passant par Thor, Ant-Man et Spider-Man, en les faisant parfois passer du mauvais côté de la barrière aidées par plusieurs antagonistes, du Baron Zemo à L’Abomination en pasant par Namor . Bien entendu, l’inévitable Thanos, dont Marvel ne semble pas vouloir faire le deuil, est lui aussi de la partie, histoire d’assurer l’aspect cosmique de la situation intégrant une fois de plus les gemmes de l’infini.
Si en soi, les 4 épisodes ne sont pas avares en action et qu’on suivra distraitement le déroulé de l’intrigue remettant sur le devant de la scène le Blade de Wesley Snipes (l’une des meilleures idées de cette mini-série), Marvel Zombies n’est jamais qu’une esquisse très lointaine de l’original. N’espérez donc pas voir ici un Peter Parker boulotant Tante May ou un Captain America affamé se jetant avec avidité sur les membres de ses anciens alliés. Certes, on y retrouve les versions zombifiées de multiples personnages mais ceci n’est jamais véritablement auréolé de gore bien juteux. Dans Marvel Zombies version Disney+, seuls quelques corps sont tranchés, proprement et toujours sous couvert d’un esprit aventureux, presque bon enfant, ou d’un humour terriblement routinier. Le plus ennuyant est que ce parti pris dessert parfois l’histoire en confrontant certains personnages à la perte d’êtres chers qui les font sombrer dans le désespoir puis en les faisant festoyer dix minutes plus tard lors d’un banquet nordique.
L’écriture ne s’embarrasse donc jamais d’une vraie cohérence (il en était de même dans les comics qui, cependant, embrassaient totalement la folie du contexte initial), le plus important étant d’enchaîner un name-dropping super-héroïque et les scènes d’action, ambitieuses sur le papier mais minimisées par une animation bas de gamme en provenance directe de celle des What if… Tout ça pour ça serait-on tenté de dire et si il n’y avait guère d’espoir sur la direction prise rien qu’à l’annonce du projet, Marvel choisit une fois encore de tirer un trait sur les meilleures idées du matériau original pour s’adresser uniquement aux spectateurs du MCU qui n’auront qu’une histoire prémâchée, aussi redondante que peu intéressante, à se mettre sous la dent. Je suppose que certains s’en contenteront.
Conclusion
Marvel Zombies est un gigantesque pied de nez aux amateurs du comic book original en ne reprenant à aucun moment son aspect transgressif et ses joyeux débordements gores et nécrophiles. A la place, la série de Disney+ choisit uniquement de s’adresser aux fans du MCU en leur servant une histoire prémâchée dans la continuité de l’épisode 5 de la S01 de What If… saupoudrée de scènes d’action avec les personnages vus et revus dans les films. Il y avait meilleur moyen de rendre hommage à des comics aussi cultes.
Pour la toute première série se déroulant dans l’univers d’Alien, le showrunner Noah Hawley (l’excellente série Fargo) décide de situer l’action sur Terre. Idée intéressante d’autant qu’on entrapercevait la planète à la toute fin d’Alien : Resurrection. Avec ce parti-pris, on pouvait donc attendre de la nouveauté et au final, c’est bien ce qu’apporte cette première saison même si elle reste relativement timide dans le développement de certains de ses thèmes.
L’idée de développer une intrigue sur Terre dans l’univers d’Alien n’est pas nouvelle. Dès la fin des années 90, plusieurs comics Aliens y développent des histoires en axant davantage leurs propos sur la cupidité des mégalopoles et celles des humains, businessmen comme militaires, plutôt que sur les Xenomorphes, ce que feront d’autres comics, notamment le très bon Aliens : Genocide. Cet aspect, présent dans Aliens à travers le personnage de Burke, prend une toute autre ampleur dans Alien : Earth centrée autour de deux des cinq méga corporations dirigeant la Terre, autrement dit Prodigy et Weyland-Yutani, bien connu des fans. Un point de départ parfait pour Hawley qui lui permet de créer plutôt de copier ce qui a déjà été fait bien qu’on n’échappe pas à certains moments immuables (le dîner de l’équipage, l’apparition du chestburster, le synthétique déviant…). Cependant, autant dans le fond que la forme (décors plus ouverts et lumineux, musique rock, personnages inédits), Alien : Earth offre un sacré vent de fraicheur à la licence.
Débutant par le crash d’un vaisseau de la compagnie sur le territoire de Prodigy, cette dernière va tout mettre en œuvre pour récupérer la précieuse cargaison constituée de cinq races alien (dont les Xenomorphes) récupérées par l’équipage après un voyage de plus de 60 ans. Une course va alors s’engager entre les deux puissances, l’une souhaitant récupérer son dû pendant que l’autre entend mener diverses expériences afin de mieux connaître ces créatures venant de planètes reculées. D’ailleurs, si la série entreprend à mi-parcours un retour dans le temps pour revenir sur les événements antérieurs à ceux du premier épisode, plusieurs questions restent en suspens à la fin de cette S01. Bien qu’il nous tarde de voir comment le show va raccorder les éléments avec le premier film se déroulant après (les événements de Prometheus et Covenant ayant été poliment écartés), l’intérêt se situe ailleurs. En effet, bien que les aliens occupent une place importante dans l’intrigue (ils restent l’objet convoité par tous), le plus important dans Alien : Earth reste ceux qui gravitent autour, qu’ils soient humains, synthétiques, hybrides ou cyborgs. Noah Hawley s’intéresse à la nature de chacun, avec ce que ça implique de traitrise, d’ambition ou tout simplement de choix.
Alien : Earth est une série mettant en scène un grand nombre de personnages et sur ce point, chaque individu a sa place à jouer même si le scénario délaisse en chemin certains d’entre eux, à l’instar de Smee, rapidement réduit à sa condition d’enfant prisonnier d’un corps d’adulte, évoluant plus lentement que les autres et donc sujet à des réactions de son âge, autant dans sa gestuelle que son caractère. Ceci le rend forcément moins intéressant que ses comparses, tout comme Isaac et Slightly qui aura pourtant un rôle à jouer arrivé à la moitié de saison. Il faut d’ailleurs noter que la série prend son temps pour poser le contexte politique et économique ou de façon plus globale, les vrais enjeux scénaristiques, les événements ne commençant véritablement à s’emballer qu’à partir de l’épisode 4. Est-ce un mal ? Oui et non puisque le premier tiers de la série semble faire un peu de surplace en naviguant entre l’attente de certains fans et l’envie de raconter autre chose. On trouvera plus son compte dans cette dernière approche densifiant le lore et plus efficace lorsqu’il s’agit de mettre en avant les races extraterrestres inconnues jusqu’alors.
