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Castlevania S02 – Une suite sombre, violente et mieux maitrisée

Alors que nous avions laissé Trevor et Sypha en compagnie d’Alucard à la fin de la première saison de Castlevania, nous retrouvons notre petite troupe aux abords du château du comte Dracula. Le point de départ d’une nouvelle saison s’attardant davantage sur les troupes de Dracula afin de mieux connaître et comprendre les motivations de celles et ceux qui ne tarderont pas à affronter nos héros.

Sans surprise, cette Saison 2 possède exactement les mêmes qualités et défauts que la Saison 1. Bien que les somptueux décors soient légion, ils tranchent à nouveau avec un chara design pas toujours très heureux et surtout une animation se révélant par moments disgracieuse. On ne peut d’ailleurs s’empêcher de penser à ce qu’aurait pu donner la série entre les mains de grands studios japonais comme Studio 4°C, Production I.G ou bien encore Madhouse qui s’était notamment chargé de la série Devil May Cry en 2007 et dont la nouvelle itération devrait revenir à Shankar Animation. Néanmoins, cette production Netflix conserve de solides qualités pour palier l’aspect technique, également fluctuant et synonyme d’éléments en CG des plus hasardeux. Ainsi, pour donner encore plus de poids à cet écrin artistique proposant quelques fulgurances, le doublage anglais s’avère une fois encore irréprochable, chaque comédien semblant avoir pris beaucoup de plaisir à incarner la galerie de personnages qui s’étoffe grâce aux lieutenants du Prince des ténèbres.

Il est ici tout à fait plaisant de découvrir la cour de Dracula d’autant qu’au delà de la promesse d’affrontements dantesques (ceux-ci ayant lieu notamment dans l’épisode 7), trois personnages ressortent clairement du lot tant dans leur psychologie que les trahisons qu’ils fomentent dans l’ombre. Hector, chétif forgeron hors pair ayant la capacité de ramener les morts à la vie, forme ainsi un étrange et unique duo avec Isaac, seuls humains au milieu d’une légion de vampires, ce qui n’est pas vraiment du goût du suceur de sang Godbrand. Si de ce postulat naît rapidement des querelles intestines au sein du groupe, l’arrivée de Camilla accentue cet état de faits en plantant la graine de la trahison au sein des proches de Dracula. La vampire n’étant pas femme à se laisser dominer par la gente masculine, elle ne tardera pas à comploter contre le comte. Bien que son arrivée fracassante ne laisse planer aucun doute sur sa nature et ses intentions, elle n’en reste pas moins un personnage fort, seule femme dans un univers d’hommes, usant aussi bien de ses charmes que de sa force pour parvenir à ses fins.

Face à elle, Hector et Isaac semblent donc démunis. Ce serait vite oublier l’importance de ces deux humains pour Dracula, le premier étant à même de fournir une armée bon marché grâce à ses talents, le second s’avérant un ancien esclave au passé douloureux, oscillant désormais entre expiation et dévouement total au comte. Chacun profitant de flashbacks aussi courts qu’intenses, on apprend vite à les cerner et à s’intéresser à eux, à leur personnalité et à leur rôle futur au sein de cette guerre se préfigurant entre deux clans que tout oppose.

Alors que le format court n’aide pas vraiment à développer l’intrigue, ce n’est en rien préjudiciable à la série, Trevor, Sypha et Alucard continuant leur périple en parallèle de la présentation des forces ennemies. Leur objectif étant dès le départ connu (atteindre le château du vampire), la série s’en émancipe rapidement pour privilégier les Forces obscures. L’équilibre est donc mieux maîtrisé que dans la première saison d’autant que les conversations dispendieuses laissent ici place à des échanges verbaux ayant principalement vocation à donner plus de poids à l’univers (ou ses protagonistes), toujours aussi sombre, sanglant et mettant aux prises un être damné face à une Eglise prompte à condamner une fois de plus ce qu’elle ne comprend pas ou qu’elle rejette fermement.

Bien que la série offre davantage d’action, le superbe affrontement final synthétise à lui seul les principaux soucis du show, l’excellente chorégraphie et quelques effets spéciaux réussis ne parvenant jamais à masquer complètement une animation en dents de scie et un sound design un peu trop timide. On suivra cependant avec un grand intérêt l’intrigue du show confirmant la bonne impression laissée par la première fournée d’épisodes et ce malgré des problèmes persistants. On pourra toutefois regretter la présence un peu en retrait de Dracula, le personnage survolant à peine la moitié de la saison jusqu’à un final, dantesque, plus personnel mais sous certains aspects un peu expédié.

Plus dynamique et travaillée que la première saison, cette Saison 2 souffre toujours d’une animation limitée et de quelques déséquilibres à commencer par la présence trop réduite de Dracula. Cependant, en privilégiant l’exposition des Forces des ténèbres tout en s’offrant un final impressionnant, Castlevania se montre envoûtante d’autant qu’elle dispose les pièces sur l’échiquier du Mal pour une Saison 3 qui devra trouver ce juste équilibre entre contemplation et action.

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Les Indestructibles 2 : Un grand film implique de grandes responsabilités

Il aura fallu attendre 14 ans pour que Brad Bird revienne à l’univers des Indestructibles. S’inscrivant dans un amoncellement de films de super-héros, Les Indestructibles 2 fait davantage sensation que son aîné en proposant une aventure aux multiples facettes et niveaux de lecture à travers l’histoire de ses personnages, de leurs tracas quotidiens et leur évolution respective.

Se situant trois mois après les événements du premier volet, Les Indestructibles 2 opte dès le départ pour une aventure ne perdant pas une seule seconde. S’ouvrant sur une introduction millimétrée synonyme de flash-back à la fois drôle et référentiel, Brad Bird (Le Géant de Fer, Mission Impossible : Protocole Fantôme) pose en l’espace d’une poignée de minutes le contexte de son histoire et ses futurs enjeux. Les supers-héros sont toujours hors-la-loi, ce qui n’empêche pas Bob, Helen, Dash et Violet de chasser le super-vilain. Seulement voilà, au sein même de la cellule familiale, Helen et Bob ne sont pas raccords sur la notion de «vigilante» et si Bob estime que les Supers se doivent d’exister au grand jour, sa femme se range plutôt du côté de la loi malgré sa nature.

Une sorte de Civil War version Pixar qui intègre ici, pour le plaisir de tous, un côté domestique source de nombreux problèmes mais aussi d’éclats de rire. Ainsi, lorsque le richissime Winston Deavor, grand fan de supers-héros et philanthrope à ses heures perdues, contacte Elastigirl pour lui proposer un juteux contrat dans le but de réhabiliter les supers-héros, cela ne va pas aller sans mal.

