Depuis sa première saison en 2017, Castlevania n’aura cessé de gagner en qualité en gommant certains de ses défauts initiaux tout en affinant son scénario et ses personnages. Cette troisième saison se montre plus convaincante que son aînée en ayant réussi à prendre le meilleur de l’action et de la narration une fois encore renforcée par un casting vocal anglais impeccable. Récit d’une saison ayant les dents longues.
Après nous avoir présenté les Forces du Bien lors de la première saison puis celles des Ténèbres dans la deuxième, la Saison 03 suit logiquement l’un comme l’autre groupe en optant pour une narration découpée en quatre histoires se déroulant en parallèle les unes des autres. Une décision intéressante et permettant dès le départ à cette nouvelle salve d’épisodes de proposer des ambiances, lieux et intrigues différentes et complémentaires.
Puisant ses influences aussi bien dans Castlevania : Curse of Darkness que dans le folklore gothique, cette nouvelle saison marie les atmosphères en nous faisant passer d’un village recelant un bien étrange mystère au château de Dracula où Alucard entend bien découvrir, en compagnie de Taka et Sumi, ses deux récents protégés et accessoirement chasseurs de vampires, les trésors que le lieu abrite. Pendant ce temps, Isaac poursuit sa route en créant sa propre armée de démons afin de venir à bout de Carmilla et ses sœurs dont Leonore se montre sans doute le membre le plus intéressant, douce et compatissante en apparence, perverse et calculatrice dans le fond. Bien qu’on ne doute pas vraiment que tout ce beau monde se retrouvera pour le grand final, la Saison 03 s’accorde du temps pour creuser à nouveau les différents personnages à l’image de Trevor et Syphas formant un joyeux petit couple, aussi uni dans l’adversité que dans des moments de complicité saupoudrés d’humour. Evoluant à travers le village de Lindenfeld, nos deux héros ne tarderont pas à s’allier à Saint Germain, voyageur enquêtant lui aussi sur les agissements du Juge, «maire» du village et ceux de Sala, leader d’un groupe de moines dont la mission première ne semble pas des plus catholiques. Débutant de façon assez classique, l’intrigue de Lindenfeld ne tarde pas à prendre de l’ampleur en intégrant notamment un aspect inter-dimensionnel synonyme d’une séquence hallucinée plutôt réussie mélangeant animation traditionnelle et éléments 3D.
En marge de cette intrigue, cette saison n’en oublie pas pour autant d’avancer en jouant très souvent sur plusieurs tableaux afin de confronter ses protagonistes à des réflexions, des choix mais aussi et surtout des trahisons, un peu trop prévisibles il est vrai. Bien que l’histoire d’Alucard soit la plus faible, elle contribue à sa manière à affirmer la personnalité du personnage tout en nous faisant comprendre qu’on peut être un vampire séculaire ainsi qu’un grand naïf. Il n’en reste pas moins que la conclusion de son chapitre devrait avoir des répercussions intéressantes dans la Saison 04 si elles sont correctement traitées. Le forgeron Isaac de son côté ne tardera pas à faire une croix sur sa nature humaine et, telle une Daenerys en croisade, multipliera les tueries de ville en ville au nom de son « saint » objectif : se venger de Carmilla. Caution exotique de cette saison, le périple d’Isaac, débutant à Tunis, demeure également l’intrigue la plus profonde de par les questionnements qu’elle soulève, notamment autour des notions de Bien et de Mal. Occupée à se créer un petit garde-manger personnel, Carmilla, quant à elle, charge Leonore d’amadouer Hector, ancien compagnon d’Isaac et seul à même de créer une armée de monstres pour aider notre quatuor de vampires dans leurs sombres projets.
Plus dense, cette saison demeure forcément plus frustrante puisqu’il faudra attendre la prochaine pour découvrir la conclusion de certaines intrigues. Notons également que si l’animation gagne légèrement en fluidité, l’action se montre moins présente, principalement cantonnée à l’Episode 9 (le meilleur de la saison), mouvementé, comprenant quelques somptueux plans et faisant de l’intrigue d’Alucard et celle d’Hector un élégant jeu de miroirs. L’épisode 10 n’est pas en reste grâce à son impressionnant ballet sanglant entre Trevor, Sypha et une cohorte de créatures aux inspirations Lovecraftiennes, parfaitement découpé, usant de la 3D à travers certains travelings et se posant comme une superbe conclusion avant qu’une vérité morbide n’éclate. Une façon pour Castlevania de ne pas nous faire oublier qu’au delà de son statut d’adaptation, la série a réussi à s’approprier un univers afin de jongler entre grand spectacle, réflexions philosophiques et sombre atmosphère.
Conclusion
En découpant sa narration en quatre intrigues, la Saison 03 de Castlevania se montre plus efficace que la précédente. Ayant en partie gommé un certain manque de rythme, malgré sa dizaine d’épisodes, tout en ayant trouvé un bon équilibre entre horreur, humour et action (toutefois réservée aux derniers chapitres), Castlevania se montre plus que jamais une adaptation de qualité. Jouant davantage sur son aspect mystérieux tout en ayant travaillé les personnalités au sein de sa sororité de vampires, cette nouvelle saison répond à la plupart de nos attentes tout en préfigurant une quatrième et dernière saison fortement attendue.
Pensée, entre autres choses, pour concurrencer The Boys (Prime Video), Jupiter’s Legacy représente la première pierre du partenariat entre MillarWorld et Netflix, la plate-forme ayant d’ores et déjà acquis les droits de plusieurs autres comics de l’auteur Mark Millar (Kick-Ass, King’s Man, Superman Red Son). Après une réjouissante Saison 2 d’Umbrella Academy, c’est donc au tour de Jupiter’s Legacy de s’inviter au bal. Malheureusement, cette première saison comporte nombre de faux pas.
Le grand public étant de plus en plus coutumier des univers supers-héroïques, il est aujourd’hui de plus en plus difficile de se démarquer des autres productions. Délaissant le gore décomplexé de The Boys et le second degré d’Umbrella Academy, Jupiter’s Legacy choisit (sans doute à tord) un ton beaucoup plus sérieux à travers une galerie de personnages qu’on suit à travers deux époques différentes. Une idée qui a du sens afin de présenter l’univers et l’évolution de la première génération de héros sur une période assez vaste mais qui malheureusement pose plusieurs soucis.