Ce postulat est la colonne vertébrale d’Alien : Earth qui construit pièce après pièce une histoire centrée sur l’humain et les expérimentations scientifiques en confrontant les desseins de chaque groupe d’individus. Si Boy Kavalier semble principalement intéressé par le besoin de trouver quelqu’un aussi intelligent que lui (humain comme alien) afin de se sentir vivant, chaque enfant devra se confronter à un monde d’adultes en essayant de comprendre ce qu’ils sont devenus. Sur ce point, il y avait sans doute matière à davantage développer des traumas puisqu’hormis la jalousie de Erana cherchant l’attention de Boy ou la dépression de Nibs, la série esquisse les possibilités offertes par de tels personnages ou même la relation entre eux et Kavalier, leur créateur, sorte de marionnettiste qui leur a donné une seconde vie, un nouveau corps, de nouvelles capacités mais aussi un nouveau nomafin de marquer encore un peu plus son empreinte sur ses « jouets ». La dimension philosophique qui en découle aurait pu donner quelque chose d’aussi profond qu’un Blade Runner à qui Alien : Earth envoie plusieurs clins d’œil, à commencer par Kirsh, synthétique aussi intriguant que le replicant Roy Batty. A la place, elle préfère se concentrer sur Wendy possédant d’étranges capacités lui permettant de contrôler les appareils connectés aux réseau de Prodigy ou bien de communiquer avec des Xenomorphes étrangement dociles en lui obéissant au doigt et à l’oeil. Pourquoi ? Comment ? Cette saison ne nous le dira pas, sa conclusion laissant davantage entrevoir une rébellion du groupe des hybrides.
Un peu frustrant, tout comme la présence desdits Xenomorphes, crédibles grâce à un mélange efficace de CGI et de costume, mais jamais effrayants car filmés de jour ou dans des endroits surexposés. Alien : Earth a beau nous rappeler à quel point ils sont dangereux dans les deux premiers épisodes, l’efficacité des séquences n’est jamais vraiment là, d’une explosion de torse vue et revue à un jeu de cache-cache entre créature et militaires. Comme pour compenser cette impression de déjà-vu, la série s’évertue à rendre les autres races malignes et menaçantes. Elle le réussit plutôt bien grâce à un aspect poisseux et parasitaire, et surtout la star du show, un œil qu’on croirait issu du The Thing de Carpenter et pouvant prendre le contrôle de n’importe quel corps après avoir délogé un des globes oculaires de l’hôte. Si la créature en elle-même respire un peu trop la CGI, elle irradie l’écran dès lors qu’elle fusionne avec son réceptacle, qu’il s’agisse d’un humain ou d’un mouton. Hawley est bien conscient de son potentiel et ne cessera de mettre l’alien en scène, entre deux dialogues pas toujours très bien écrits mais parvenant cependant à approfondir suffisamment le background de certains protagonistes.
Sans doute trop déséquilibrée pour totalement convaincre, cette première saison d’Alien : Earth sert davantage à poser les personnages, les enjeux avant d’ouvrir la voie à une S02 pour passer la seconde en développant davantage la psychologie des enfants et de Kavalier, l’intérêt des uns et des autres (à commencer par Kirsh), ou même les actions de Weyland-Yutani symbolisée par sa dirigeante ayant décidée d’accélérer les choses si l’on en croit le dernier épisode. Une fin ouverte pour une série qui a le potentiel d’aller bien plus loin en imaginant l’avenir plutôt qu’en se raccrochant à son passé bien que tout soit ici lié. C’est tout le mal qu’on souhaite à son showrunner.
Conclusion
Désireuse de se détacher de ce qui a déjà fait pour approfondir le lore de la licence, Alien : Earth souffle le chaud et le froid tout en témoignant d’un vrai potentiel (autant dans la forme que dans le fond) qui devra être utilisé à bon escient dans une probable S02. En l’état, le contexte est posé, les protagonistes ont encore beaucoup à dévoiler et la promesse d’une guerre de tranchées entre Prodigy et Weyland-Yutani pourrait servir de toile de fond à la suite des événements qu’on imagine d’ores et déjà plus soutenus.
Créée et interprété par Billy Halder en 2018, Barry est une série qui marque, autant qu’un Breaking Bad avec qui elle entretient quelques points communs, à commencer par la double nature du personnage ou ce mélange entre légèreté et dureté. Si Barry a tiré sa révérence en 2023, elle s’avère encore aujourd’hui l’un des shows les plus marquants de ces dernières années.
Ancien marine, Barry Berkman (Billy Halder) s’est reconverti en tueur à gages une fois rentré au pays, en s’associant à un certain Monroe Fuches (Stephen Root). Alors qu’il poursuit sa cible réfugiée dans un cours de théâtre lors d’un contrat, il se fait passer pour l’un des étudiants afin d’atteindre son objectif et échapper aux flics. Se faisant, Barry rencontre la dénommée Sally Reed (Sarah Goldberg) dont il tombe amoureux et commence à se questionner sur son avenir en se demandant si sa vocation n’est pas plutôt d’être sur les planches.
Après avoir posé le contexte, Barry n’a de cesse d’approfondir ses personnages tout au long de ses épisodes en ne lésinant jamais sur les faux-semblants afin de rebattre constamment les cartes pour mieux surprendre le spectateur. C’est sans doute cet aspect qui en fait une série aussi exceptionnelle d’autant que l’ensemble de son casting participe à la tragédie à venir parsemée de passages purement comiques, autant dans leur écriture que leur subtilité.
Cette qualité d’écriture, alternant constamment entre satire, drame et comédie, doit autant au talent de ses auteurs (dont Billy Hader) que celui de ses interprètes, du génial Henry « Fonzie » Walker dans le rôle de Gene Cousineau, l’un des personnages ayant sans doute le plus de facettes avec Monroe Fuches, Sarah Goldberg, terriblement attachante dans le rôle de Sally, ou même des rôles a priori secondaires à l’image de NoHO Hank (Anthony Carrigan, absolument parfait), petite frappe qui va peu à peu contrôler le gang tchétchène avec lequel Barry aura fort à faire.
A travers ses saisons, Barry développe son univers de façon méticuleuse en ne laissant jamais de côté certains personnages. Cet état de faits est particulièrement visible avec NohO qui parvient très souvent à voler la vedette aux rôles plus consistants. Chaque épisode participe à la construction de la saison en cours, ça va vite, on ne s’ennuie jamais, les situations et dialogues savoureux se succèdent et les retournements de situation sont nombreux et bien amenés.
Quatre saisons aussi exquises l’une que l’autre (leurs notes de 96 à 100% sur Rotten Tomatoes parlent d’elles mêmes) qui chacune à leur façon permettent à Barry d’évoluer, en alternant entre ses réussites et les erreurs qu’il commettra malgré toute sa bonne volonté. Avec son physique de jeune premier un peu désœuvré, Billy Halder porte en grande partie le show sur ses épaules et nous gratifie d’une interprétation multi-facettes, aussi à l’aise en tueur professionnel qu’en qu’acteur un peu gauche. Tout au long des saisons, Barry ne cessera d’être confronté à des retournements de vestes, qu’ils viennent de Cousineau ou Fusches, ce dernier se montrant tour à tour protecteur puis destructeur. Rien n’est vraiment blanc ou noir dans la série et si les sentiments de Barry pour Sally sont sans doute ce qu’il y a de plus honnête, on se questionnera plus d’une fois sur les motivations de certains, faussement sincères vis-à-vis de leurs proches et d’eux-mêmes.
Ne se privant jamais d’aborder de front les concepts de vie, de mort et de rédemption, la série prend aussi son temps pour multiplier les sujets, qu’il s’agisse de maltraitance, de stress post traumatique ou de la place des algorithmes sur les plates-formes de streaming. Barry ne se refuse rien et parvient à tout imbriquer de manière étonnamment fluide afin d’offrir au récit cet aspect protéiforme.