Les années 60 face au mouvement Girl Power

La première force du film est donc d’avoir su faire évoluer la famille Parr en changeant radicalement les rôles du père et de la mère. Si on pourra trouver les réactions de Bob terriblement machistes (Bird usant de ce ressort pour amener quelques dialogues savoureux), n’oublions pas que l’intrigue du film se situe dans les années 60, période durant laquelle la femme n’avait pas vraiment la place qu’elle a aujourd’hui au sein de la société. Le fait de propulser Helen sur le devant de la scène, en tant que super-héroïne œuvrant pour une cause qu’elle croyait perdue d’avance, offre aux Indestructibles 2 une saveur délectable, surtout lorsqu’il s’attarde sur les déboires de Bob cantonné à son rôle de père de famille. D’abord sûr de lui, M. Indestructible va rapidement se rendre compte que malgré des pouvoirs surhumains, il n’est jamais simple de s’occuper de deux adolescents et d’un bébé, surtout quand ces derniers sont dotés de capacités extraordinaires.

De fil en aiguille, le long-métrage va alors constamment switcher entre la nouvelle carrière d’Helen confrontée au redoutable Hypnotiseur et celle de Bob devant soutenir sa femme malgré son statut de mâle dominant tout en s’occupant de Jack Jack, la star de cet épisode. Intronisé Super à la fin du premier volet, le bambin prend ici une part beaucoup plus importante à travers l’éveil de ses 17 pouvoirs qui seront autant de problématiques à gérer pour la famille. Que dire si ce n’est que découvrir les capacités du gosse en même temps que son père provoquera une jubilation extrême chez le spectateur. Du coucher de l’enfant à la prise d’un goûter en passant par un affrontement contre un raton laveur valant à lui seul le visionnage du film, l’évolution de Jack Jack se fait en parallèle de celle de sa mère mais aussi du reste du groupe qui, comme on l’imagine, se rejoindra dans la dernière ligne droite pour un final des plus dantesques. Certes, l’intrigue est prévisible et le twist final n’est pas vraiment surprenant mais cet état de fait est balayé d’un revers de la main par la réalisation dynamique et terriblement inventive de Bird et le propos très mature du long-métrage.

Old school et terriblement actuel

Les Indestructibles 2 demeure donc très classique dans sa construction tout en étant terriblement actuel dans les sujets abordés et incroyablement moderne dans sa mise en scène. Bien que le film aligne avec une précision de métronome scènes délicieusement burlesques et séquences d’action, il ne perd jamais de vue son sujet principal : la ségrégation des supers-héros. A ce titre, on saluera la qualité d’écriture de Brad Bird aussi à l’aise quand il s’agit de nous faire rire que de nous faire réfléchir, l’un des monologues de l’Hypnotiseur étant à ce titre très représentatif en évoquant une réalité actuelle à peine voilée. Un excellent équilibre entre comédie et politique pour un résultat toujours aussi ancré dans le comic book d’antan.

Propulsé par une bande-son James Bondesque rondement menée par Michael Giacchino, visiblement très heureux de renouer avec cet univers, Les Indestructibles 2 n’oublie pas pour autant qu’il s’adresse à plusieurs cibles. De fait, si on appréciera les sous-couches narratives, difficile de résister à ces instantanés familiaux, de la scène du dîner à la découverte du nouvel appartement des Parr en passant par les premiers émois amoureux de Violet. Classique mais toujours juste, la mise en scène atteint toutefois un autre niveau lorsqu’il s’agit de faire le focus sur les supers-héros.

Moins impressionnant techniquement que le coloré et chatoyant Coco, ceci étant sans doute dû au look anguleux des personnages et au design rétro totalement assumé, cette suite n’en reste pas moins littéralement bluffante, notamment dans sa gestion des particules ou de ses effets spéciaux. Propulsé par une maîtrise absolue de l’espace, Les Indestructibles 2 impressionne également par ses cadrages impossibles et assure un spectacle virtuose de chaque instant. Capacité dimensionnelle permettant des plans aériens complètement fous, moto faite sur mesure pour Elastigirl offrant aux courses-poursuites une fantastique originalité, cumul des pouvoirs de Jack Jack, chaque élément, chaque idée du film lui apporte une saveur particulière en respectant le cahier des charges en terme d’action mais aussi et surtout en le rendant à la fois trépidant et émouvant.

Bien qu’on eut apprécié de voir un peu plus Edna Mode ou bien encore Frozone, plus présent que dans le premier volet mais toujours cantonné au buddy de luxe, le casting s’avère malgré tout plus consistant, grâce à quelques nouveaux venus dont l’élégant Winston et sa sœur Evelyn. Enfin, si on saluera comme il se doit les excellentes voix françaises, on regrettera que Gerard Lanvin n’arrive malheureusement pas à la cheville de Marc Alfos (décédé en août 2012) dans le rôle de M. Indestructible. Dommage d’autant qu’Emmanuel Jacomy, qui devait initialement doubler Bob (et qu’on peut d’ailleurs entendre dans le trailer ci-dessus) avait une voix beaucoup plus adaptée à la morphologie et au caractère du personnage. Une pointe de déception dans un océan d’enchantement n’enlevant rien à la puissance évocatrice de cet Indestructibles 2 se présentant à l’image de son aîné comme l’un des meilleurs films de supers-héros vus sur grand écran depuis de nombreuses années.

Brad Bird nous livre une suite meilleure en tout point que son prédécesseur tout en alternant savoureusement entre vie de famille et combat contre les forces du Mal. Drôle, époustouflant, émouvant, le long-métrage passe d’un genre à l’autre avec une générosité et une habileté sans pareille. Ni plus ni moins que le meilleur film de supers-héros sorti sur les écrans depuis un bon bout de temps.

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Solo : A Star Wars Story, l’épisode de trop ?

Le temps où l’attente entre chaque Star Wars était aussi délicieuse qu’insupportable est aujourd’hui révolu. Disney ayant décidé de capitaliser sur sa juteuse franchise, les épisodes canoniques et les spin-off se passent désormais le flambeau afin que le spectateur puisse replonger dans l’univers de George Lucas à intervalle régulier. Après Rogue One, c’est au tour de Han Solo d’inaugurer les opus consacrés aux personnages iconiques de la saga.

Initialement dévolu aux talentueux Phil Lord et Chris Miller (La Grande Aventure Lego), Han Solo sera finalement confié à Ron Howard (Apollo 13, Inferno) qui aura la lourde tâche de reprendre le travail de ses homologues en effectuant plusieurs reshoots. Si on ne saura jamais vraiment la raison de la prise de bec entre les réalisateurs et Lawrence Kasdan (scénariste des Episodes V et VII), le fait est que Solo : A Star Wars Story porte l’empreinte de son réalisateur : sage, parfois efficace mais n’arrivant jamais à surprendre. Bien entendu, au delà du travail de Howard et de sa vision, le film doit également faire face à un épineux problème synonyme d’un personnage dont on sait tout ou presque. De fait, que raconter pendant plus de 2h15 (le tout aurait clairement mérité une bonne demi-heure de moins) qu’on ne sait déjà ? Une aventure trépidante de notre mercenaire au grand cœur auréolée de romance et d’action bien entendu. Rajoutez-y une louche de fan service et le tour est joué.