Déjà, le rythme de la série en pâtit grandement en ne décollant jamais vraiment et en se heurtant à une construction mal pensée alternant constamment entre présent et Origin Story sous forme de flashbacks se situant dans les années 30. Prenant comme point de départ le krach boursier de 1929, ce dernier sert d’élément déclencheur à la quête de Sheldon Sampson, futur chef de file de l’Union, groupe de supers-héros dans la grande tradition des Avengers ou de la Justice League. Assailli de visions, celles-ci le mèneront vers le milieu de l’Océan Atlantique où il découvrira avec ses compagnons d’infortune, une vérité qui changera à jamais leurs destins. S’étalant sur les 8 épisodes que comporte la saison, ce passé aurait sans doute gagné à être condensé en un seul segment tant ces flashbacks perturbent l’avancée de l’histoire principale en amenant peu ou prou les mêmes dialogues d’une scène à l’autre. Le soupçon d’exotisme émanant de la traversée en bateau et de la visite d’une île évoquant celle de King Kong n’y changera pas grand chose. Cette alternance constante entre passé et présent ne fait finalement que mettre en lumière les carences d’un scénario n’ayant pas grand chose à raconter et ses nombreux personnages caricaturaux.
Il est d’ailleurs difficile d’apprécier n’importe lequel des membres de l’Union, régie par un code moral dont Utopian ne cesse de nous rappeler les préceptes toutes les dix minutes. Tu ne tueras point, tu n’interféreras pas dans les décisions politiques, ce sacerdoce sera continuellement au centre des thématiques, encore plus après que Brandon, le fils de Sheldon, ait tué un super-vilain sur le point d’anéantir l’Union au terme d’un affrontement ressemblant davantage à un fan-made friqué qu’à la conclusion supposément épique du premier épisode d’une super production. Ce problème d’écriture se retrouve d’ailleurs à travers l’ensemble des protagonistes. Lady Liberty, la femme d’Utopian, s’avère relativement effacée et principalement destinée à se retrouver entre son mari et son fils pendant que sa fille Chloe se montre à ce point destructrice qu’on nous le fera comprendre pendant les quatre premiers épisodes où dépravation et drogue formeront son quotidien. Walter, frère de Sheldon, réglera quant à lui, en l’espace de quelques secondes, ses querelles fraternelles afin d’obtenir ses pouvoirs lors d’un ultime flashback aussi expédié que peu convaincant.
Inutilement bavarde, bien trop lente malgré des épisodes oscillant entre 39 minutes et une heure, Jupiter’s Legacy ne parvient pas non plus à convaincre en terme de vfx, souvent disgracieux, ses maquillages pas toujours très heureux ou ses scènes d’action aux fonds verts trop apparents et dénotant d’un cruel manque de dynamisme. La galerie de héros ne forçant jamais l’empathie, à cause d’un jeu d’acteurs très souvent discutable, on a bien du mal à se passionner pour ces derniers tant ils évoluent tels des fantômes à l’intérieur de cette première saison manquant cruellement d’enjeux, de retournements voire tout simplement d’intérêt malgré un cliffhanger annonçant une suite plus intéressante.
Conclusion
Avec son Origin Story prenant trop d’importance au sein de la saison, cette dernière n’arrive jamais à avancer comme elle l’aurait dû, parasitée par d’innombrables flashbacks impactant directement son rythme. N’ayant finalement pas grand chose à raconter, Jupiter’s Legacy tourne en rond pendant 8 épisodes en répétant inlassablement la même rengaine à travers une galerie de personnages très caricaturaux, une action mollassonne jamais aidée par des effets spéciaux peu convaincants ou un design global inesthétique. La série se laisse toutefois suivre distraitement jusqu’à son cliffhanger annonçant une Saison 2 plus sombre mais a-t-on seulement envie de la suivre jusque là ?
Resident Evil est prisonnier de son succès. Le constat est sans détours et démontre à quel point il est difficile de se renouveler, surtout actuellement alors que les coûts de développement d’un jeu ne cessent de grimper en flèche. Alors que Village aurait pu marquer une cassure, du moins mythologique, avec les autres épisodes, c’est plutôt le contraire qui se produit, malgré ce qu’évoque le magnifique opening du jeu, sorte de conte macabre animé dans la grande tradition du stop motion et fortement inspiré par l’univers de Tim Burton. Ce nouveau volet est-il mauvais pour autant ? Du tout mais il permet une analyse intéressante de la franchise plus que jamais désireuse de brosser le fan dans le sens du poil tout en essayant d’évoluer timidement sur différents aspects.
A l’annonce de Village, les rumeurs vont bon train. Les zombies se feraient fait la malle et seraient remplacés par des loups-garous et des vampires. Stupeur chez certains fans, excitation chez d’autres, la nouvelle a au moins le mérite de surprendre tout le monde tant la saga fait du surplace depuis des années en piochant allégrement dans différents types de virus, modifiés ou non par la société Umbrella. Le postulat de départ de Village est donc aguicheur pour qui aimerait un peu de sang neuf.Prolongement de Resident Evil VII, ce nouvel opus en reprend la vue subjective et son héros, Ethan Winters. S’ouvrant sur une introduction évoquant celle de Resident Evil 3 Remake (ou, au choix, Uncharted 4) en nous plongeant dans le quotidien d’Ethan, de sa femme Mia et leur fille, Rose, les premières minutes nous permettent de déambuler dans la maison familiale. Ce sera l’occasion de découvrir quelques bribes du récent passé d’Ethan à travers photos, objets et autres documents pour sacraliser sa nouvelle vie depuis la tragédie de la famille Baker.
Une dispute éclate alors entre Ethan et Mia afin de nous signaler que le couple n’est peut être pas si heureux que ça. C’est ce moment que choisit le réalisateur Morimasa Sato pour accélérer les choses via l’arrivée tonitruante de Chris Redfield qui, sans aucune explication, kidnappe Rose et fait prisonnier Ethan. A partir de là, les événements s’enchaînent à un rythme effréné. Accident du camion transportant Ethan, petite promenade nocturne dans une forêt peu accueillante et arrivée dans le village ne disposant même pas d’un seul Airbnb. L’horreur à l’état pur !
Village sans people
Les premiers instants dans le village donnent le La de la partition à venir autant dans le ton du jeu que sa structure calquée sur celle de Resident Evil VII. La visite des premières bâtisses mais aussi et surtout la rencontre avec les premiers villageois témoigne d’une ambiance sectaire offrant au jeu une tonalité aussi glauque que bienvenue. Photos d’une mystérieuse prophète, offrandes, animaux sacrifiés, l’ambiance culmine lors d’une efficace séance de prière avant de tomber, malheureusement , dans quelque chose de beaucoup plus convenu.