Touchant, réservé mais aussi et surtout radical quand il doit honorer un contrat ou protéger ceux qu’il aime, Barry est un personnage complexe autant dans sa personnalité que l’interprétation tout en nuances de son interprète. On ne sera donc pas surpris de le voir se questionner continuellement sur les choix à faire, son ambivalence trouvant écho chez la plupart des autres personnages, à l’image de Sally confrontée à son envie de célébrité, son besoin de reconnaissance et son attachement à Barry qui la mènera plus d’une fois à marcher au bord du gouffre. La série brode ainsi au fil des épisodes un canevas qui n’est pas sans rappeler celui de Breaking Bad (une histoire qui bascule rapidement, le jeu de dupes, le héros devant constamment mentir pour protéger son entourage…) bien qu’à l’inverse de Walter White, Barry soit principalement porté par l’amour plus que par l’ambition.
Chaque moment servant à densifier l’intrigue, qu’elle soit posée ou rythmée à l’image de la course-poursuite en moto de la Saison 03 quasiment en plan séquence, on ne regarde pas Barry, on la dévore. Tout ceci concourt à en faire une série exceptionnelle, aussi bien dans la (dé)construction de ses personnages que cette faculté à aller là où on ne l’attend pas, l’aspect dramatique se substituant souvent à des moments plus drôles, voire complétement décalés avec ce qu’on vient de voir juste avant. Référentielle mais en même temps unique, Barry est un bijou de plus à mettre au crédit de HBO mais aussi et surtout de son créateur/acteur Billy Hader.
Conclusion
Barry est une série que vous devez absolument voir. Tour à tour drôle, émouvante et violente, elle bénéfice d’une écriture admirable tout en étant servi par un casting totalement impliqué. Sous ses airs de « faux Breaking Bad », se cache un show n’ayant jamais peur de mélanger les genres en alternant dialogues ciselés, retournements de situation, scènes d’action et évolution fascinante de ses personnages. Indispensable.
Prolongeant l’histoire du très bon Robocop Rogue City, Unfinished Business nous replonge dans les rues de Detroit, plus exactement à l’intérieur d’une immense construction de l’OCP à mi-chemin entre la citadelle de Kowloon et la tour de The Raid. Une mission qui ne sera pas de tout repos pour notre boîte de fer blanc mais ce ne sont pas quelques étages à gravir qui vont vous faire peur, n’est-ce pas ?
Débutant par une attaque soudaine et sanglante du commissariat de Robocop, ce dernier retrouve la trace des agresseurs à l’intérieur de l’OmniTower, une gigantesque infrastructure, sorte de ville dans la ville, dans laquelle séjournent civils, scientifiques et militaires. Sous l’impulsion d’une mystérieuse informatrice, notre flic s’engage alors dans une vendetta vengeresse sous couvert de la loi, ça va de soi.
LA TOUR INFERNALE
S’inscrivant dans le prolongement de l’aventure principale, ce standalone n’a pas vocation à surprendre mais plutôt à réactiver les excellentes sensations de shoot de l’original en intégrant au passage diverses nouveautés afin de légitimer un peu plus cette suite nécessitant une douzaine d’heures pour être bouclée.
Bien que le pitch de départ soit synonyme de lieu unique, cet aspect est vite contrebalancé par de bonnes idées. En effet, au-delà des divers lieux composant la tour (laboratoires, cinémas, restaurants à thème, bureaux…) et apportant un renouvellement des environnements, on aura l’occasion, lors de flashbacks, d’incarner à plusieurs moments de l’aventure divers personnages nous permettant de sortir de la tour de l’OCP. On pourra ainsi incarner un personnage central qu’on rencontrera par la suite, le lieutenant du bad-guy principal ou bien encore Alex Murphy avant sa transformation en Robocop. Un parti-pris sympathique car si on pourra être frustrés de ne pouvoir utiliser qu’une arme de poing, notre fragilité (trois balles et c’est le Game Over) nous demandera d’adapter notre façon de jouer, en se mettant davantage à couvert, en ajustant mieux nos tirs et en comptant sur les membres de notre équipe pour nous aider. Une parenthèse un peu courte mais apportant de la fraîcheur à l’ensemble. A l’opposé, on incarnera également l’ED-209 lors d’un passage très intense où notre puissance de feu nous sera fort utile pour décimer des quantités astronomiques d’adversaires venant littéralement se faire déchiqueter sous nos rafales.
D’un point de vue de la structure, il conviendra une fois de plus d’enchaîner les missions principales et secondaires, en discutant avec les NPC que vous croiserez pour glaner quelques informations utiles à votre mission ou en dénichant des preuves afin de récupérer suffisamment d’EXP pour obtenir des points de compétences, histoire d’améliorer les attributs de Robocop. Notez qu’au début de l’aventure, vous posséderez automatiquement quatre capacités (Bouclier, Dash, Bullet time et Flash) qui ne seront pas de trop pour faire place nette. Afin de nous offrir quelques pauses salvatrices, Teyon a également intégré des chapitres plus narratifs. Malheureusement, on trouvera souvent le temps long, le gameplay se résumant à aller d’un point A à un point B, scanner quelques lieux et autres corps puis à discuter avec nombre de personnages. Peu passionnant d’autant qu’à de multiples reprises, on aura droit à des bugs de caméra rendant certains dialogues peu immersifs voire involontairement drôles à cause de personnages mal placés, coupés ou tout simplement absents. Plus embêtant, on rencontrera aussi ce souci lors de certaines quêtes rendant ces dernières impossibles à terminer. Heureusement, en rechargeant le chapitre, ceci résoudra le problème mais ce manque de finition (auquel on rajoutera certains textes non traduits) fait parfois fortement tiquer.
MURPHY GOT A GUN
Comme vous pouvez néanmoins l’imaginer, le cœur de ce standalone sera toujours l’action, ici plus condensée afin de maintenir un rythme constant. S’appuyant sur des gunfights nerveux, les développeurs se sont fait plaisir, en accumulant les scènes d’action XXL contre des cohortes d’adversaires armés jusqu’aux dents accueillant plusieurs nouveaux venusdans les rangs. Outre des drones explosifs, on affrontera des soldats en jet-pack, des droïdes équipés de katanas ou des adversaires en armure utilisant une arme cryogénique qu’il sera possible d’utiliser à notre tour. Malgré l’intensité des gunfights, le jeu reste néanmoins très simple d’autant que si notre Pistolet Auto 9 s’avère toujours aussi efficace grâce à ses munitions illimitées, on ne se privera jamais de changer d’arme afin varier les plaisirs et les kills.
D’ailleurs, Teyon a ici aussi ajouté quelques features pour rendre le tout encore plus dynamique. De la possibilité d’utiliser des surfaces pour faire rebondir nos tirs et ainsi toucher des ennemis par derrière à l’usage de plusieurs QTE synonymes de différentes mises à morts (encastré dans un ventilateur, jeté dans un vide-ordures, aplati par une enseigne…), le fun est toujours aussi présent à l’image de l’aspect gore qu’il sera possible d’accentuer en activant des puces de cartes mémoire qui vous serviront à nouveau à augmenter certains attributs (défense, nombre de munitions, portée de vos tirs, etc). Notons à ce sujet l’absence de fusion de ces dernières, feature qui ne servait pas à grand chose dans le jeu de base.