Une impression de déjà-vu

Le postulat du film n’est donc pas tant de nous raconter l’histoire de Han qu’on a appris à connaître en l’espace de plusieurs films que de revenir sur certains moments clés de sa vie. Le hic est qu’à l’inverse de ce que Lucas avait fait avec Dark Vador, dont l’histoire s’étalait sur toute la prélogie, de son enfance jusqu’à sa transformation finale en Sith, Solo doit se contenter (pour l’instant) d’un seul long-métrage se situant qui plus est quelques années avant l’Episode IV. Problématique d’autant que Alden Ehrenreich a peu voire aucun traits communs avec Harrison Ford, éternel Han Solo pour l’ensemble des spectateurs. L’identification est d’autant plus difficile à accepter que l’acteur est très souvent à côté de la plaque en terme d’incarnation. D’ailleurs, avouons que ce n’est pas le seul problème de casting, Emilia Clarke campant une Qi’Ra fade et intrusive au point de ne pas permettre au film de s’émanciper comme il aurait dû autant dans le ton que dans ce qu’il a à raconter.

On nous avait ainsi parlé de véritable western, ce qu’il essaie d’être au détour de quelques plans fugaces, mais alors que Rogue One se présentait comme un véritable Fort Alamo spatial, Solo verse très souvent dans le film trop conventionnel, parasité par une romance dont on se fiche éperdument, et ne mettant jamais correctement en avant le côté cabotin et intrépide de son héros. La faute à un script peu concluant perclus de maladresses à l’image de la deuxième rencontre entre Han et Qi’Ra, la sous-exploitation de Lando (Donald Glover) et les personnages de L3-37 (loupé voire dérangeant) et Beckett (Woody Harrelson) oscillant constamment entre une sorte de mentor et l’aventurier chevronné.

Difficile au final de s’intéresser à l’histoire servant de fil rouge et faisant état d’un vol de matière énergétique pour le compte de Dryden Voss (Paul Bettany). Le canevas scénaristique donnant parfois l’impression d’avoir été principalement pensé pour intégrer une kyrielle de clins d’oeil, on devra la plupart du temps se contenter de ce qu’on connaît déjà ou de ce qu’on supposait. De l’obtention du fameux blaster de Solo en passant par l’origine de son nom (totalement ridicule) ou sa première rencontre avec Chowie (malaisante à cause d’un trait d’humour superflu), le film avance péniblement en multipliant les références tout en tentant de faire progresser ses personnages jusqu’à un twist, lui aussi peu convaincant.

Efficace et pas cher, c’est Howard

Scénaristiquement, Solo : A Star Wars Story déçoit donc énormément mais est en partie rattrapé par sa réalisation. L’honnête artisan qu’est Howard exécute le tout sans grande conviction mais avec suffisamment de maîtrise pour maintenir le spectateur éveillé. Bien qu’on eût apprécié un rythme plus trépidant et davantage d’action, certaines séquences fonctionnent à l’image de l’attaque du train parfaitement orchestrée ou bien encore une séquence spatiale, haletante et esthétiquement superbe avec sa créature Lovecraftienne. Une bonne surprise surtout après la poursuite d’ouverture d’une mollesse à toute épreuve.

D’ailleurs, si le film s’avère beaucoup moins marqué visuellement que les autres opus de la franchise (sans doute à cause d’un budget plus réduit que ceux des épisodes principaux), et qu’il a bien du mal à acquérir une véritable identité, certaines astuces (pour mettre en avant différents décors à moindre frais) lui permettent cependant de sauver les meubles. On regrettera tout de même le passage terriblement brouillon dans les mines de Kessel amenant toutefois le fameux Raid plusieurs fois évoqué dans les précédents Star Wars.

Bien que correctement emballé par Howard, Solo : A Star Wars Story reste sans doute le film de la saga le plus dispensable à ce jour tant il n’apporte rien à la franchise. Constamment rattrapé par son manque d’ambition, son incapacité à nous raconter quelque chose de consistant et son fan service amené n’importe comment, on a bien du mal à croire que derrière ce résultat se cache le scénariste de L’Empire Contre-Attaque. Espérons que ce faux pas serve de leçon aux prochaines Stories qui devront avant toute chose bien mieux définir leurs sujets en amont…

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Outlaw Players (T01-06) : Welcome to the fake world

Bien que .Hack ait été le précurseur en matière de série mettant en scène des personnages piégés à l’intérieur d’un jeu vidéo, nombre d’auteurs s’y sont essayé depuis en nous offrant des titres comme Log Horizon, Accel World ou bien entendu Sword Art Online qui a popularisé le genre. En France, peu d’exemples à signaler jusqu’en juillet 2016 qui voit débarquer le premier tome de Outlaw Players.

Si les origines de la série de Shonen datent de 2002 (période à laquelle elle est disponible sous forme de webcomic composé d’anecdotes à propos des MMO), c’est Ki-oon qui se chargera de contacter l’auteur en lui demandant de reprendre son projet pour en faire un manga.

L’idée est séduisante mais Shonen va devoir alors élaborer un véritable scénario, une histoire qui se tienne, des personnages forts et travailler d’arrache-pied afin de pouvoir livrer en temps et en heure les volumes à un rythme régulier. Nous sommes cependant loin de la cadence japonaise infernale puisqu’en juillet 2016 et juillet 2017, seuls 5 tomes sont disponibles. Le 6ème étant justement paru en décembre dernier, nous avons décidé de vous faire découvrir cette série hautement référentielle, s’inspirant autant du manga que du jeu vidéo et proposant des personnages réjouissants profitant d’un dessin parfaitement maîtrisé.

Etape 1 : Un premier tome qui se cherche

Si chaque histoire se doit d’avoir un début, celle de Outlaw Players a de quoi décontenancer. En effet, bien que le dessin de Shonen fasse mouche dès les premières pages grâce à un style accrocheur et un excellent découpage offrant aux scènes d’action un dynamisme certain, on a un peu de mal à rentrer dans cet univers où finalement rien ne nous est précisément expliqué. Tout juste avons-nous le temps de voir Sakuu dans le monde réel se choisir un pseudo qu’on nous transporte directement dans le monde de Thera où l’aventure démarre tambour battant.

Ainsi, si on appréciera que le récit ne perde pas de temps, on se sent en même temps un peu perdu. Alors qu’on apprend que les joueurs sont bloqués dans Thera à cause d’un bug, on aurait par exemple aimé en connaître un peu plus sur les personnages en dehors du jeu afin de mieux les cerner et ainsi davantage s’amuser des potentielles différences entre le joueur et son avatar. Bien que Shonen s’amuse toutefois avec quelques codes du MMO (le joueur incarnant un avatar de sexe différent, la découverte de la classe choisie, etc), il n’en reste pas moins que le premier volume d’Outlaw Players manque un peu de consistance en se reposant un peu trop sur les codes du genre : le héros perdu qui découvre une force inouïe cachée au fond de lui, la rencontre avec d’autres personnages qui vont le suivre dans l’aventure…

On sent que Shonen essaie de trouver ses marques et si on devra attendre le Login 9 (dans le Tome 2) pour voir poindre les bouts d’une trame plus maîtrisée, la lecture reste tout de même fluide grâce aux nombreuses références très bien digérées et souvent très drôles.