C’est sans doute l’un des principaux problèmes de Village qui semble rapidement baisser les bras dans son ambition initiale de proposer autre chose en préférant partir sur des sentiers balisés jusqu’à s’inspirer continuellement de Resident Evil 4, de son aspect rural à son action omniprésente. Ainsi, l’aspect «folk horror» du début ne débouche sur rien, les villageois étant rapidement décimés et totalement mis de côté pour céder leur place à des ribambelles de créatures. Décevant tant il y avait matière à jouer sur ce tableau en offrant à Village ce retour à l’horreur, brillamment initiée lors des premiers actes de Resident Evil VII, à travers des emprunts constants au slasher, ou le premier The Evil Within, véritable déclinaison Survival de RE4, tous les deux orchestrés par Shinji Mikami.
Kill me if you can
Resident Evil Village officie plutôt dans l’horreur gothique, de par le lieu de son action, les créatures mentionnées quelques lignes plus haut mais aussi certains personnages à l’image de la très médiatisée Lady Dimitrescu. On se demande d’ailleurs si Capcom n’a pas été pris de cours par les réactions de fans tant la damoiselle, importante dans la communication du jeu, est loin d’être aussi centrale qu’on aurait pu le penser dans l’histoire. Cet épisode propose donc à l’image du VII une imagerie très marquée mais qui prend rapidement l’effet d’une skin de luxe. Les lycans remplacent au pied levé les zombies (dans leur nombre conséquent mais aussi certains patterns) et les autres monstres, qu’ils soient gargouilles, «morts-vivants» armés d’épées ou abominations bio-mécaniques, n’arrivent pas à générer autant de frissons qu’un Hunter ou qu’un Licker.
Sato tente bien de reproduire la formule Mikami à l’aide de séquences guidées par la possibilité de se barricader dans des maisons pour accentuer le côté anxiogène mais n’y parvient que rarement, la faute à un épisode plus ouvert nous permettant de prendre plus facilement la tangente pour recharger et se reposer avant de repartir à l’assaut. Pour palier à cet état de faits, Village multiplie les affrontements faisant de cet opus l’un des plus «action» qui soit sans pour autant verser dans une difficulté excessive, bien au contraire, du moins en Normal. Il est d’ailleurs amusant de constater qu’autant dans son orientation que son écriture, le titre fleure bon l’actioner des années 80. Certaines répliques de Chris renvoient aux Stallone de la grande époque, le nombre de pétoires disponibles ferait rougir d’envie le réal de Commando et le scénario alterne avec une précision de métronome entre gunfights (parfois bien trop longs) contre des hordes de créatures, rencontres avec des monstres Alpha (plus grands, plus forts et souvent de gros sacs à PV) et combats de boss.
Who is the boss ?
Ironiquement, alors que le jeu permet de visiter plusieurs zones disparates, réparties autour du hub central qu’est le village, la notion de semi-liberté n’est finalement qu’illusion. Nous sommes à nouveau sur des rails et il n’est jamais possible d’aller à un endroit avant un autre, pour des besoins scénaristiques, aussi maigres soient-ils. En soi, ce n’est pas véritablement un problème d’autant que chaque lieu (associé à un l’un des 4 lieutenants de Miranda, la grande Méchante de cet épisode) correspond à un environnement différent à commencer par le somptueux château de départ. On notera à ce sujet que tout superbe soit-il, autant dans ses extérieurs enneigés que ses intérieurs sublimés par de très beaux éclairages, on a davantage le sentiment de visiter un immense manoir, l’impression de gigantisme n’étant jamais aussi efficace que dans la forteresse de Resident Evil 4. Saupoudrée de classiques énigmes et d’action, la visite n’en reste pas moins agréable bien que Lady Dimitrescu ne s’avère ni plus ni moins qu’une sorte de Némésis nous poursuivant jusqu’à l’inévitable affrontement final, assez décevant soit dit en passant. La méthode est éprouvée sauf qu’ici, les trois filles de Dimitrescu ont la même fonction. Un peu usant au bout du compte et mettant en avant certaines mécaniques de jeu pour les éliminer peu raccord avec le lore vampirique dont le titre s’inspire.
A mesure que l’impression de déjà-vu se fait de plus en plus ressentir dans les décors traversés ou certains adversaires à l’image de ces géants armés d’une hache renvoyant ici aussi à Resident Evil 4, Village opère un virage inattendu en se délivrant de ses chaînes le temps d’un niveau bien plus sombre qu’à l’accoutumée. Cette parenthèse, aux inspirations évidentes allant de Silent Hill à Outlast en passant par P.T. ou The Ring, s’avère très rafraîchissante bien que les ficelles ne soient pas originales. Pourtant, cela fonctionne parfaitement et permet au titre de trouver un second souffle. On regrettera que le reste de l’aventure ne suive pas le même chemin. Au contraire, on revient à une progression plus commune ponctuée de combats dans des arènes fermées se soldant la plupart du temps par la présence d’un adversaire plus puissant. Même les boss n’y échappent pas. Non pas qu’ils soient mauvais, certains se permettant même d’être plus originaux que d’autres (dans le bon ou mauvais sens du terme, c’est selon), mais la surprise n’est que rarement au rendez-vous.
Chasse et pêche
Quoi qu’il en soit, le plaisir de la découverte est bel et bien là et pas une seule fois, je n’ai eu envie de lâcher le jeu durant les 12 heures qu’il m’a fallu pour le terminer. Néanmoins, il est dommage que cet opus ait quelque peu sacrifié son ambiance sur l’autel d’une gamification parfois hors propos. On citera les nombreux trésors à dénicher dans tout le village pour obtenir des objets à revendre ou bien encore les animaux (poulets, cochons, poissons…) à tuer pour ramener leur chair au marchand afin d’avoir des buffs permanents. Cette sorte d’héritage de Monster Hunter s’avère aussi pratique (dès le mode Hard), pour gagner en résistance, qu’étrange tant elle démontre à quel point les développeurs ont d’abord pensé l’évolution de leur série en terme de gameplay plutôt que de scénario. Le marchand par exemple, nous fait comprendre qu’il n’est pas ce qu’il semble être, mais jamais nous n’avons de réponse quant à sa véritable implication dans l’histoire, le personnage étant ici aussi principalement vu comme un élément de gameplay plutôt qu’un véritable protagoniste à l’image de celui de RE4, simple boutique à forme humaine. Certes, Resident Evil n’a jamais vraiment brillé par son histoire mais la frustration reste bel et bien présente, surtout avec ce segment formant un diptyque autour d’Ethan mais se sentant obligé de raccrocher les wagons avec la série principale dans les toutes dernières minutes de façon pour le moins maladroite.