On navigue donc en terrain connu avec Unfinished Business. Certes, la modélisation des personnages n’est vraiment pas folichonne, les quelques longueurs mentionnées plus haut cassent un peu le rythme, on note plusieurs bugs qui font parfois grincer les dents mais rien de tout ceci ne vient vraiment entacher le plaisir de sulfater des soldats par paquet de douze. C’est basique, c’est primaire mais qu’est ce que c’est plaisant !
Conclusion
Unfinished Business reprend ce qui avait fait le succès de Rogue City tout en condensant l’action plus jouissive que jamais grâce à plusieurs nouvelles features et armes décuplant les sensations de shoot de l’original, déjà excellentes. On pourra bien lui reprocher plusieurs petites choses (quelques bugs, certains passages narratifs trop poussifs, une IA moyenne) mais rien qui ne vienne amoindrir l’intensité des gunfights plus que jamais au cœur de l’expérience.
Après s’être fait la main sur Mafia 3, Hangar 13 avait brillamment transformé l’essai avec un excellent remake du premier Mafia. Pour ce nouveau volet, les développeurs ont choisi de quitter les rues d’Empire Bay afin de poser leurs valises dans la campagne sicilienne, dans les années 1900. Un retour dans le passé pour un jeu aussi classique que bien narré.
Notre histoire débute en 1904, au fin fond d’une mine où travaille Enzo, un carusu, autrement dit un mineur, qui survit tant bien que mal. Après avoir perdu son ami Gaetano suite à un tremblement de terre provoqué par les vibrations d’un volcan, Enzo provoque en duel le contremaître. Il s’enfuie et alors qu’il est sur le point d’être abattu, il est secouru in extremist par Don Torrisi, personnage influent et respecté de la région. Après quelques petits boulots pour ce dernier, Enzo va se montrer très impliqué dans ses nouvelles fonctions au point d’être intronisé membre de la famille. Une nouvelle vie va alors s’offrir à lui, avec son lot d’amitiés, de meurtres et de sacrifices. Le jeune homme entend bien devenir quelqu’un d’important que ce soit aux yeux du Don ou de sa fille Isabella dont il tombe éperdument amoureux.
Une histoire que vous ne pouvez pas refuser
Pour qui est coutumier des films de mafia, Le Parrain en tête de liste ou la plupart des Martin Scorsese, l’histoire de The Old Country aura des airs de déjà-vu. C’est un fait, Hangar 13 n’innove en rien une structure connue mais cela ne minimise en rien la qualité de l’écriture. En effet, si il y a une chose que le studio californien a très vite appris tient en l’importance d’avoir des personnages marquants tout en soignant se réalisation afin d’iconiser les moments forts à venir, qu’il s’agisse d’amour, de violence ou de trahison. A ce petit jeu, le studio se montre efficace et le résultat est là : l’ensemble des protagonistes, amis comme ennemis, forment un casting complémentaire qui nourrira la douzaine d’heures dont vous aurez besoin pour terminer l’histoire principale.
Mélangeant histoire de famille et guerre de clans, The Old Country prend son temps pour installer son intrigue, trop peut-être puisque si c’est l’action qui vous intéresse, vous devrez attendre quatre chapitres avant de tirer le premier coup de feu. Toutefois, on ne peut que saluer cette volonté tant elle permet de présenter de façon fluide plusieurs éléments de gameplay (l’infiltration notamment) tout en usant d’une ellipse temporelle d’un an permettant au jeu d’approfondir rapidement la relation entre Enzo et les membres de sa nouvelle famille. Sur ce point, c’est réussi d’autant que si certains d’entre eux auraient pu être vite agaçants, ils s’intègrent au contraire dans une vraie cohérence scénaristique en faisant partie du quotidien d’Enzo tout en ne déviant jamais de leurs objectifs initiaux. Ainsi, Lucas, au charisme proche de celui d’un Errol Flynn, ne remettra jamais en question les choix du Don tout en faisant preuve de nuances et de prudence. A l’inverse, Cesare, le neveu du Don, se présente comme un homme d’action et si son arrogance de départ va se muer en profonde amitié pour Enzo, il ne cachera jamais à ce dernier son envie de tenir les rênes de la famille.
En parlant de ça, le Don s’avère être une figure imposante, autant dans son allure impressionnante que sa volonté de fer lorsqu’il s’agit de protéger les siens et surtout ses intérêts. Aucun de ces personnages n’est ni blanc, ni noir et ce sont leurs imperfections qui les rendent si attachants. N’oublions pas non plus Isabella, seul vrai rayon d’espoir pouvant montrer la voie de la rédemption à Enzo. Ne se limitant pas à son rôle de jeune rebelle, Isabella a parfaitement compris qui est l’homme qui la chérit comme son bien le plus précieux dans tous les sens du terme. Revendiquant sa liberté, cherchant à vivre à travers ses propres choix et non ceux de sa famille, Isabella trouvera en Enzo un écho en plus d’un amant et n’aura de cesse de militer pour le droit au bonheur tout en s’affirmant comme une femme au caractère bien trempé.
Bien que l’écriture soit de grande qualité, on pourra citer quelques écueils à l’image de la mort de Gaetano, trop vite expédiée et ne générant que peu d’empathie, ou bien encore une séquence finale longuette, peu intéressante d’un point de vue gameplay et minimisant un climax arrivant juste avant, ceci rendant la fin moins puissante qu’elle aurait pu/dû être.
Un gameplay daté mais suffisant
Si l’aspect narratif de The Old Country est donc à saluer, le gameplay reste, lui, perfectible, d’autant qu’on y trouve grosso modo la plupart des défauts de Mafia 3. Mélange d’infiltration, d’action et de courses poursuites, ce volet conserve une vraie dimension cinématographique tout en s’inspirant de plusieurs titres, d’Uncharted à Hellblade. Alors que les trailers laissaient présager un jeu au rythme haletant, le résultat est bien plus posé, avec des chapitres sachant prendre leur temps pour exposer les faits, creuser les relations entre personnages puis les confronter à leurs choix. Bien entendu, vous devrez régulièrement prendre les armes dans des gunfights imposées par l’histoire. Si la pléthore de pétoires à disposition est efficace avec un très bon feeling quelle que soit l’arme choisie, l’IA s’avère toujours aussi particulière avec ces adversaires essayant rarement de nous prendre à revers ou n’usant que très rarement de grenades pour nous déloger. De fait, la plupart du temps, on campera sur nos positions en attendant sagement que les mafieux arrivent vers nous à découvert pour les shooter à bout portant.
Cette méthode fonctionnant également très bien quel que soit le mode de difficulté, Mafia : The Old Country est un titre qui vous posera peu de problèmes, ceci valant aussi pour les duels au couteau, sans doute un peu surexploités quitte à parfois dénaturer la nature de certains personnages. En effet, autant, on comprendra qu’entre mafieux, on puisse respecter un code d’honneur et choisir le schlasse plutôt que le flingue, autant contre un policier en fonction, c’est déjà plus contestable. Pour le duel en lui-même, malgré les différentes actions (esquive, contre, estoc…), dès qu’on se rend compte de l’ouverture qu’on a après que l’ennemi ait asséné une série de coups imparables, on aura aucun mal ici aussi à enchainer les victoires d’autant que certains affrontements disposent de check points.