De One Piece à Yu-Gi-Oh en passant par Pokémon, l’auteur s’en donne à cœur joie, Sakuu a un énorme capital sympathie et tous les personnages qui vont graviter autour de lui le complètent bien et finissent par former une équipe homogène, élément indispensable dans tout bon MMO et shonen.

D’ailleurs, le gros plus d‘Outlaw Players reste ce côté parfois didactique (sans être poussif) sur les mécaniques des jeux de rôle et principalement des MMORPG. L’auteur se permet parfois de revenir sur le système d’aptitudes, de statistiques des jeux en ligne ou même sur l’évolution possible pour un joueur en fonction de son Job. Shonen joue avec son héros et parvient à entretenir l’intérêt pour son manga oscillant savamment entre action et humour.

Etape 2 : La Découverte de Thera

L’histoire suivant tranquillement son cours et le monde de Thera éveille peu à peu l’intérêt du lecteur. La progression donnant lieu à une sorte de road trip continu dont le premier objectif est la ville de Ztem, l’occasion de nous présenter la faune et la flore du MMO constitue bien entendu l’un des attraits majeurs de Outlaw Players, jamais avare en créatures de tout poils et villes gigantesques dont Prais, la première cité cité traversée par notre groupe, s’inspirant fortement de Paris. Ainsi, outre l’anagramme (le manga en regorge), on retrouve une architecture très européenne, moyenâgeuse qui offre beaucoup de charme à l’endroit. Dommage cependant que la ville ne soit finalement pas plus exploitée et qu’on la quitte prestement pour des raisons qu’on vous laissera découvrir par vous-même.

Au delà des villes et villages, la faune de Outlaw Players se révèle disparate et promet des rencontres musclées tout au long des 6 premiers tomes. Hydres, loups-garous, gobelins, monstres marins, les affrontements se suivent et ne ressemblent pas d’autant qu’en fonction de l’avancée de l’histoire, Sakuu maîtrise de plus en plus la puissante relique qu’il porte au bras droit jusqu’à l’affrontement titanesque contre Taargis, énorme PNJ en armure faisant fortement penser à l’Alphonse de Fullmetal Alchemist. D’ailleurs, de cet affrontement découle un arc qui continue encore aujourd’hui faisant état d’une machination fomentée par la dénommée Elicia et soutenue par l’impitoyable (et très classe) Belith, elle-même détentrice d’une relique. Si pour l’heure, le tout semble un peu confus, les nouvelles recrues (à commencer par la sniper Lyséa) se succédant rapidement en parallèle d’une intrigue se mettant progressivement en place, il est difficile de lâcher un volume dès lors qu’on l’a commencé. Ceci tient comme je le disais plus haut au rythme haletant du manga et à la symbiose parfaite entre les protagonistes. Le Tome 6 ne fait d’ailleurs pas exception à cet état de fait avec une narration jouissive au possible, le trio Duranzan/Okoto/Aefka fonctionnant parfaitement bien, de superbes planches mettant en avant certaines invocations (un renvoi direct aux RPG) ou bien encore la promesse d’un tournoi à venir, une constante dans les shonen.

Etape 3 : Friends

Outre le trait du mangaka qui s’affine de tome en tome et l’histoire dévoilant son potentiel (même si le Tome 5 met toujours en avant l’absence d’un vrai socle scénaristique), c’est surtout le côté décalé de Sakuu et ses relations avec le reste de la petite bande qui réussit toujours à décocher quelques (sou)rires entre deux échauffourées gagnant en intensité à mesure que le manga se poursuit. Alors que Sakuu reste un héros assez typique du shonen, il n’en reste pas moins très réussi tout en ayant une véritable personnalité. Parfois dépassé par les événements, découvrant ses capacités et les règles de Thera à mesure qu’il progresse, jamais avare quand il s’agit de castagner, le personnage central de Outlaw Players se distingue de la plupart de ses homologues nippons en brisant parfois le quatrième mur en citant d’autres œuvres ou, bien entendu, en nous renvoyant dans la figure moult souvenirs d’animes ou de RPG. Un aspect sympathique offrant au manga un charme indéniable.

Si il faudra toutefois patienter pour savoir si Shonen réussira à consolider son récit tout en le rendant un peu plus fluide, pour l’heure, les relations entre Sakuu, la sorcière Leni (IA dispensant au groupe de précieux conseils), Okoto (penfighter flanquée de l’étonnante irrégularité Aefka) et Lyséa donnent souvent lieu à des dialogues ou situations exquises, que ce soit autour d’un feu de camp ou en pleine bataille. La recette est éprouvée mais le résultat se montre trop réjouissant pour qu’on boude ce manga se présentant même parfois comme une sorte de guide du débutant pour joueur de MMORPG. Ne reste plus qu’à patienter pour connaître comment cet excellent concentré de références, d’action et d’humour évoluera autant dans sa narration que dans son style. On est impatient de le découvrir.

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Rampage & The Rock hors de contrôle

Après avoir traîné ses guêtres en 2005 dans une adaptation, de sinistre mémoire, de Doom, The Rock avait renoué avec notre univers de prédilection dans le très sympathique Jumanji : Bienvenue dans la Jungle, bien plus attentionné vis à vis du jeu vidéo qu’un certain Ready Player One. Pour autant, dire que nous attendions avec impatience l’adaptation de Rampage serait un peu excessif tant tout le monde ou presque a oublié ce titre datant du début des années 80. Toutefois, l’optimisme à toute épreuve de Dwayne Johnson sur les réseaux sociaux à propos de la qualité du film avait réussi à nous faire lever un sourcil interrogateur… Qui est rapidement revenu en position normale.

Petit cours d’histoire. En 1986, Midway sort sur la plupart des ordinateurs et consoles du marché un jeu d’arcade répondant au doux nom de Rampage. Son principe nous demande d’incarner l’un des trois humains disponibles qui ont été transformés en animaux géants et qui n’ont qu’une idée en tête : détruire des quartiers entiers en gobant des civils et en évitant l’armée tentant de les arrêter. Si le principe politiquement incorrect semblait marrant sur le papier, il faut avouer que le concept perdait de son intérêt après quelques niveaux, plombé par une redondance excessive et un intérêt plus que limité. On pouvait donc se demander ce que Warner allait bien pouvoir tirer de cette franchise tant le script tient sur un timbre poste plié en quatre. Si vous avez jeté un coup d’oeil à l’affiche du film, vous savez déjà qu’il s’agit des trois créatures, autrement dit le gorille George, le loup du nom de Ralph et enfin Lizzie, une sorte de gigantesque crocodile. Seulement voilà, comme le soft ne disposait pas vraiment d’histoire, il a fallu pas moins de 4 scénaristes pour s’attaquer à cet épineux problème. Et le moins qu’on puisse dire est qu’ils semblent s’être arrachés les cheveux afin d’en sortir quelque chose qui arrive à tenir la route.