Toujours est-il que si le Duc (le petit nom dudit marchand) n’a finalement pas vocation à servir le scénario plus que ça, il conserve son intérêt puisque c’est lui qui vous fournira armes (et leurs upgrades), munitions (et schémas pour les confectionner vous-même) en plus de vous faire la popote pour créer les buffs dont je parlais tantôt. Comme je le précisais, l’action occupe plus que jamais une place de choix dans Village, au sens propre comme au sens figuré. En effet, outre les nombreux guns que vous pourrez acheter, vous aurez aussi à gérer votre inventaire (énième héritage de RE4) uniquement dédié à vos flingues et vos flacons de santé qu’il sera également possible de crafter en récupérant ici et là divers matériaux. En somme, tous les autres objets à ramasser (cristaux, trésors, matériaux) seront rangés dans d’autres slots ne requérant aucune gestion de votre part. Difficile d’être plus clair sur ce qui importe le plus dans Village.
En route VR le End Game
Le End Game du titre ne dévie pas non plus de cette voie en nous proposant en bonus le retour du mode Mercenaires datant de Resident Evil 3. Une excellente initiative d’autant que la vue FPS est plus adaptée à ce type de défi en permettant de mieux repérer ses adversaires et d’être bien plus réactif. Le concept ne change guère et vous demandera à nouveau d’éliminer le plus d’ennemis possibles en un temps limité en récupérant munitions et upgrades (de force, défense, dégâts) répartis sur la surface de jeu et ce à travers diverses cartes basées sur des environnements de l’aventure principale. Dommage, d’ailleurs, qu’il n’y ait aucune map véritablement originale. On regrettera également que Village n’offre aucune expérience VR, à l’inverse de Resident Evil VII, quel que soit le support. Bizarre tant le résultat s’était montré probant avec le jeu susnommé.
Cependant, le plus beau cadeau provient du making of de l’introduction animée, l’une des plus belles ouvertures de l’histoire de la saga, et des innombrables galeries à débloquer. Sur ce point, on ne peut que féliciter Capcom d’autant que chaque artwork s’accompagne d’une description sur la conception de tel décor, telle créature. Cerise sur la gâteau, vous aurez droit dès le départ, à un bonus similaire concernant Resident Evil VII avec pas moins d’une centaine d’artworks à disposition ainsi qu’un descriptif complet de l’aventure. Une bien belle initiative dont devraient s’inspirer la plupart des studios.
Conclusion
Malgré le riche potentiel lié à son univers, Resident Village s’enferme dans une construction très classique sans jamais vraiment chercher à en sortir. Visuellement superbe, très plaisant à parcourir, il lui manque néanmoins cette once de folie, d’originalité qui seyait à Resident Evil 4, l’une de ses références majeures, pour espérer autant marquer que son modèle ou même Resident Evil VII qui digérait bien mieux ses influences cinématographiques et vidéoludiques et proposait qui plus est l’expérience entière en VR, ici absente. Aussi subtil qu’un film d’action des eighties, ce nouvel épisode n’en reste pas moins difficile à lâcher une fois qu’on l’a débuté. Aucune raison de le bouder même si il démontre à son tour que la série aurait sans doute besoin de s’affranchir de ses aînés pour aller véritablement de l’avant.
Alors qu’il n’a pas encore la renommée qu’il connaîtra en 2007 avec The Walking Dead, Robert kirkman nous offre une œuvre trash, excitante et profonde 5 ans auparavant. C’est en 2002 que sort le premier volume d’Invincible, sorte de déclinaison trash de Superman proposant moult débordements gores bien avant le comics de The Boys qui n’arrivera qu’en 2006. En 2019, nous arrive l’adaptation du comics de Garth Ennis qui connaît un succès autant public que critique. Irrévérencieux, violent et prenant le meilleur de la BD tout en modifiant quantité de détails, le show d’Eric Kripke est logiquement reconduit pour une deuxième puis troisième saison. Réfléchissant en parallèle à une sorte de pendant animé aux débordements gores de The Boys, Amazon lance la production d’Invincible en 2018 qui arrive sur la plate-forme trois ans plus tard. Une attente qui en valait largement la chandelle.
Avant d’être une fable s’étalant jusqu’au fin fond du cosmos, Invincible traite de l’adolescence, du douloureux passage à l’âge adulte et de ce que cela implique de décisions et de désillusions. Mark Grayson, jeune lycéen en sait quelque chose en tant que fils d’Omni-Man, le plus puissant des super-héros ayant débarqué sur Terre il y a de nombreuses années. Ayant tardivement acquis les mêmes capacités que son paternel, il devient du jour au lendemain un justicier en prenant le nom d’Invincible, ce qui nous donne d’entrée de jeu une idée de l’étendue de ses pouvoirs. Le jeune homme va alors devoir conjuguer vie amoureuse, études et son nouveau «job». Invincible alterne avec une étonnante fluidité entre le quotidien de tout adolescent et l’ampleur de la tâche qui attend Mark. A travers 8 épisodes d’une durée de 45 minutes, la série prend son temps pour développer ses personnages tout en y intégrant d’incroyables scènes d’action, bluffantes et d’une brutalité sans nom. La mise en scène compense ainsi une animation qui n’est pas toujours à la hauteur et le scénario fait le reste.
Le premier épisode par exemple se ponctue de façon inattendue voire choquante en faisant des actes d’Omni-Man un passionnant fil de rouge qui, on vous rassure, trouvera une explication (elle aussi tétanisante) dans le dernier épisode. La force de la série vient donc de sa propension à ne jamais oublier d’entretenir le mystère tout en faisant évoluer ses héros à commencer par Mark qui très rapidement sera confronté à de douloureuses prises de conscience en comprenant que malgré ses immenses pouvoirs, il ne peut sauver la Terre entière.
Sans jamais dévier de sa vision initiale, Invincible ajoute également une dynamique de groupe en construisant autour des compagnons de Mark des intrigues parallèles, pas toujours au niveau les unes des autres mais densifiant un peu plus l’histoire.