L’infiltration de son côté s’avère encore plus datée puisque n’offrant aucun challenge à cause de gardes n’ayant quasiment aucune routine de surveillance. En effet, la plupart du temps, lorsqu’on arrivera près de ceux-ci, on aura le droit à des dialogues scriptés entre deux d’entre eux qui se sépareront avant de rester immobiles en attendant bien sagement qu’on débarque dans leur dos pour les larder d’un coup de couteau ou les étouffer. En somme, nous n’aurons même pas à les distraire en jetant des pièces de monnaie ou des bouteilles pullulant dans les zones tant il est simple de les contourner pour s’en débarrasser. Et je ne parle même pas de l’option consistant à cacher des corps qui ne sert à rien.
On reprochera aussi aux développeurs d’avoir un peu loupé leur système économique basé sur de l’argent à récupérer pour acheter de nouvelles armes, des véhicules, des chevaux et autres skins. On devra ainsi piller tous les coffres à disposition en trouvant des combinaisons ou en les crochetant avec notre couteau qui s’usera à chaque utilisation. Si des pierres à aiguiser seront indispensables pour réaffuter celui-ci, elles sont tellement rares qu’on n’utilisera rarement la possibilité de tuer un adversaire avec son couteau (lancer ou stealh kill) pour « économiser » ce dernier afin d’ouvrir les coffres.
Néanmoins, même en ayant ceci en tête, on pourra vite être à court de dinars, ceci nous obligeant alors à refaire des chapitres ou à recharger certains check points pour ouvrir en boucle des coffres, l’argent obtenu se cumulant au fur et à mesure. L’autre méthode, plus dans le flow du jeu, consistera à faire les poches de tous les gardes qu’on élimine d’autant que ceux-ci possèdent également munitions et bandages. Le problème est que ceci minimisera grandement l’immersion en plein gunfight. A vous de voir comment vous souhaitez profiter de votre aventure. Je serai tenté de vous conseiller une première partie en vous laissant porter par l’histoire puis de revenir dans l’open world via le mode Exploration, aussi vide (puisque exempt de toute mission) qu’obligatoire pour qui chercherait l’ensemble des Collectibles. Notez d’ailleurs que les développeurs ont récemment précisés qu’ils apporteraient dans les mois à venir du contenu supplémentaire gratuit pour ce mode afin de le rendre plus attractif. Une très bonne initiative tant il est frustrant de ne pas davantage profiter de la magnifique DA restituant à merveille la beauté de la campagne sicilienne et de la ville fictive de San Celeste.
Dans l’absolu, malgré tous les défauts énoncés, The Old Country se montre, paradoxalement, assez concluant dans son gameplay. Ce n’est donc pas un manque de sensations qui frustre mais plutôt l’inutilité de trop d’éléments. A ce sujet, on pourra aussi regretter l’importance très minime de notre chapelet. Bien que l’idée, synonyme de perles offrant divers avantages passifs, soit intéressante, le jeu est tellement simple qu’on pourra le terminer en passant totalement à côté de cette feature. En résulte une aventure au gameplay suranné mais néanmoins immersive, portée par une histoire prenante ou bien encore une bande-son oscillant intelligemment entre musiques traditionnelles et envolées plus symphoniques lors des gunfights. Pour rester dans le sujet, je vous recommanderai également d’y jouer en Sicilien pour une plus grande immersion. Dommage que plusieurs faiblesses techniques (quelques bugs graphiques, divers soucis de finition), de construction (la traditionnelle course de voitures, ici pensée comme un élément de scénario plus que comme un vrai challenge, en est un excellent exemple) et un gameplay n’ayant pas vraiment évolué depuis les derniers opus ternissent le tableau. The Old Country reste malgré tout un épisode porté par ses personnages haut en couleurs et une histoire rendant joliment hommage à tout un pan d’œuvres cinématographiques.
Conclusion
Mafia : The Old Country ous offre une histoire classique mais aux personnages parfaitement écrits offrant à la tragédie à venir une véritable dimension cinématographique. Si l’immersion est belle et bien là, la structure très fermée du jeu pourra frustrer d’autant que le très beau semi open world à disposition ne sera librement disponible que dans un mode Exploration vide de toute mission ou action. En résulte un jeu dans la veine de ses prédécesseurs, captivant par son histoire, faisant le job grâce à un gameplay efficace mais daté, mais qui aurait sans doute mérité un peu plus de finition pour s’élever au niveau du fantastique Mafia : Definitive Edition.
Depuis 1933, date de sa création, l’homme d’acier aura eu droit à de nombreuses adaptations, au cinéma mais aussi dans la petite lucarne à travers diverses séries live et d’animation. Adulé et conspué (choisissez votre camp) le Man of Steel de Zack Snyder proposait une vision très comic book tout en portant la patte de son réalisateur. De la même façon, le Superman de James Gunn transpire le style de son réalisateur, son amour des comics et une certaine forme d’humour. De quoi alimenter bien des débats.
Débutant le nouveau DCU de James Gunn au cinéma (celui-ci ayant réellement débuté avec l’excellente série d’animation Creature Commandos), Superman se devait plus que jamais de bomber le torse afin de convaincre fans et profanes. Sans susciter la fascination d’un Batman, sans doute à cause d’un patriotisme un peu trop prononcé pour les non américains, le super-héros, ou du moins son interprète, David Corenswet, devait également convaincre dans le rôle afin de faire taire les fans d’Henry Cavill, très convaincant dans son costume moulant. Si le ressenti variera forcément en fonction de vos attentes et votre vision du personnage, difficile de nier que Gunn a trouvé une formule à même de contenter un large public en mélangeant action, humour et message politique(un brin caricatural).
S’affranchissant de toute l’origin story du personnage, Superman démarre sur les chapeaux de roue et enchaîne les personnages et situations à un rythme effréné. S’articulant autour de l’affrontement entre Sup. et Lex Luthor, le scénario intègre néanmoins certaines questions d’ordre moral tout en ajoutant des éléments plus intimistes avec Lois et la famille de Clark. Malheureusement, tout ne fonctionne pas parfaitement car si certains dialogues sonnent juste (celui entre Lois et Clark), d’autres se montrent trop expédiés et classiques dans leur écriture (celui entre Clark et ses parents) pour pleinement convaincre. Il faut également préciser qu’en un peu plus de deux heures, il est difficile de faire rentrer autant de thématiques et personnages sans en sacrifier certains au passage. C’est un peu le constat qui s’impose lorsqu’on songe au Justice Gang (composé de Green Lantern, Hawkgirl et Mister Terrific), trio éminemment sympathique, servant l’aspect fun et décalé du long-métrage mais aux membres très peu développés. Même son de cloche concernant Ultraman dont les origines sont très vite expédiées ou le pourtant très réussi Metamorpho qu’on aurait aimé connaître un peu plus en profondeur.