Un film qui a du chien ?

Le problème de Rampage : Hors de Contrôle n’est donc pas qu’il prend comme point de départ un titre sans scénario, mais plutôt sa propension à accumuler les clichés sans jamais essayer d’aller plus loin que ses modèles. Autant dans ses situations, ses dialogues ou même le jeu d’acteur de ses stars, l’ensemble reste tellement convenu qu’une vingtaine de minutes nous suffit pour savoir comment va s’articuler le récit. Ce dernier débute en compagnie du primatologue David Okoye (The Rock), plus à l’aise avec les singes que ses semblables. Suite à la destruction d’une station spatiale (lors d’une séquence étonnamment gore qu’on la croirait issue de Life), un virus expérimental est expulsé vers la Terre dans plusieurs capsules. Ces dernières croiseront la route de trois animaux (dont George) qui ne tarderont pas à se transformer. Rendues folles, les créatures entameront une immense croisade de destruction poursuivies par l’armée et Okoye. Ce dernier, bien décidé à trouver un antidote afin de sauver son ami, trouvera de l’aide en la présence de la généticienne Kate Caldwell incarnée par Naomis Harris.

Si le pitch pouvait augurer un film bas du front mais diablement jouissif, il se perd malheureusement dans son envie de creuser ses personnages sans jamais y parvenir. En résulte des dialogues tombant à plat, se voulant néanmoins poignants mais ne réussissant qu’à provoquer gloussements incontrôlés. Et ce n’est pas le duo des frères et sœurs Wyden qui relèvera le duo tant ces derniers, à la base du virus et avides de profits, manquent d’épaisseur. On était également curieux de voir ce qu’allait donner Jeffrey Dean Morgan (The Walking Dead) dans la peau de l’agent Russell. Force est de constater qu’au delà de son jeu reprenant plusieurs mimiques de son personnage de Negan, le rôle semble avoir résulté de plusieurs réécritures. Ce dernier se montre transparent jusqu’à une ridicule scène de précognition et assez révélatrice du projet ne sachant jamais où se situer entre gore, action et rigolade. On alterne alors entre scènes plutôt légères saupoudrées d’humour à de l’action hollywoodienne en passant par une séquence étonnamment gore voyant un commando de mercenaires passant du statut de chasseurs à celui de chassés.

Les démolisseurs de l’extrême

Néanmoins le film était principalement attendu pour ses scènes de destruction massive, mises en avant dans les différents trailers et surtout sève du jeu de Midway. Malheureusement, ici aussi, il y a de quoi être déçu. En effet, jamais Rampage ne parvient vraiment à convaincre et ce jusqu’à son final apocalyptique et ses immeubles s’écroulant autour des créatures s’affrontant en plein centre ville. Toutefois, impossible de ne pas comparer avec Kong : Skull Island ou même le somptueux remake de King Kong par Peter Jackson, bien plus généreux et maîtrisé que le film de Brad Peyton, responsable de San Andreas et de la future adaptation de Just Cause. On évitera également de trop s’attarder sur le design disgracieux des créatures et de l’illogisme voulant que le loup et le crocodile aient certains des attributs des créatures utilisées dans l’élaboration du virus à l’inverse de George restant le même du début à la fin, histoire d’amener l’émotion voulue par le réalisateur.

Rampage reste un spectacle regardable, voire appréciable, pour peu qu’on le prenne au douzième degré et qu’on lui pardonne toutes ses errances scénaristiques et ses approximations autant dans sa réalisation peu inventive ou ses effets spéciaux pas toujours à la hauteur. Reste les biceps de l’ami Dwayne se contractant au rythme de ses exploits dont le pilotage de deux hélicoptères en l’espace de 45 minutes.

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Avengers : Infinity War, la première pierre d’un nouveau départ ?

Point d’orgue à tout ce qu’a entrepris Marvel depuis la Phase I, Infinity War prend le pari d’adapter l’un des arcs les plus importants de l’univers Marvel inspiré du Défi de Thanos, du Gant de l’infini et de La Guerre de l’infini. Une incroyable épopée réunissant une kyrielle de super-héros, tous unis dans le but de venir à bout d’une menace d’ordre cosmique. Si le dernier essai en la matière, Justice League, nous avait clairement refroidis, l’ensemble fonctionne bien mieux chez Marvel bien que le tout se retrouve confronté au concept anticipé de Phases minimisant l’impact de certains ressorts scénaristiques.

Thanos : Entre puissance et mélancolie

Faisant directement suite à Thor Ragnarok, Infinity War ne perd pas une seule seconde en nous présentant dès les premières minutes les enjeux de la guerre à venir. Thanos, affublé de sa clique de subalternes, entend ainsi récupérer les cinq pierres de l’infini restantes de manière à disposer du pouvoir absolu afin de remodeler l’univers à sa convenance.

Bien qu’on puisse regretter l’absence de dimension shakespearienne, inhérente au graphic novel de Jim Starlin dans lequel Thanos, fou d’amour pour la Mort, décidait de détruire la Terre dans le but de séduire sa bien-aimée, il reste plus que jamais l’élément fort du film des frères Russo.

Profitant d’un traitement très intéressant qui en fait un conquérant rongé par la folie et empreint de nostalgie, Thanos crève l’écran à chacune de ses apparitions aidé par des dialogues étonnamment bien écrits, des passages parfois poignants et des combats titanesques grâce à des effets spéciaux de haute volée. Fusionnant parfaitement avec la prestation de Josh Brolin (Old Boy, Sin City : J’ai Tué pour elle), les sfx offrent ainsi un incroyable charisme au personnage en CGI qui gagnera en puissance à mesure de l’avancée de l’intrigue, plus sombre que jamais.

Le concept de phases face à ses limites

Bien qu’‘Infinity War ait de grandes ambitions, tant dans sa narration, son ton et l’influence qu’il aura sur le futur du MCU, on se retrouve une fois encore face à une formule connue ayant a priori atteint ses limites. Alors que le film aurait gagné à assumer sa noirceur du début à la fin, les frères Russo utilisent une fois de plus des ficelles identiques à celles de leurs précédents films et accessoirement l’ensemble des derniers longs-métrages Marvel. S’il n’est donc pas surprenant de retrouver de multiples petites touches d’humour (celles-là même qui plombaient Thor Ragnarök) tout au long de l’histoire, ces dernières parasitent légérement un récit qui aurait pu s’affranchir de cet élément ou du moins le conserver principalement lors de l’apparition des Gardiens de la Galaxie. Malheureusement, entre un Spider-Man ne perdant jamais une occasion de balancer de «vieilles» références filmiques, la guerre d’égo (plutôt savoureuse, il faut l’avouer) entre Thor et Star-lord ou un Robert Downey Junior cabotinant dans son rôle d’Iron Man, les apparitions de Thanos perdent par moment de leur puissance évocatrice, engoncées entre deux séquences se déroulant à plusieurs endroits de la galaxie et faisant intervenir un impressionnant casting de super-héros.