C’est aussi dans son ultra violence et son côté outrageusement gore que la série trouve son identité. Hollywoodiennes dans l’âme, les scènes d’action ne lésinent jamais sur les membres arrachés et les explosions (de véhicules, bâtiments mais aussi d’organes) tout en déployant une énergie folle. Chaque coup porté fait mal et qu’on soit Invincible ou non, la défaite n’est jamais loin si on n’y prend pas garde. C’est aussi en cela que la série est intéressante car si la base renvoie à moult sagas DC (Superman, Teen Titans), Kirkman malmène ses personnages en les confrontant à des sentiments et leur opposé : le courage et le doute, l’amour et la trahison, l’unité et l’individualisme. Invincible devient dès lors beaucoup plus qu’une simple série de supers-héros bien que ces derniers assurent continuellement le spectacle. Pour autant, le tout ne se prend pas au sérieux et distille plusieurs traits d’humour pour mieux rebondir sur une énucléation quelques minutes plus tard afin de surprendre le spectateur.
Nantie d’une réalisation efficace et parfois très inspirée (la scène du métro de l’épisode 8), l’adaptation d’Amazon prend également quelques distances avec le comics, à l’image de ce qui avait fait pour The Boys. Une sage décision car sans trahir le matériau original, elle le modifie intelligemment afin de pouvoir étonner les fans de la première heure. L’une des nombreuses qualités de la série dont deux autres saisons ont d’ores et déjà été commandées pour notre plus grand plaisir.
Conclusion
Époustouflante de son premier à son dernier épisode, Invincible culmine aussi bien dans ses scènes d’action anthologiques que dans ses dialogues à l’intérieur de la sphère familiale. Prenant soin de développer habilement ses intrigues tout en offrant des affrontements percutants, cette première saison est une totale réussite si l’on excepte une animation manquant souvent de fluidité ou des intrigues secondaires pas toujours au niveau. Un détail tant le plaisir de la découverte est là grâce à une incroyable galerie de personnages et un ton résolument adulte malgré son héros adolescent.
Dire que Yasuke était attendu tient de l’euphémisme. Fruit de la collaboration entre Netflix et le studio MAPPA (L’Attaque des Titans, Jujutsu Kaisen), cette série revient sur l’histoire, peu connue, de Yasuke, esclave africain ayant vécu au XVIe siècle. N’usant que de quelques éléments historiques, le réalisateur LeSean Thomas ancre sa série dans une sorte de Japon techno-féodal où guerriers usant de magie côtoient créatures démoniaques et autres mechas. Un parti pris original qui ne parvient malheureusement jamais à convaincre.
Marier Japon ancestral et fantastique est pour le moins courant dans le monde l’animation japonaise. Sorti en 1993, Ninja Scroll, le chef-d’oeuvre de Yoshiaki Kawajiri, faisant encore référence en la matière sera suivi par quantité d’œuvres de qualité, de Basilisk à Samouraï Deeper Kyo en passant par le très barré mais fort réjouissant Batman Ninja. Toutefois, l’idée de s’arrêter sur la vie de Yasuke aurait sans doute gagnée à être traitée de façon plus conventionnelle en se rapprochant davantage d’un Sword of the Stranger, afin de nous faire découvrir ce personnage. LeSean Thomas en a décidé autrement, entre autres pour palier au manque de matière narrative liée au peu d’informations qu’on connaît sur le samouraï. Toujours est-il que la transition entre historique et fantastique a du mal à passer d’autant que l’anime opte pour une construction à base de flash-backs nous renvoyant au passé de Yasuke (et sa rencontre avec Nobunaga) pour mieux revenir au présent afin de poursuivre une histoire manquant clairement d’enjeux.
Guère aidé par le court format (6 épisodes), Yasuke tente tant bien que mal de nous faire vibrer pour ce personnage aussi réservé que sabreur hors pair, en lui jetant en pâture une galerie de mercenaires et autres démons. Le problème est que dès son premier épisode, le scénario montre des signes évidents de faiblesse, du récit peut intéressant et extrêmement classique à ses personnages secondaires plus fades les uns que les autres. Les adversaires de Yasuke ne valent pas mieux tant ils manquent d’épaisseur et de charisme. A peine digne de la galerie de méchants de L’Homme aux poings de fer, à laquelle on rajoutera une sorte d’ancêtre de Bumblebee, les bad-guys dévoilent trop rapidement leurs cartes en usant dès le premier épisode de l’ensemble de leurs pouvoirs à travers un affrontement toutefois très impressionnant et parfaitement mis en scène.
Bien entendu, la vraie menace à venir ne tardera pas à faire surface mais ici aussi, rien que nous n’ayons jamais vu, l’ambition de la Daiymo locale étant qui plus est terriblement commun. Dès lors, difficile de s’immerger pleinement dans cet univers sous-exploité bien qu’harmonieusement dépeints via plusieurs paysages, Thomas étant a priori plus occupé à intégrer des mechas (provenant des invasions Mongoles) sur ses champs de bataille qu’à développer Yasuke condamné à ne jamais sortir de sa condition de guerrier monolithique hanté par son passé et son ancienne compagnonne d’armes Natsumaru.
De son côté, le studio MAPPA a fait du bon boulot, notamment lors des affrontements, tout en sublimant forêts et campagne japonaise via de très beaux panoramas mis en valeur par les compositions de Flying Lotus. Malheureusement, rien n’y fait, le format de la série est synonyme d’un énorme manque de dramatisation et ne parvient jamais à mettre en valeur héros comme ennemis de par une caractérisation, ces derniers étant simplement voués à servir de chair à canon. Les passes d’armes en pâtissent énormément au point qu’aucune d’entre elles ne marque vraiment à l’image de l’ensemble de l’anime ne pouvant tenir la comparaison avec Samuraï Champloo ou Afro Samuraï.
Conclusion
Malgré une animation de qualité, Yasuke accuse le coup sur quasiment tous les aspects. Scénario inexistant, galerie de personnages manquant d’épaisseur, absence de véritables enjeux, événements se précipitant sans une once de dramatisation, rien ne sauve vraiment la série de Netflix à l’exception de quelques séquences parfaitement chorégraphiées et animées. C’est bien peu compte tenu du potentiel qu’offrait le samouraï.
Alors que la série Dragon Quest continue d’être adaptée, notamment en mangas, Dragon Quest : La Quête de Daï garde une place particulière dans le coeur des fans, bien qu’elle soit très librement inspirée du jeu d’Enix. Sortie en 1989 au Japon, cette adaptation (qui arrivera chez nous, grâce aux éditions J’ai Lu, en 2001, sous le nom de Fly puis rééditée par Tonkam en 2007) s’arrêtera avec son 37ème tome en 1996. Après une première série animée inachevée (et ayant eu le droit aux honneurs d’une diffusion au Club Dorothée), il aura fallu attendre 28 ans pour voir arriver une toute nouvelle adaptation. Disponible sur ADN et Crunchyroll depuis octobre 2020, cette série s’avère être une excellente surprise et il nous a semblé judicieux de vous expliquer pourquoi il faut absolument la découvrir sans attendre.