Superman pêche donc quelque peu par ses ambitions dont la durée ne permet pas de cocher toutes les cases. Au-delà d’une certaine frustration, le film de Gunn comporte néanmoins suffisamment de moments épiques pour exciter les sens. Certes, il vous faudra apprécier un humour proche de celui des Gardiens de la Galaxie pour pleinement rentrer dedans mais si c’est le cas, vous aurez alors l’une des meilleures adaptations du personnage sur grand écran. D’abord, parce qu’il embrasse complètement sa vision en s’inspirant de l’âge d’or de Superman (1938 – 1956) jusqu’à intégrer Krypto, quitte à s’attirer les foudres de certains fans ne trouvant pas la chose très sérieuse, ou en allant au bout de certaines idées un peu saugrenues (la façon dont Lex dirige Ultraman). Mais qu’à cela ne tienne, James Gunn assume et se fait plaisir.
Bien que cela se concrétise une fois encore par l’affrontement de Superman et son Némésis préféré, l’écriture est suffisamment savoureuse pour permettre au casting de nous offrir leur propre vision des personnages, bien différente de celles des précédents films. Nicholas Hoult (plusieurs X-Men, Nosferatu) s’en donne à cœur joie sous les traits de Lex qui devient ici un milliardaire encore plus arrogant, hautain et bien décidé à crier à qui veut l’entendre quel danger représentent les méta-humains. Rachel Brosnahan (Gossip Girl, Les Experts : Miami) offre une vraie force de caractère à Loïs pendant que David Corenswet (Pearl, Twisters) campe un Superman, plus humain que jamais, tiraillé entre l’envie de faire le bien au risque de participer à des conflits pouvant bousculer l’ordre mondial, sa vie de couple et son quotidien en tant que Clark Kent. Saupoudrant le tout d’un amour pour la pop-culture, Gunn fait preuve une fois de plus d’une maitrise certaine pour filmer l’action, généralement en grand angle, que ce soit lors d’une baston entre Superman et un kaiju, le passage de Mister Terrific contre la milice de Lex Luthor, très Star-Lord dans l’âme, ou une démonstration de force du Justice Gang face à l’armée Boravienne.
Le réal va même jusqu’à faire un joli pied de nez à Marvel en intégrant sa vraie scène post-générique avant ce dernier, avec l’apparition de Supergirl nous faisant notamment comprendre la nature surexcitée de Krypto. Un moyen comme un autre d’intégrer la cousine qui aura prochainement le droit à son propre long-métrage et une façon espiègle de terminer un blockbuster. Du pur James Gunn.
Conclusion
Excitant, fun et transpirant l’amour de James Gunn pour la pop culture, Superman ploie parfois sous le poids de ses ambitions en ne parvenant pas toujours à développer l’ensemble de ses personnages, principaux comme secondaires. Reste malgré tout un film sincère et maitrisé, servant autant à remettre en selle Superman qu’à préparer le terrain pour les futurs films du DCU.
Après avoir redéfini le film de zombies, pardon, d’infectés, à travers un long-métrage désespéré et viscéral, 28 jours plus tard s’offrira une suite toute aussi efficace se payant même le luxe de nous offrir l’une des introductions les plus nihilistes, intenses et sombres vues dans un film d’horreur. 28 ans plus tard nous replonge dans cet univers post-apo à travers le quotidien d’un camp de réfugiés en optant pour un aspect sauvage et survivaliste bien plus marqué. L’occasion pour Boyle et Garland de revenir à la barre avec ce premier volet d’une nouvelle trilogie d’ores et déjà annoncée.
Lorsque Boyle réalise 28 jours plus tard en 2002, le film est forcément imprégné de son style, de son obsession pour la musique, qu’on retrouve également à travers sa real ayant parfois des allures clipesques ou, également, à travers ses expérimentations via l’utilisation de caméras DV donnant au film une patine particulière et une tension rarement vu dans un film de zombies avec ses plans proches de ceux d’un reportage de guerre. Logique donc que 23 ans plus tard, le réalisateur anglais revienne à ses premiers amours et nous offre un film tout aussi fou.
Déjà, il faut accepter que 28 ans plus tard opte pour un terrain de jeu réduit puisque se déroulant sur l’île de Lindisfarne en mettant en avant sa communauté d’insulaires retranchés dans un camp fortifié. Exit donc ce que laissait entrevoir le dernier plan iconique de 28 semaines plus tard avec sa horde d’infectés déferlant sur Paris puisque le virus de la fureur a été éradiqué d’Europe à l’exception du Royaume Uni d’où est originaire le mal. L’objectif de 28 ans plus tard n’est donc nullement de nous montrer le résultat d’une pandémie mondiale mais au contraire de se focaliser sur l’histoire d’une famille composée de Aaron Taylor Johnson, son fils (excellent Alfie Williams) et sa femme (Jodie Comer) atteinte d’une maladie inconnue. Simple dans ce qu’il raconte, 28 ans plus tard nous fait suivre le jeune Spike qui, après s’être opposé à son père qu’il accuse de vouloir laisser mourir sa mère, prend littéralement cette dernière sous le bras afin de la mener sur le continent pour trouver un médecin (Ralph Fiennes) afin de tenter de la sauver.
Comme pour compenser ce scénario conventionnel, Boyle injecte dans son long-métrage toutes ses envies de renouveau formel, en balisant la virée de Spike de moments hallucinés oscillant entre les scènes les plus fortes de 28 jours plus tard et les trips sous acide de Trainspotting, grâce notamment à la technologie qui, couplée à une vingtaine d’iPhone, décuple l’impact des flèches dans les corps des infectés à travers une sorte de semi bullet-time. Si l’effet est sans doute exploité de façon un peu trop mécanique, il s’inscrit dans un tout plus global ayant des airs de found footage barré intégrant au passage plusieurs types d’infectés, des rampe-lents, trop patauds pour représenter une menace, aux terrifiants Alpha dont le seul pas lourd suffit à faire frisonner. Cet apport, très vidéoludique dans l’âme (l’Alpha fait clairement penser au Nemesis de Resident Evil 3), apporte au film cette dangerosité qui donnait déjà aux deux précédents volets ce côté désespéré, autant dans le mode de propagation du virus (une simple goutte de sang suffit) que la rapidité de la transformation ne nécessitant que quelques minutes.
Ses faux airs de The Walking Dead s’estompent alors rapidement pour laisser place à un spectacle sans concession tranchant radicalement avec ce qu’on pouvait craindre : une suite balisée et sans vraie prise de risques. 28 ans plus tard, c’est tout le contraire puisque tout en développant un univers connu via un aspect plus brutal mais aussi plus spirituel par le biais du Dr Kelson, Boyle s’affranchit des derniers films de zombies en piochant davantage dans son cinéma très marqué que dans celui de franchises installées a priori plus bankables. Logique donc que le tout soit clivant et qu’il déçoive autant qu’il fascine, dans ses élans de folie accentués par une bande-son omniprésente, un aspect extrêmement sensitif, son montage frénétique, ses moments de douceur et ce jusqu’à sa fin aussi ouverte qu’un cliffhanger de série annonçant le deuxième volet attendu pour début 2026. Un pari osé pour un film osé mais pouvions-nous seulement attendre autre chose du duo Boyle/Garland ?
Conclusion
Ne cherchant jamais la moindre concession, Alex Garland et Danny Boyle accouchent d’un film totalement fou ne pouvant susciter que des réactions vives et variées. 28 ans plus tard ne suit aucune route prédéfinie et tout en se voulant aussi frontal et désespéré que les deux précédents volets, il témoigne surtout de la volonté de ses créateurs bien décidés à faire un gigantesque doigt d’honneur au tout Hollywood quitte à osciller entre l’expérimentation visuelle et le grand n’importe-quoi complètement barré.