Vision, La Sorcière Rouge, Black Panther, Hulk et Docteur Strange venant rejoindre les rangs des héros déjà mentionnés, on aurait pu craindre que le film soit totalement déséquilibré avec autant de protagonistes à l’écran. Sur ce point, on est plutôt agréablement surpris, le split rapide des troupes permettant d’apporter plusieurs aérations à l’intrigue tout en offrant à la plupart des personnages leur morceau de bravoure à l’image de ce qui avait déjà été fait dans Les Gardiens de la Galaxie, Vol. 2. Bizarrement, la seule victime de cette construction se trouve être Captain America dont le temps de présence est inversement proportionnel à celui d’Iron Man plus que jamais central dans le récit. On serait même tenté de dire que les Russo ont choisi leur camp après Civil War tant le héros américain, flanqué de Black Widow, est sous-exploité et cantonné à quelques scènes d’action dont une incroyable bataille au Wakanda, à même de faire rougir celles de la prélogie de George Lucas. Dommage.

Un spectacle visuel ininterrompu de 2h35

Néanmoins la frustration laisse rapidement place au plaisir coupable tant Infinity War se montre généreux dans ses affrontements. Le film profite de surcroît d’une mise en scène solide, bien que parfois confuse en ne parvenant pas toujours à saisir toutes les subtilités des chorégraphies. Cependant, faisant de chaque combat un morceau d’anthologie, le film multiplie les idées visuelles, des costumes nano-technologiques de Spidey et Iron Man en passant par les pouvoirs des Pierres de l’infini permettant aux réalisateurs de redéfinir par moments la réalité mais aussi et surtout la construction des séquences d’où émane une énergie folle.

Malgré des enjeux et twists rendus caducs par le planning annoncé des prochaines productions Marvel, Avengers : Infinity War n’en reste pas moins un long-métrage puissant et jouissif. Inventif dans sa propension à mixer différents univers pour nous offrir 2h35 d’un incroyable spectacle et prouvant une fois encore que des héros, aussi nombreux soient-ils, ne sont rien sans un méchant à la hauteur, le film ne laisse pas une seconde de répit tout en se concluant par l’une des fins les plus fortes que le MCU nous ait jamais offert.

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Ready Player One : Le grand retour de Spielberg au jeu vidéo ?

L’histoire de Steven Spielberg et des jeux vidéo ne date pas d’hier. Ainsi, si on lui doit par certains côtés la série Medal of Honor (développée par la filiale de sa société Dreamworks), rappelons que l’homme nous a également offert le très sympathique Boom Blox sur Wii en 2008. Il était donc légitime qu’il soit en tête de liste pour l’adaptation du livre d’Ernest Cline, Player One, véritable ode à la pop culture, au cinéma et au jeu vidéo des années 80.

Bien que Cline officie en tant que co-scénariste sur le film, Ready Player One se devait d’être plus actuel, tout en gardant la structure du livre, afin de toucher un public plus vaste qui n’aurait pas été biberonné aux eighties. Si le roman était un pamphlet à la gloire des années 80, le long-métrage, sans renier son héritage, opte pour une orientation quelque peu différente tout en restant on ne peut plus référentiel.

De Player One à Ready Player One

Visuel et jouissif, Player One n’en restait pas moins critiquable lorsqu’il devait décrire et faire évoluer les relations entre ses personnages. Cependant, Ernest Cline avait réussi à insuffler une dynamique à son récit se déroulant en 2045, véritable chasse au trésor à l’intérieur de l’OASIS (gigantesque monde virtuel créé par le défunt James Halliday) pensée comme une immense quête digne des plus grands RPG.

Tout en conservant les bases de l’histoire, Spielberg se réapproprie logiquement l’univers de Cline pour le meilleur et parfois pour le pire. Si quantité de choses diffèrent entre le film et le roman, la trame principale reste néanmoins identique. Ainsi, Halliday lègue en guise de testament 250 milliards (transformés, sûrement pour une histoire d’inflation, en 500 milliards dans le film) à qui récupérera les trois clefs disséminées à l’intérieur de sa création. En tant qu’inconditionnel d’Halliday, Wade Watts (aka Parzival) aidé de ses compagnons, ne tarde pas à se plonger corps et âme dans la partie par attrait pour l’aventure. Néanmoins, il devra faire face aux Sixers, multinationale ayant un quasi monopole sur la société actuelle en proie à divers problèmes économiques et écologiques, et bien décidé à cultiver les richesses du monde virtuel.

Là où l’auteur prenait le temps de dépeindre l’OASIS comme une sorte d’échappatoire à un monde gangrené par la pauvreté et la surpopulation et où il était possible de s’amuser, mais aussi de travailler et d’étudier, le réalisateur américain en fait un simple terrain de jeu s’étendant sur des milliers de mondes. Si la représentation visuelle très marquée (autant dans les tonalités que ses possibilités) entre réel et virtuel sert le propos, on regrettera que Ready Player One n’ait pas été découpé en deux films de deux heures. Ce format aurait en effet été à même de rendre davantage justice aux 600 pages du roman original en s’attardant sur l’aspect social de l’OASIS tout en atténuant l’aspect manichéen de l’ensemble. C’est ici tout l’inverse, Spielberg étant plus enclin à dresser un portrait peu reluisant des multinationales, à travers des personnages trop clichés (à l’image de Sorrento) pour être crédibles, tout en se sentant obligé de nous rappeler à plusieurs reprises qu’il y a une vie au delà du virtuel…et donc du jeu vidéo.

Si le message semble donc par moment grossier et assez naïf, le film se montre beaucoup plus à l’aise lorsqu’il s’agit de mélanger références actuelles et plus anciennes pour le plaisir de tous. Bien que l’hommage aux années 80 soit beaucoup plus dilué, il n’en reste pas moins que Ready Player One se veut une sorte de jeu imbriqué dans un film tant plusieurs visionnages seront nécessaires afin de voir tous les easter eggs. Qu’ils soient vidéoludiques (Halo, Overwatch, Street Fighter…), cinématographiques (King Kong, Last Action Hero, Chucky) ou issus d’animes (Gundam, Le Géant de Fer, Cowboy Bebop), chacun contribue à une excitation certaine chez le spectateur. On déplorera tout de même que la musique des années 80 (centrale pour Cline) ne soit ici synonyme que de quelques morceaux épars (Van Halen, Tears for Fears…), heureusement épaulés par les excellentes compositions d’Alan Silvestri visiblement très heureux de se replonger dans la période Amblin.