Les raisons de l’arrêt brutal de la première série animée
Comme c’est souvent le cas au Japon, dès qu’un manga acquière suffisamment de succès, son adaptation animée ne tarde pas à pointer le bout de son celluloïd. Celle de Dragon Quest, produite par la Toei Animation, débarque le 17 octobre 1991 sur la chaîne TBS. Moins d’un an après, en septembre 1992, elle s’arrêtera après avoir seulement couvert les 10 premiers volumes du manga. Etait-ce dû à un manque d’audience ? Du tout et si diverses rumeurs parlent du fait que les auteurs Riku Sanjō et Kōji Inada n’étaient pas très satisfaits de l’anime, ce dernier fonctionne pourtant très bien.
Notons que trois films d’animation seront d’ailleurs produits entre 1991 et 1992. Bref, tout roule pour cette série sauf que ses sponsors quittent brusquement le navire et sans eux, il est malheureusement hors de question de poursuivre. Sachant que ce sont ces derniers qui financent les animes au Japon, si ils décident de lever le camp du jour au lendemain, la sanction est sans appel. Etonnant d’autant que plusieurs produits dérivés verront bien le jour comme vous pouvez le vérifier sur cette vidéo de collectionneur.
Une nouvelle adaptation qui va droit au but
Outre le fait de toucher un nouveau public tout en profitant des technologies d’animation actuelles, cette nouvelle adaptation permettra également aux orphelins de la première série de voir l’intégralité du manga. N’y allons pas par quatre chemins, après 21 épisodes, le charme opère pleinement et ce grâce à un rythme plus maîtrisé, un design réussi et une épopée qui fonctionne toujours autant malgré une base très classique.
La Quête de Daï ressemble à s’y méprendre à quantité de Shonen avec son histoire débutant de façon convenue. Celle-ci fait intervenir un jeune garçon du nom de Daï vivant tranquillement, reclus sur une île, entouré de monstres gentils (non, rien à voir avec qui vous savez). Il ne tardera pas à se découvrir un destin bien plus ambitieux et avec l’aide de nouveaux alliés, à partir en guerre contre les Forces du Mal menées par Vearn, l’Empereur du Mal, épaulé par ses légions commandées par Hadlar.
S’articulant autour des grands préceptes régulant le genre depuis des années (le courage, le dépassement de soi, l’amitié…), La Quête de Daï profite pourtant d’une évolution de ses personnages parfaitement équilibrée en ne faisant jamais de Pop et Maam de simples faire-valoir de Daï. Ils formeront au contraire une équipe soudée tout au long de l’aventure et chacun d’entre-eux gagnera en puissance mais aussi en sagesse à travers, notamment, un changement de classe pour Maam, dans la plus pure tradition des RPG. Enfin, l’intégration de deux anciens ennemis (Crocodine et Hyunckel) apportera un élan d’éclectisme à l’ensemble tout en permettant d’ajouter des personnalités très différentes au petit groupe de base.
On retrouve bien entendu toutes ces caractéristiques dans la nouvelle série, une fois encore produite par la Toei. Sur la question de l’intégration d’éléments 3D, nous n’atteignons pas le niveau qualitatif de certaines séries récentes mais n’oublions pas qu’on parle ici d’un anime qui devrait adapter les 37 tomes via un nombre conséquent d’épisodes s’enchaînant à raison d’un par semaine. Pour l’heure, l’animation s’avère donc plutôt homogène, les monstres en 3D s’intègrent bien à l’ensemble et les mouvements de caméra profitent également de cette technologie pour apporter un élan de dynamisme lors de certaines passes d’armes.
On appréciera également que cette nouvelle série aille encore plus à l’essentiel en évitant le piège de l’étirement. N’étant pas soumise au rythme de parution du manga, l’histoire va vite (à l’image d’un Dragon Ball Z Kaï) et ceci se ressent d’épisode en épisode grâce à plus de vitalité, d’énergie et d’intérêt. Les puristes reprocheront peut être certains manques par rapport au manga mais rien de vraiment notable ou crucial. A titre de comparaison, l’Episode 20 de la nouvelle série voit la défaite de Flazzard là où dans la première, cet événement n’intervenait que lors de l’Episode 37. Ce constat est d’ailleurs similaire jusqu’à la fin de l’anime qui adapte l’entièreté de l’œuvre originale en 100 épisodes. Dès lors, quel plaisir d’apprécier à sa juste valeur le dernier acte de la série enchainant les passages cultes, les rebondissements (autour de Vearn et Myst Vearn notamment) se succédant à un rythme effréné, les scènes d’action devenant de plus en plus folles. N’oublions pas également l’excellente évolution des personnages à commencer par Popp qui, jusqu’au bout, sera l’ami sur lequel Daï pourra se reposeret qui gagnera en maturité, en puissance et en assurance. Vous aurez donc compris que cette adaptation est bien celle qu’on était en droit d’attendre et que sa qualité rend amplement mérite au manga de Riku Sanjo et Koji Inada. Une oeuvre inespérée après tant d’attente et qui au delà de son statut de remake se montre avant tout respectueuse du matériau de base en permettant à ses personnages de nous faire à nouveau rêver à travers ces moments épiques mélangeant grands sentiments et force de caractère.
Conclusion
Cette adaptation 2020 de Dragon Quest : La Quête de Daï réussit donc haut la main son pari et si les plus jeunes pourront peut être la trouver trop conventionnelle, il n’en reste pas moins qu’au-delà de la bouffée de nostalgie générée par ce reboot, l’exercice de style est parfaitement orchestré. 32 ans après la parution du premier volume du manga, cette aventure parvient à générer autant d’émotions en démontrant à quel point ses auteurs avaient parfaitement su saisir l’essence même du RPG d’Enix tout en conjuguant le meilleur du shonen et de la Fantasy made in Japan. Une raison de plus pour découvrir cette œuvre culte !
Rien ne prédisposait véritablement Dragon’s Dogma, Action-RPG de Capcom sorti en 2012, à être adapté par Netflix. Pour autant, c’est en septembre dernier que cette série est arrivée sur la plate-forme de SVOD en se présentant comme une sorte de palliatif à la dernière adaptation de Berserk à laquelle elle emprunte un univers de Dark Fantasy et une animation 3D.