C’est en 2008 que sort le premier Little Big Planet, jeu de plates-formes à destination de la PlayStation 3 et disposant d’une forte dimension communautaire avec du multijoueur et un outil de création permettant de concevoir ses propres niveaux. Fort d’un bon succès, la saga donnera lieu à deux suites, mettant toujours en vedette le dénommé Sackboy. C’est donc fort logiquement que le dernier opus en date reprend le nom de son héros afin de nous proposer un épisode délaissant l’aspect créatif au profit de la plate-forme pure et dure.
Patchwork Monde connait le plus grand bouleversement de son histoire. Le maléfique Vex vient de débarquer à l’improviste et entend bien, avec l’appui de son armée, asservir le peuple du village de Loom où vit le bien nommé Sackboy. Ni une ni deux, notre petite poupée de chiffon préférée va devoir se retrousser les manches et partir à l’aventure afin de vaincre le gredin et sauver tout ce beau monde. A la lecture du pitch, vous aurez sûrement compris que l’intérêt du jeu ne réside pas dans ces bribes d’histoire classico classiques mais bel et bien dans son contenu. Sur ce point, le titre est plutôt irréprochable bien qu’il délaisse l’aspect créatif présent dans les trois précédents volets.
En effet, si il était possible auparavant de créer ses propres niveaux et de les partager avec la communauté, cet aspect est purement et simplement supprimé, sans doute pour des raisons de temps et d’argent à moins que la feature ait moins d’attrait aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, la dimension multijoueur persiste puisqu’il sera possible de jouer avec un, deux ou trois amis dans certains stages spécifiques. D’ailleurs, malgré la fonction online, il est un peu frustrant de ne pas avoir accès à ces niveaux (deux, la plupart du temps, dans chacun des cinq mondes disponibles) cadenassés pour les pauvres hères solitaires. Si vous voulez ainsi découvrir tout ce que A Big Adventure propose, il vous faudra accepter de jouer avec des inconnus, ceci n’étant pas nécessairement le plus adapté dans un jeu de plates-formes où les réflexes et actions coordonnées sont importants. Mentionnons enfin qu’avec des serveurs actuellement déserts, vous n’aurez aucune possibilité de jouer à ces niveaux à moins de connaitre quelqu’un possédant le jeu. Frustrant.
En dehors de cet aspect, précisons qu’on retrouve aussi l’une des forces des précédents jeux synonyme de customisation de notre personnage. Outre la centaine de costumes disponibles (originaux ou s’inspirant de grandes licences PlayStation), il sera aussi possible d’acheter quantité d’accessoires (couvre-chef, haut, bas, mains…) pour créer votre propre Sackboy. Pour ce faire, vous devrez néanmoins avoir suffisamment de Collectabelles, chaque item ayant un prix. Et comment trouve-t-on ces fameux Collectabelles me demanderez-vous ? Tout simplement en les récupérant dans les niveaux ou à l’intérieur des hubs où poperont par moments une lanterne magique recelant des variantes d’une pièce entièrement dédiée à la récupération de cette monnaie. Ceci me permet de rebondir sur la construction de Sackboy : A Big Adventure, aussi classique que satisfaisante grâce, notamment, à une gestion parfaite de sa difficulté.
Découpé en cinq mondes et autant de biomes (exotique, marin, futuriste…), le titre nous invite à suivre un chemin prédéfini composé de plusieurs levels qui, une fois bouclés, ouvreront la voie aux suivants. Sackboy ne réinvente pas la roue mais s’avère pourtant surprenant à bien des égards. Déjà, dans son utilisation de la musique, c’est du grand art. Outre des compositions originales, variées, parfaitement adaptées aux niveaux et rythmant à merveille la progression, le jeu utilise également nombre de morceaux connus (le Let’s Dance de David Bowie, Uptown Funk de Bruno Mars et Mark Ronson, The Private Psychedelic Reel des Chemical Brothers…) afin de décupler l’impact de certains stages. Sur ce point, c’est un sans faute d’autant que la musique s’adapte à la progression du joueur en usant de boucles musicales afin de toujours rester dans le rythme. Notons que ce système sera repris dans le récent Alan Wake 2. Bref, la soundtrack de Sackboy est tout simplement exceptionnelle et concoure grandement au plaisir de la découverte.
Concernant son gameplay, le titre profite de bases solides synonyme d’une panoplie de mouvements (plonger, esquiver, rouler) permettant à Sackboy d’être suffisamment réactif pour se confronter à tous les pièges se dressant sur sa route. En sus, on nous proposera parfois divers ustensiles (bottes à réaction ou nimbées de miel pour coller aux surfaces, frisbee) autour desquels le level design sera conçu. De quoi apporter un peu de variété à l’image des niveaux nous forçant à avancer sans relâche en suivant un train en marche ou pour éviter un champ protecteur à deux doigts de nous désintégrer. Toutefois, mentionnons quelques soucis liés à la profondeur de champ synonyme de sauts un peu plus « tricky » ou de collectibles difficilement atteignables. Si vous êtes du genre à terminer les niveaux à 100%, je vous conseillerai d’opter à certains moments pour les vies infinies afin de ne pas criser à cause d’un Game Over lié à un dernier item difficilement atteignable.
Bien que pensé dans le même moule qu’Astro Bot, Sackboy : A Big Adventure s’avère légèrement moins accessible mais reste une valeur sûre de la plate-forme, grâce à son contenu généreux auquel s’ajoutent une 20aine de défis chronométrés à la difficulté exponentielle mais aussi son visuel des plus charmants oscillant entre un pop-up book en tricot et un film d’animation. Tout ceci participe à un produit très solide, parfaitement calibré pour toucher adeptes du genre et grand public. Cute à souhait, Sackboy n’a rien perdu de sa superbe et son portage PC s’en sort avec les honneurs grâce à de multiples réglages rendant l’expérience aussi agréable que sur consoles et ce quelle que soit votre configuration.
Conclusion
Malgré quelques soucis de jouabilité et une histoire useless, le titre de Sumo Digital reste encore aujourd’hui un excellent investissement grâce à sa générosité sans faille et une utilisation admirable de sa musique. Si d’aucun trouveront qu’il est dommage que la série ait délaissé la création de niveaux, ce ressenti s’estompe rapidement grâce à une bonne dose d’inventivité, une réalisation hors pair et un gameplay très bien calibré.
The Last of Us - Series 02 - Character Artwork - Abby (JPEG)
Après une première saison aussi fidèle à l’univers que pressée de faire rentrer l’intégralité des événements du premier jeu dans ses neuf épisodes, The Last of Us remet le couvert avec l’adaptation du second titre. D’ores et déjà découpée en deux voire trois parties, la suite de la série a la lourde tâche d’adapter des moments qui ont traumatisé des millions de joueurs tout en restant aussi explicative que possible pour celles et ceux n’ayant jamais vu un pixel de leur vie.