Difficile donc d’en vouloir à Spielberg d’avoir pris autant de libertés avec l’oeuvre d’origine d’autant qu’en remplaçant certaines scènes (l’épreuve de Joust, celle de Wargames…), il parvient à les rendre plus adaptées au grand écran. On pensera ici une étonnante course-poursuite (bien qu’un brin confuse dans son dénouement) ou le superbe hommage à Shining en le rendant tour à tour impressionnant, effrayant et très amusant.

Malheureusement, Ready Player One fait aussi montre de plusieurs défauts à commencer par sa dynamique très différente de celle du livre qui switchait à intervalle régulier entre réel et virtuel. L’accent est ici mis sur l’OASIS, mais il est frustrant de ne plus retrouver cette dimension vidéoludique passant par de véritables challenges demandant réflexion et connaissance des années 80. Si Spielberg saupoudre son long-métrage de clins d’oeil plutôt habiles, ces derniers ne masquent en rien le manque de temps qu’a eu le réalisateur afin de développer l’univers de Cline. Tout va très vite dans Ready Player One, le spectacle étant davantage mû par ses idées visuelles que l’empathie dégagée par ses personnages, centraux ou non. Pour autant, bien que la quasi totalité du casting s’avère fantômatique dans le monde réel, la petite troupe complétée par Aech, Daito et Shoto se montre plus convaincante une fois dans l’OASIS et ce malgré le couple Wade/Art3mis beaucoup plus central dans le film et reléguant de ce fait au second plan leurs compagnons.

Retour vers le passé pour Spielberg ?

On savait depuis les excellentes Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne que Spielberg avait compris l’intérêt de l’image de synthèse pour magnifier son action, ambitieuse mais toujours lisible, Ready Player One lui permet de passer à une étape supérieure, aidé en cela par l’univers mis à disposition. De l’introduction parfaitement chorégraphiée présentant en quelques secondes les possibilités de l’OASIS (qui ne seront malheureusement pas pleinement utilisées par la suite) à l’élégante scène du casino en passant par l’incroyable morceau de bravoure final, le réalisateur de 71 ans maîtrise son sujet.

Prenant le temps de dresser un bilan quelque peu désabusé de notre société à travers les yeux de James Halliday, Spielberg n’en oublie également pas de rendre hommage à tout un pan du cinéma, son cinéma, celui-là même qui l’a rendu célèbre à travers des œuvres cultes comme Jaws, Retour vers le Futur, Jurassic Park ou bien encore Indiana Jones. Dommage toutefois que ce parti-pris se fasse au détriment du jeu vidéo, parfois réduit au simple rang de (multiples) références disséminées ici et là alors qu’elles constituaient la pierre angulaire du livre d’Ernest Cline.

Malgré tout, Ready Player One reste un film extrêmement généreux et transgénérationnel, et ce malgré le fait qu’il soit avant toute chose le regard d’un réalisateur sur son œuvre et le monde qui l’entoure.

Parfois cliché et peu subtil (on se serait bien passé de cette morale un brin condescendante, chose qu’on retrouve de plus en plus dans les films de Spielberg), le long-métrage se plaît à mélanger les deux mondes pour mieux nous questionner sur notre rapport au virtuel, tout en nous abreuvant de références à tout un pan d’une culture geek ayant depuis longtemps fusionné avec notre quotidien.

Parasitée par de nombreux problèmes (personnages supplémentaires inutiles, intrigue cousue de fil blanc, manichéisme), Ready Player One n’en conserve pas moins une force évocatrice, de celles nous poussant à apprécier et à mieux comprendre le cinéma ou, dans une certaine mesure, le jeu vidéo, ainsi que leurs créateurs. Bien qu’on puisse être très déçu de l’oeuvre en tant qu’adaptation, Spielberg réussit néanmoins à travers sa vision et son talent à faire passer un message différent du livre, pas moins intéressant, mais simplement plus personnel. A vous de voir si vous avez envie de suivre l’homme dans ses questionnements, sa vision du monde actuel et le cinéma qui en découle.

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Mass Effect : Nouveau Monde – Pour 15 balles t’as Turien

Bien que Mass Effect Andromeda n’ait pas eu aussi bonne presse que la première trilogie, il n’en reste pas moins un moyen de replonger dans cet univers de scien-fiction grandement inspiré par celle des années 80. Il était donc légitime ce volet ait droit aux même honneurs que les précédents titres en profitant de divers contenus Transmedia à même d’étoffer son univers.

Se déroulant avec le jeu, Mass Effect : Nouveau Monde nous invite à suivre le turien Teran Kandros qui va devoir enquêter sur l’Initiative Andromède, une organisation dont le but officiel est d’explorer la galaxie d’Andromède, et surtout de retrouver le scientifique Quarien Shio’leth Vas Novarra, au centre de ce vaste projet. On appréciera le travail de John Dombrow (scénariste principal de Mass Effect 3) qui réussit à conférer, en l’espace de moins d’une centaine de planches, une vraie personnalité ainsi qu’une histoire à Teran et Shanks (le bras droit de Jien Garson, à la tête de l’Initiative et accessoirrement mentionnée Andromeda) ou bien encore leur Nemesis Olan Kooth.

Certes, l’histoire n’est finalement qu’une simple chasse à l’homme permettant de retrouver les lieux iconiques (La Citadelle, Omega) et les races majeures de la saga (Turien, Asaris, Geth) mais l’album bénéficie de suffisamment de qualités pour qu’on s’y intéresse. Déjà, l’ensemble ne souffre pas de temps morts et est très agréable à lire grâce au trait de Gabriel Guzman (Dark Vador : Terreur) et l’encrage de Michael Atiyeh (Star Wars, Conan le Barbare…) retranscrivant plutôt bien les ambiances des mondes traversés. Ensuite, malgré la linéarité de l’intrigue, Teran s’avère un personnage plus profond qu’il n’y paraît, tiraillé entre la mission qu’il doit accomplir, ses doutes sur cette dernière et le besoin de prouver à son père qu’il s’est affirmé en étant autre chose que simplement son fils. Dès les premières planches, on a donc plaisir à suivre ce personnage, sorte de contre-poids à Olan dont le traitement n’est jamais minimisé, ceci lui permettant d’avoir suffisamment d’épaisseur en tant que bad-guy principal.

Cependant, inutile de nier que la fin de Nouveau Monde a de quoi frustrer, même pour un One Shot. La dernière planche n’est qu’une porte grande ouverte sur le jeu et le comics donne tout de même l’impression d’avoir survolé son sujet principal en éludant quantité d’informations concernant l’Intitiative Andromède et leur projet d’exploration officiellement destiné à trouver un nouveau foyer pour l’humanité. De plus, difficile de le recommander aux profanes car malgré son statut de préquelle d’Andromeda, apprécier l’histoire sans connaître un minimum l’univers de Mass Effect semble plutôt compliqué.

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Metal Gear Solid : Projet Rex – Un retour à Shadow Moses qui s’impose ?