S’étalant sur sept épisodes, chacun étant associé à l’un des Péchés capitaux, Dragon’s Dogma nous livre un court récit centré autour de la vengeance. Se reposant sur l’univers et le scénario du jeu, auquel elle emprunte d’ailleurs son compositeur, Tadayoshi Makino, la série fait sans doute l’erreur d’adapter de façon trop clinique le scénario du jeu sans en expliquer les contours. En effet, là où le jeu pouvait se reposer sur sa durée de vie pour étoffer son histoire (qui n’était d’ailleurs pas son point fort), le show de Netflix va vite, très vite, trop vite. Ainsi, à peine a-t-on le temps de découvrir Ethan, le protagoniste principal, que ce dernier vit une tragédie orchestrée par un dragon qui lui vole son cœur. Ethan n’aura alors d’autre choix que de retrouver la créature pour récupérer son dû.
Il rencontre rapidement Hannah, un Pion dont on ne connaîtra finalement pas grand chose et destinée à l’aider dans sa quête. Élément central du titre de Capcom, Hannah n’est finalement que le reflet des NPC du jeu et se révèle sans âme et manquant cruellement d’épaisseur. Sorte de guerrière renvoyant, dans son design, à la Claire de Claymore, le personnage ne dévie jamais de sa tâche et se retrouve donc prisonnière de son équivalent de pixels qui n’était finalement là que comme soutien du joueur. Un problème pour une série aussi courte et recelant très peu de personnages.
Difficile dans ce cas de créer une véritable empathie pour ce couple destiné à évoluer d’épisode en épisode, tels deux fantômes et ce malgré les péripéties qu’ils vivront.
Shinya Sugai (animateur sur diverses séries dont la magnifique Seirei No Moribito) aura alors à cœur de compenser ce manque de matière narrative par un mélange de gore, d’érotisme ou d’action faisant intervenir Ogre, Liche et autre Griffon. Le problème est que le tout s’enferme de lui-même dans un classicisme à travers des situations maintes fois vues et revues et qu’il est difficile de développer une histoire différente et intéressante à chaque épisode d’une vingtaine de minutes en définissant des tenants et des aboutissants qui se tiennent. Logique donc que la construction des chapitres soit calquée sur un seul modèle présentant enjeux et nouveaux protagonistes puis s’articulant autour d’un affrontement contre un monstre avant de déboucher sur une conclusion liée à un péché.
Malheureusement, bien que le rendu cel-shadé des personnages soit très réussi et que certains passages s’avèrent assez bluffants (l’affrontement contre l’Hydre) voire supérieurs à la plupart des scènes d’action de Berserk, notamment grâce à des cadrages dynamiques, le rendu global est assez inégal, avec des mouvements manquant parfois de fluidité ou des créatures s’intégrant très mal aux décors. On regrettera à ce titre que Sugai Shinya (Ghost in the Shell: Stand Alone Complex: Tachikomatic Days, la série Shikizakura), pourtant spécialiste de l’animation 3D, ait sciemment opté pour un rendu différent entre humains et monstres, ceci conférant à la série une identité manquant d’homogénéité ne lui permettant malheureusement pas de se hisser au niveau de ses concurrentes.
Conclusion
En ne pouvant s’appuyer sur une histoire suffisamment forte, à des lieux de celle de l’oeuvre de Kentaro Miura, Dragon’s Dogma loupe un peu le coche, et ce, jusque dans son final synonyme d’une morale très convenue. Sans être désagréable à suivre, entre autres grâce à son format court, la série de Shinya Sugai n’a simplement pas les moyens de se détacher suffisamment du lot. Reste une adaptation qui paradoxalement s’avère trop fidèle au jeu dont les carences scénaristiques s’avèrent encore plus problématiques dans le cadre d’une série d’animation.
Sorti initialement en 2018 au Japon pour fêter les 15 ans du survival-horror Forbidden Siren, le manga Siren Rebirth nous arrive aujourd’hui grâce à Mana Books. Se revendiquant de l’influence J-Horror, ce premier tome se complaît ainsi dans une ambiance macabre et étrange en évoquant pêle-mêle, Ring, Noroi : The Curse ou le récent Howling Village de Takashi Shimizu (Ju-On).
D’entrée de jeu, ce manga, composé de 8 tomes, reste donc relativement classique de par son pitch évoquant ses emprunts au cinéma de genre et bien entendu au jeu de SCE Japan Studio : 27 ans après le glissement de terrain ayant entraîné la disparition supposée du village d’Hanuda, la rumeur court que cet événement étrange cacherait en réalité une tuerie de masse et que ce village isolé serait victime d’une malédiction. Passionné par les légendes urbaines, Kyoya Suda décide d’enquêter sur cette histoire et se rend sur place.
Comme on peut le voir, tous les composants du récit horrifique sont là et ce n’est donc pas dans sa structure ou même ce qu’il raconte que ce premier volume vous étonnera. D’autant plus vrai qu’il reprend la plupart des éléments du jeu à commencer par divers personnages dont Kei Makino et Shiro Miyata. Cependant, si le scénario de Tsutomu Sakai semble un peu trop classique pour le moment, le trait de Yukai Asada (actuellement sur une adaptation de Sengoku Basara) apporte au récit une bonne atmosphère générale, que ce soit dans les scènes choc, celles plus centrées sur l’ambiance ou la représentation de la folie, notamment, grâce à des yeux très expressifs évoquant parfois le trait de Gou Tanabe. A ce titre, on sera d’ailleurs un peu étonné que le héros arbore des expressions évoquant l’aliénation qui ne sont pas toujours raccord avec ses réflexions du moment. Difficile de dire si ceci tient au chara design ou à la personnalité de Kyoya que le mangaka souhaite mettre en avant.
Toujours est-il que ce premier tome se lit sans déplaisir même s’il se montre très avare en dialogues, Sakai et Asada préférant s’attarder sur les rues désertes du village, les découvertes macabres ou certains personnages afin de dépeindre l’ambiance globale de leur histoire. Le tout fonctionne plutôt bien d’autant qu’on découvre rapidement que Kyoya est doté de La Vision, capacité lui permettant de voir à travers les yeux des créatures. Si le procédé était génial et central dans le jeu, il devient ici un simple gimmick au détour d’une scène d’action. Il faudra donc attendre de voir les prochains volumes pour savoir si ce pouvoir sera utilisé de manière plus judicieuse. De même, il nous tarde de voir comment les auteurs s’en sortiront pour dynamiser cette histoire jouant sur deux temporalités et tournant autour de cérémonies impies et de deux jumeaux que tout semble opposer. Pour l’heure, cette introduction reste donc relativement efficace, et ce, malgré un empressement dans les situations s’enchaînant rapidement et ne permettant pas toujours de créer une empathie suffisante pour le héros ou les autres personnages de l’aventure.