Alors qu’un sentiment mitigé nous étreignait à la fin de la Saison 01, on était déjà en droit de se demander à qui se dédiait finalement l’adaptation de The Last of Us : joueurs ou profanes ? Si le besoin de s’adresser à ces deux typologies de personnes se faisait ressentir via l’ensemble des scènes clés du jeu présentes dans la série, des passages originaux (le fameux Episode 03) et le besoin de tailler dans le gras pour ne garder que le meilleur du jeu, on sentait déjà les limites de l’entreprise. Fort logiquement, ces écueils sont encore plus présents dans cette nouvelle saison, d’abord parce-que la matière à adapter est bien plus dense et d’autre part, parce-que la série n’arrive clairement pas à reproduire l’émotion suscitée par le jeu qui maitrisait beaucoup mieux les thématiques abordées.
D’un jeu contemplatif à une série sans nuances
Sans épiloguer sur la construction de The Last of Us : Part II, il convient de revenir rapidement sur sa construction afin de mieux comprendre ce qui ne va pas dans son adaptation. Ceci ne pourra se faire sans spoilers, vous voilà prévenus.
Part II est un jeu intelligent à bien des égards, déjà parce qu’il a la volonté de bousculer son public, celui qui s’est épris de ses deux personnages principaux, Ellie et Joel, durant The Last of Us : Part I. Ainsi, alors qu’on nous propose à nouveau d’incarner dans son introduction Joel puis rapidement Ellie, une troisième individue s’invite à la fête, la dénommée Abby, qu’on ne connait ni d’Eve ni d’Adam. Si nous faire jouer une parfaite inconnue a de quoi nous désarçonner, la voir défoncer la crâne de Joel quelques heures plus tard a de quoi choquer le plus endurci des joueurs. Tous ces événements, auxquels on ajoutera une contextualisation solide pour présenter la communauté de Jackson, consolident une progression millimétrée, faite de cinématiques et de longs passages de gameplay servant également la narration et la tension implicite. La série, de son côté, choisit de tirer un trait sur tout ce build-up pour plusieurs raisons.
Premièrement, on sait que Part II sera adapté en plusieurs saisons avec notamment une S03 plus longue que la S02 (composée de sept épisodes) et davantage centrée sur Abby. Part II est un jeu dense, ceci nécessitant de prendre son temps pour l’adapter, ce qui fait qu’il est ici encore plus difficile d’accepter cet empressement constant avec un nombre d’épisodes plus conséquent. Cette décision s’accompagne d’ellipses donnant au show un aspect étrange où chaque scène semble simplement posée là pour faire avancer le récit de manière artificielle tout en enchainant les clins d’œil aux fans afin de contenter ces derniers.
Le deuxième écueil, directement associé au premier, concerne le manque de subtilité, de nuances de cette Saison 02 et ce dès la scène de présentation d’Abby dont on dévoile maladroitement une partie de son passé et de ses motivations, ceci minimisant énormément (en comparaison du jeu) la suite des événements et l’explication de son acte à venir. Sur ce point, difficile de comprendre et d’accepter ce parti-pris qu’on retrouve tout du long de cette saison et ce même lors de son meilleur épisode, le 6ème, réalisé par Neil Druckmann. S’attardant sur Joel et Ellie, sur leur relation, cet épisode commence parfaitement en revenant sur l‘enfance de Joel puis enchaine en adaptant l’un des plus beaux moments du jeu, la visite du musée. Parfaitement construit, bénéficiant de très beaux décors, l’épisode est aussi émouvant que son pendant vidéoludique. Sauf qu’ici aussi, les scénaristes choisissent d’enfoncer le clou en répétant une scène pour bien nous faire comprendre que Joel ment à Ellie (en écho à la fin de la S01) et que celle-ci l’a bien compris. Si tout ceci nous amène à la très belle conclusion de l’épisode (différente de celle du jeu puisqu’ici Ellie réfute totalement le geste de Joel), on peut à nouveau se demander si les auteurs n’ont pas cherché, coûte que coûte, à ne laisser aucun spectateur sur le bas côté de la route, quitte à les prendre un peu trop par la main.
Préparer l’avenir
Au delà de ses gros problèmes de narration, cette Saison 02 semble toutefois avoir eu les moyens de ses ambitions, notamment dans ses décors post apo du plus bel effet. Ici aussi, pas de surprise pour les joueurs, chaque lieu iconique étant fidèlement retranscrit. Malheureusement, ceci ne résout jamais vraiment les soucis de construction, de rythme et alors qu’on jubilera à l’approche des scènes du studio de télévision ou de l’aquarium, on déchantera aussitôt devant le traitement de ces dernières, les situations ne parvenant jamais vraiment à crédibiliser la nature guerrière d’Ellie. D’ailleurs, si les scénaristes se sont sentis obligés de débuter la série par une scène originale la montrant en train de se battre avec un adulte, on a malgré tout du mal à croire que les années ont passées et qu’Ellie les a mise à profit pour s’endurcir, en maîtrisant les armes à feu et les techniques de cac. Du côté d’Abby, on pourra aussi trouver le choix de Kaitlyn Dever (Detroit, la série Justified) assez étrange. Si la jeune actrice semble avoir plus ou moins bien cerné le rôle, son côté presque frêle empêche de reproduire cette dichotomie entre son physique et celui d’Ellie, là où la première s’était endurcie mentalement et physiquement pour sa vengeance et sa survie alors que la seconde représentait son contraire en privilégiant un aspect plus «sneaky» dans l’approche des problèmes. On trouvera donc dommage que le showrunner n’ait pas demandé à l’actrice de prendre du muscle puisque la stature initiale faisait partie du personnage, notamment dans sa capacité à faire face à des situations perdues d’avance tout en étant l’égal de n’importe quel homme de son groupe.
Et dieu seul sait que cette Saison 02 ne manque pas de protagonistes entre le WLF mené à la baguette par Bernard Lowe (un excellent choix de casting) dans le rôle d’Isaac, les Lucioles ou bien encore les Scars qu’on devrait apprendre à mieux connaître dans la Saison 03. A l’image de la Saison 01, les infectés font une fois encore de la figuration, bien que les deux premiers épisodes les mettent à l’honneur, autant lors d’une course-poursuite tendue que pendant une séquence impressionnante, inédite et renvoyant à l’attaque de Winterfell par les Marcheurs Blancs de Game of Thrones. Si tout ceci concoure à poser le contexte des événements à venir, cette S02 aurait sans doute gagné à mieux équilibrer sa narration en alternant davantage entre Ellie/Dina, dont l’amour naissant nourrira les saisons prochaines, et Abby, plutôt que d’opter pour une façon de faire proche de celle du jeu. Il y a encore beaucoup à raconter, espérons que la S03 gomme les écueils cités afin de nous offrir un récit qui saura prendre son temps et accélérer quand il est nécessaire.
Conclusion
La Saison 02 de The Last of Us laisse un fort goût d’inachevé dans sa précipitation à enchaîner les séquences quitte à sacrifier la plus petite once de nuance quand il s’agit de présenter les nouveaux personnages. Une fois encore trop pressée d’en finir, la série nous laisse souvent sur notre faim malgré son exactitude lorsqu’il s’agit de reproduire fidèlement les lieux de l’intrigue. Malheureusement, ceci ne minimise en rien une écriture souvent maladroite quand il s’agit de poser un contexte pour le futur du show. Jamais fuite en avant n’aura autant donné l’impression de courir après le temps tout en multipliant les clins d’oeil aux fans alors que la série ne s’adresse pas vraiment à eux.