C’est en 2004 que sort pour la première fois le comics de Ashley Wood (dessinateur) et Kris Oprisko (scénariste). En 2005, il nous arrive en France chez les éditions Soleil. Un an plus tard, en 2006, il ressort sur PSP, sous l’appellation Metal Gear Solid : Digital Graphic Novel. Le concept est plutôt intéressant et permet de profiter de la BD avec une surcouche interactive demandant de débloquer des fragments de mémoire. Bien que Projet Rex ne soit pas tout jeune, il ressort néanmoins pour la toute première fois en album relié de presque 300 pages en France grâce aux éditions Mana Books. Une sympathique leçon de rattrapage pour savoir ce que donne cette adaptation du jeu culte d’Hideo Kojima.

Que celles et ceux cherchant de l’originalité passent leur chemin. En effet, le graphic novel de Wood et Oprisko reprend à l’identique la trame du jeu en l’expurgeant bien entendu de tous ses éléments qui brisaient avec délice le quatrième mur. Ne vous attendez donc pas à ce que Miller vous renvoie à la quatrième de couverture pour trouver un code ou que Psycho Mantis lise dans votre esprit en vous révélant ce que vous avez feuilleté récemment.

L’idée est ici de nous renvoyer à Shadow Moses sous couvert d’un visuel très marqué. Ashley Wood n’usant jamais de lignes claires, les planches semblent parfois perdues entre esquisses et cases nous donnant une impression d’inachevé, ce sentiment étant renforcé lors de certains plans où les personnages ont des allures de mannequins. Toutefois, à mesure qu’on avance dans le récit, le style fait mouche, notamment lors des scènes d’action bénéficiant d’un véritable dynamisme et d’une ambiance étrange, presque fantastique sciant plutôt bien à l’atmosphère de fin du monde régnant en ces lieux. Pour autant, comme toute œuvre non conventionnelle, il va de soit qu’elle divisera à l’image du remake de Metal Gear Solid chapeauté par Ryūhei Kitamura sorti sur GameCube et qui portait la marque indélébile du réalisateur japonais.

Si vous arrivez à accepter, voire à apprécier, le style du dessinateur, vous aurez alors le plaisir de replonger dans une intrigue d’espionnage (en surface) évoluant rapidement vers un complot dont les racines s’étendent jusque dans less années 60. Le scénario de Kojima n’a rien perdu de sa force évocatrice et peut toujours compter sur une incroyable galerie de personnages (de Revolver Ocelot à Vulcain Raven en passant par Sniper Wolf ou Gray Fox) portant à bout de bras un récit haletant. A ce propos, on remarquera tout de même que Kris Oprisko s’est permis quelques petits changements, via des dialogues saupoudrés d’humour, plus crus (la première rencontre avec Meryl) ou lors de certaines scènes cultes à l’image de l’affrontement contre Psycho Mantis notamment. Mentionnons d’ailleurs que la version d’Oprisko est toute aussi réjouissante que le combat original car usant de façon différente des capacités du personnage pour amener des idées qui auraient certainement donné quelque chose d’impressionnant en jeu vidéo.

Si le résultat est agréable, il faut tout de même avouer que malgré les 300 pages du graphic novel, l’intensité est moindre, le comic-book ne disposant pas de la même montée en puissance que le jeu qui pouvait compter sur une incroyable mise en scène, ce mélange d’action et d’infiltration et surtout l’intéractivité. Au final, la force de cette version de Metal Gear Solid de papier consiste à donner envie au lecteur (qu’il connaisse ou non le jeu original) de (re)découvrir ce très grand titre manette en mains. On aurait donc tort de se priver de ce petit plaisir, si tant est que vous ne soyez pas réfractaire au trait particulier de Ashley Wood.

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Resident Evil Heavenly Island (T05) : Fin des vacances

Heavenly Island arrive à son terme et avec lui la promesse de lendemains meilleurs pour le jeune Takeru, la Top Model Lola ou bien entendu Claire Redfield. Dans la droite lignée des volumes précédents, cet ultime tome ne prend pas de pincettes et pousse jusqu’au boutisme l’action en offrant à ses personnages une fuite de l’île particulièrement ardue.

Alors qu’on pouvait reprocher aux précédents volumes de ne jamais vraiment s’appesantir sur ses personnages en privilégiant les scènes d’action et la découverte de nouvelles menaces toujours plus dangereuses (zombies, B.O.W., traîtres à la solde d’une mystérieuse organisation…), ce dernier volet suit logiquement le même chemin en passant même à la vitesse supérieure. Pendant que toute la petite équipe est bloquée dans le laboratoire secret d’Umbrella et qu’un combat à mort a débuté entre les deux B.O.W., Zili fait montre de certains talents en désarmant Claire et en éliminant Miller après avoir accédé au projet KODOKU. Sans grande surprise, celui-ci tourne autour d’un nouveau virus surpuissant dont veulent s’emparer les laboratoires pharmaceutiques Shenya afin de le revendre au plus offrant.

On nage une fois encore en pleine série B même si cela ne choque en rien puisque le scénario de Heavenly Island n’est que le reflet de la plupart de ceux des Resident Evil (ici auréolé d’un aspect coconut) qui n’ont jamais brillé par la qualité de leurs histoires à l’exception de Code Veronica, bien plus sombre et malsain. Du déjà vu en somme sorti des nouvelles créatures.

Le tome reste donc extrêmement convenu sans pour autant décevoir. Avouons-le, si vous avez accroché aux précédents volumes, celui-ci vous fera le même effet d’autant qu’on a le droit à quelques surprises. Comme nous l’avions déjà dit, le manga Heavenly Island ne prétendra pas au prix du meilleur scénario de l’année 2017 mais a tout de même pour lui de profiter du trait de Serizawa qui reste le plus gros atout de cette adaptation. Il montre une fois encore sa maîtrise durant les scènes d’action, gores et nerveuses à souhait et surtout parfaitement lisibles grâce à son style précis et dynamique. Le tout atteint ici son paroxysme et c’est avec une certaine jubilation qu’on suit l’avancée du groupe qui s’embarrasse encore moins de dialogues superflus. Tout juste sera-t’on quelque peu amusé par quelques échanges terriblement niais entre Takaru et Lola mais pas de quoi crier au scandale surtout de la part d’une telle adaptation.

En définitive, bien que Heavenly Island n’apporte pas grand-chose à l’univers de Resident Evil (d’autant que la liaison promise avec Resident Evil Revelations 2 pointe plutôt aux abonnés absents), sa lecture reste très agréable même si le manga fait sans doute trop souvent appel au fan service et à une construction cousue de fil blanc en ne s’émancipant jamais de ses influences directes. On aurait apprécié un peu plus de prise de risques mais malgré celà, le format court et l’orientation choisie scient parfaitement à l’univers et amènent un rythme haletant allant toujours à l’essentiel pour le bien du lecteur et le malheur des personnages.