Précisons enfin que si l’univers de la série vous intéresse, ce premier volume propose une interview croisée entre Nobuaki Mitsuda (interprète de Kei Makino et Shiro Miyata) et le scénariste de la série Naoko Sato, recelant diverses anecdotes, notamment sur la difficulté extrêmement élevée du jeu.
Alors que l’avant-dernier tome d’Outlaw Players prenait son temps pour faire avancer l’intrigue, aussi bien à l’intérieur de Thera que dans le monde réel, ce volume est placé sous le signe de l’action à travers plusieurs affrontements mettant en vedette ennemis comme alliés. Shonen se fait à nouveau plaisir et brasse de multiples références au jeu vidéo et au cinéma tout en mettant en avant un somptueux chara design ne parvenant malheureusement pas à masquer certains défauts de l’oeuvre.
Débutant sur les chapeaux, le Login 44 met rapidement aux prises Lena, la Chevalière de l’Ordre protégeant le roi Eidgar II, avec Belith. L’occasion de profiter de quelques planches absolument magnifiques profitant d’un design peaufiné à l’extrême. On remarquera à ce sujet l’influence manifeste de Valkyrie Profile concernant l’armure de Lena, ce qui n’est pas pour nous déplaire tout en s’inscrivant parfaitement dans l’univers de Outlaw Players. Toutefois, bien que Shonen excelle dans les doubles planches mettant en avant ses protagonistes, on pourra déplorer un manque de punch dans les combats à proprement parler, en terme de sensation de vitesse lorsque les adversaires fondent sur leurs proies ou même dans la puissance de leurs coups pas toujours très bien retranscrites. Cet état de faits est cependant moins vrai pour le second affrontement de ce tome, entre Daihknov, Leeban et Taargis, très bien découpé et synonyme de quelques planches savoureuses.
En marge de l’action, l’auteur nous renseigne malgré tout sur le sort de Sakuu et de sa bande de retour dans le petit village de Ztem devenu une gigantesque cité après que Sakuu y ait massivement investi. Ce passage est l’occasion pour Shonen de revenir sur l’aspect évolutif des jeux qu’on traverse ou bien encore l’un des traits des joueurs dépensant (virtuellement ou de manière bien réelle) dans des objets semblant de prime abord avoir un réel intérêt, mais pouvant se révéler rapidement inutiles. L’humour, toujours aussi bien équilibré, permet de profiter de passages plus légers avant de revenir sur la puissance du protagoniste principal à travers une séquence issue des films de kaïjus. Une façon également de confirmer l’importance de certains protagonistes de la bande qui devraient a priori prendre du galon (voire révéler quelque secrets) dans une poignée de tomes. Bien que le groupe soit ici moins central, il reste cependant au cœur de ce manga toujours aussi agréable à lire.
On espère cependant que l’histoire s’accélérera un peu (en faisant, par exemple, rencontrer à nouveau la team de Sakuu et les antagonistes principaux) et que Shonen travaillera les légers défauts évoqués plus haut. Rien d’insurmontable pour cette aventure ayant trouvé un excellent compromis entre narration, références bien digérées et voyage épique sachant constamment alterner en humour et sérieux quand le besoin s’en fait sentir.
Si le nom de Shao Jun ne vous est pas inconnu, c’est que vous devez être familiés avec l’univers étendu d’Assassin’s Creed. En effet, la demoiselle apparaît pour la première fois dans le court-métrage d’animation Embers se situant 15 ans après Assassin’s Creed Revelations. On la reverra également dans le jeu mobile Assassin’s Creed : Rebellion et surtout Assassin’s Creed Chronicles : China.
Le manga Blade of Shao Jun se situe en 1526, soit deux ans après Embers, lorsque Shao Jun revient dans son pays après avoir pris conseil auprès d’Ezio Auditore. Bien déterminée à venger son clan en éliminant le groupe des Templiers des Huit Tigres, la jeune assassine va sans le savoir travailler pour les Templiers en croyant suivre un traitement à travers à l’Animus. A l’image des premiers jeux de la saga, le manga de Minoji Kurata alterne entre passé et présent pour mieux appuyer sur le fait que la guerre entre Templiers et Assassins existe depuis la nuit des temps tout en offrant au personnage de Shao Jun un alter-ego, autrement dit Lisa Huang, mal dans sa peau et se fiant aux conseils du docteur Kagami pour essayer de sortir de son mal être. Bien entendu, derrière son visage d’ange et ses paroles rassurantes, la doctoresse (et accessoirement Templière) n’est pas aussi altruiste qu’il n’y paraît. En effet, au bout de quelques pages, le lecteur se rendra compte qu’elle use simplement de Lisa pour trouver le trésor des Précurseurs, énième relique censée aider les Templiers à dominer le monde.
Ce premier tome ne prend pas vraiment de risques scénaristiques en optant pour une trame très convenue maintes et maintes fois décrites dans les jeux ou plusieurs autres adaptations de la franchise. Toutefois, à l’image de ses modèles, ce manga vaut surtout pour la découverte de la période historique à travers ses séquences dans le passé. L’occasion de profiter d’un peu plus d’action et de mettre en avant les prouesses de Shao Jun aussi à l’aise en matière de furtivité que lorsqu’il s’agit de manier la lame. Sur ce point, le découpage des quelques scènes d’action fait preuve d’un certain dynamisme même si le trait de Kurata est assez générique. Il faudra malheureusement s’en contenter d’autant que les décors s’avèrent la plupart du temps très vides.
Bien que l’avancée de l’intrigue ne perde pas de temps, on a un peu mal à rentrer dans l’histoire à cause d’un énorme sentiment de déjà-vu. Alors que tous les éléments (le saut de la foi, les lames secrètes, Ezio…) sont là pour mieux s’adresser au fan, on a justement le sentiment, du moins pour l’instant, que ce manga déroule un peu trop mécaniquement son intrigue en cochant une liste de passages obligés. Nous verrons comment tout cela évoluera dans le Tome 2 mais pour l’heure, Blade of Shao Jun se montre trop classique et frileux pour pleinement convaincre.